Autoportraits dénonciateurs

27 février 2019   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Autoportraits dénonciateurs

Sujets insolites ou tendance, faites un break avec notre curiosité de la semaine. Dans Self, la photographe française Julie Kainabisa réalise des autoportraits symboliques, et dénonce les travers de notre société.

Jeune photographe de 22 ans, installée à Grenoble, Julie Botet, alias Julie Kainabisa a commencé la photographie durant l’adolescence. Ses premières images, représentant des plantes ou des barbelés dans un environnement sombre et brumeux, ont forgé son esthétique. « Puis, pendant des années, j’ai pris mes amis en photo. Le portrait a alors commencé à vraiment m’attirer », se souvient-elle. Après avoir été brièvement modèle, l’artiste repasse derrière l’objectif, pour se lancer dans la photographie de nu.

« J’ai fait poser une amie dans la forêt. Elle s’est laissé aller : aucune cambrure ni bouche entrouverte. Elle dévoilait un corps naturel, beau », précise la photographe. Consciente de la dimension thérapeutique du 8e art, Julie Kainabisa a finalement décidé de réaliser des autoportraits. Une manière de « [se] regarder en face ». Un acte qui marque le début de la série Self. « J’ai souhaité créer des scènes entre le souvenir et le rêve. Traiter ma mémoire et en reprendre possession, en accueillant toutes mes émotions », souligne l’artiste.

Affronter ses démons

Shootés à la lumière naturelle, dans son propre appartement, les clichés de Julie Kainabisa se lisent comme des allégories mystérieuses. « J’ai par exemple imaginé et mis en scène ma mort, à l’aide d’un simple tissu blanc comme un linceul, confie la photographe. J’utilise également le plastique ou encore le scotch – symboles de notre monde en déclin. Une matière que l’on retrouve partout dans notre monde. Et puis, le plastique évoque la chirurgie esthétique. Reflet d’une société malade, où le culte du corps parfait n’a jamais été aussi lucratif. Nous sommes à la fois consommateurs, et produits. »

En se mettant en scène, Julie Kainabisa affronte ses démons, ses doutes et ses émotions. Une pratique qui la libère du mal-être. Dysmorphie, boulimie, jalousie et violence se mélangent dans Self, et donnent à voir les différents symptômes d’une société surconsommatrice. « Cela peut sembler dur, mais j’ai, à ma manière, apporté un témoignage », conclut l’artiste, qui n’hésite pas à confronter de nombreux souvenirs douloureux pour construire son projet. Une introspection touchante et originale.

© Julie Kainabisa© Julie Kainabisa
© Julie Kainabisa© Julie Kainabisa
© Julie Kainabisa© Julie Kainabisa
© Julie Kainabisa© Julie Kainabisa

© Julie Kainabisa

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