« J’aime immortaliser les repas et tout ce qui a trait à la cuisine, aux choses communes. Saisir la beauté de ces éléments est très satisfaisant », confie Eduard Sánchez Ribot, auteur de la couverture du Fisheye #57. Né en 1992, le photographe catalan se plaît à mettre en lumière la fragile harmonie des petits moments du quotidien dans des compositions étudiées. « En vérité, élaborer mes images me confère une sérénité d’esprit. Je suis toujours enclin à créer des tableaux ordonnés, sans trop de chaos, explique-t-il. J’imagine que cela fait partie de ma personne et correspond à ma manière d’appréhender l’existence. » Porté par le hasard d’un instinct ou d’une pensée profonde et vagabonde, il utilise le 8e art comme un médium susceptible d’apporter les réponses à une quête d’identité permanente. « Je travaille en ce moment sur un projet que j’ai nommé 8 004 981 877. Le titre est une approximation du nombre d’habitants de la planète. Nos vies évoluent, mais nous ne réalisons presque jamais comment ni où elles nous mènent. Pourquoi je choisis ce chemin plutôt qu’un autre ? Est-ce que je souhaite vraiment m’y aventurer ? Ou est-ce une volonté de la société ? Avec le temps qui passe, nous nous demandons souvent si nous agissons en accord avec nous-mêmes », souligne-t-il. Dans l’ouvrage qu’il espère publier en 2023, l’artiste espagnol entend cristalliser ses réflexions en traçant sa propre voie « à travers un conflit intérieur que le monde actuel rend insupportable autrement ». Eduard Sánchez Ribot, dont nous avions déjà présenté le travail, se prête aujourd’hui à l’exercice du portrait chinois.
Si tu étais…
Une émotion ?
La nostalgie, elle me pousse à prendre des photos.
Une de tes images ?
La toute première. C’était en 2013, à Lille. Une photo banale : une plante avec des livres sur le sol et une lampe sphérique. Depuis ce cliché, je n’ai jamais arrêté de prendre des photos.
Une période historique ?
Les années 1970-80, mais surtout les années 1980 parce que je me sens vraiment lié à l’esthétique de cette période, de même qu’à son imaginaire.
Un personnage historique ou de fiction ?
Vito Corleone, le meilleur gangster de tous les temps ! J’adore les films sur les gangsters.
Une lumière ?
Toujours un coucher de soleil, mais en hiver, bien sûr !
Quelqu’un, mort ou vivant, avec qui réaliser un projet en duo ?
Ernst Haas. Je l’ai découvert il y a quelques mois. Je suis fasciné par ses couleurs et ses compositions impossibles.
Un animal réel ou légendaire ?
Je suis un amoureux des chats !
Un décor inhabituel ?
Ma maison. Parfois, elle fait office de charmant décor.
Une musique ?
Bad Kingdom de Moderat. Elle me fait pleurer.
Un espace culturel ?
Le Musée de l’Orangerie. C’est le meilleur musée que j’ai été donné de voir. Ces peintures… Wow !
Une anecdote ?
Je ne me suis jamais intéressé à la photographie avant ma première photo, en 2013.
Un penseur et sa citation ?
Poc a poc i bona lletra. C’est un proverbe populaire catalan. Ça veut dire que les choses ne doivent être faites dans la précipitation, mais avec prudence, avec la lenteur nécessaire pour qu’elles se passent bien.
Un paysage ?
Les Pyrénées catalanes.
© Eduard Sánchez Ribot