
Bastien Bilheux et Thao-Ly, nos coups de cœur de la semaine, vous plongent dans deux récits différents qui ont en commun un aspect cinématographique. Le premier compose des images autour d’un événement passé ou latent. La seconde immortalise les rues quand elle ne produit pas des éditoriaux de mode.
Bastien Bilheux
« Je qualifierais mon approche photographique de poétique, plastique et intime », indique Bastien Bilheux. One Minute Before Chaos en est le reflet. Cette série, qu’il considère comme un carnet de voyage, donne à voir des récits en suspens, des séquences qui suivent ou précèdent un moment particulier. « C’est un ami qui, en regardant ces images, m’a dit qu’il avait l’impression que quelque chose allait se passer, ou venait d’arriver. Qu’on était juste à côté de l’événement. J’aime cette tension. C’est ce que j’ai toujours cherché, je crois, même sur des travaux précédents avec un sujet défini à l’avance, j’aimais déjà parler de ce qu’il y a derrière, ou autour, ou comment le sujet que je dois traiter s’est construit, sans moi », explique-t-il. À l’image, des marguerites en mouvement surgissent dans la nuit à coup de flash. La portière d’un véhicule ouvre sur l’obscurité la plus totale. Un homme, sur la plage, déplace une pile de matelas quand une jeune femme scrute l’horizon imprécis. « Je pense que ça parle de l’absence, d’une attente, du temps et de l’errance. Parce que c’est par ce procédé que j’ai fait ces images », conclut le photographe.





Thao-Ly
« C’est un peu par hasard que tout a commencé », nous explique Thao-Ly. À l’issue d’études en informatique, la jeune diplômée décide de changer de milieu pour rejoindre celui de l’art. « C’est assez drôle, car j’ai l’impression d’avoir fait les choses à l’envers : c’est après avoir exposé mes photos que je me suis véritablement prise de passion pour la photographie, poursuit-elle. Il y a deux ans, une opportunité s’est présentée : exposer dans une petite galerie à Saint-Étienne. À cette époque, je ne faisais que des photos avec mon téléphone, juste pour le plaisir, principalement des paysages. » Depuis, l’autrice réalise essentiellement des éditoriaux de mode quand elle n’immortalise pas les détails qui l’attirent au détour des rues qui lui sont familières ou qu’elle découvre au gré de ses voyages. La postproduction s’impose également comme un élément clef de son processus créatif. « J’aime dire que j’aborde la photographie comme un peintre aborde sa toile. J’aime que le rendu de mes images soit parfois abstrait, parfois implicite, pas toujours immédiatement lisible. Ce qui compte avant tout pour moi, c’est de susciter une émotion, positive ou négative, chez celui ou celle qui regarde mes photos, que cela ne laisse pas indifférent. Je souhaiterais que les gens se disent, en les observant : “Il y a une histoire derrière ce cliché.” » À l’avenir, Thao-Ly mettra l’accent sur ces récits en se tournant davantage vers le reportage qu’elle perçoit comme l’approche la plus à même « de donner une dimension plus politique et engagée [à ses sujets], de montrer et dénoncer ».




