Écofemmes Fest : un rendez-vous pour créer, lutter, transmettre

Écofemmes Fest : un rendez-vous pour créer, lutter, transmettre
Trenza, le lien qui nous unit, 2025 ©Gabriela Larrea Almeida
Des épis de maïs
Ra’yi © Isadora Romero

Jusqu’au 9 novembre prochain, La Caserne, dans le 10e arrondissement de Paris, accueille la première édition d’Écofemmes Fest, un rendez-vous inédit où se croisent expositions, performances, projections, ateliers, tables rondes, DJ sets et marché écoféministe. Conçu comme un espace de réflexion autant que de célébration, le festival porté par l’association Minerva entend mettre en lumière la création féminine tout en interrogeant nos liens au vivant.

Née d’une amitié entre Francesca Rozzi et Sveva Saglimbeni, Minerva s’impose comme une jeune association déjà convaincante dans le paysage artistique parisien. « Elle est née de notre rencontre lors d’un master en marché de l’art contemporain. Nous avions toutes deux une forte envie de concevoir et de produire des événements artistiques qui soient les nôtres, en accord avec notre sensibilité et notre engagement », expliquent les fondatrices. Installées à Paris et originaires d’Italie, elles observent avec attention les inégalités qui perdurent dans le monde de l’art. « Notre initiative répond à un besoin à la fois personnel et collectif : celui de renforcer la place des femmes dans la scène artistique contemporaine encore marquée par des dynamiques inégalitaires. » Depuis leur lancement en décembre 2024, elles ont déjà orchestré expositions, ateliers et performances. Écofemmes Fest sera leur premier festival composé de trois jours d’événements pluriels, conçus comme un espace de rencontre et de pensée collective autour de l’écoféminisme.

Ce mouvement, théorisé depuis les années 1970, nourrit toute la programmation. « L’écoféminisme considère que notre société repose sur une triple domination et exploitation : celle des femmes, de la nature et des minorités. Aujourd’hui, alors que les crises écologiques et sociales s’intensifient, nous pensons que l’art demeure un espace de résistance, de questionnement et de réinvention », précisent les fondatrices. Pour elles, il ne s’agit pas d’un concept figé, mais d’un terrain d’expérimentation sensible : « Nous voulions dépasser le cadre de la simple exposition pour offrir une expérience collective et inclusive, où différentes formes d’expression puissent dialoguer. » 

Une personne aux cheveux longs visage au soleil
Ra’yi © Isadora Romero
Une personne qui arrose un terrain
Romi © Isadora Romero
une mosaïque de polaroid
Prólogo © Isadora Romero

Deux regards de résistance

Au cœur du festival, une exposition pluridisciplinaire réunira les œuvres de trois artistes : Clémence Vazard, Isadora Romero et Gabriela Larrea Almeida. Toutes trois explorent les enjeux écologiques et féministes contemporains. Si leurs approches présentent des formes et matériaux variés, Isadora Romero et Gabriela Larrea Almeida ont en commun d’utiliser la photographie. Dans leurs démarches, l’image n’est pas seulement un médium. Elle devient un outil de recherche, un espace de mémoire et un terrain de résistance, révélant la puissance politique et sensible du regard féminin porté sur le vivant. Lauréate du Louis Roederer Foundation Discovery Award à Arles en 2023, Isadora Romero déploie une photographie située à la croisée du documentaire et de la recherche. « Située à Quito, elle mène depuis six ans une vaste recherche photographique sur les liens entre exploitation des terres, disparition des semences autochtones et luttes menées par les femmes pour la préservation du vivant », résument les fondatrices de Minerva. Sa série Ra’yi – « graine » en guarani – révèle la force tranquille des guardianas de semillas du Paraguay, ces femmes qui protègent la biodiversité locale face à l’agro-industrie et aux inégalités foncières. 

Face à cette dimension documentaire, le travail de Gabriela Larrea Almeida convoque la poésie, la mémoire intime et les gestes artisanaux. Également originaire de Quito et installée à Paris, l’artiste explore les liens symboliques entre corps féminin et nature. Cyanotype, broderie, laine… Sa pratique évoque l’héritage des savoir-faire traditionnels, la spiritualité et la transmission. Dans Trenzas, elle réactive le motif de la tresse, « symbole fort d’appartenance à sa culture équatorienne ». La série Agua Viva associe, quant à elle, corps et mouvement de l’eau. « L’eau devient métaphore du féminin. En perpétuel mouvement, capable de s’adapter, de déborder, de se transformer », ajoutent Francesca Rozzi et Sveva Saglimbeni. Avec ce premier Écofemmes Fest, Minerva ouvre un espace où l’art se vit autant qu’il se pense. Trois jours pour semer des idées, célébrer les voix qui s’élèvent et laisser germer de nouveaux horizons.

une image abstraite en noir et blanc
Agua Viva, Transportée, 2025 © Gabriela Larrea Almeida
une image abstraite en noir et blanc
Agua Viva, Echapée, 2025 © Gabriela Larrea Almeida
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