Dans les images de Paul Cupido, le monde se lit et se parcourt en poésie. Paysages fantasmés, délicatesses amoureuses et corps libérés… L’univers de l’artiste néerlandais est une invitation à de multiples flâneries rêveuses. Cet article est à redécouvrir au cœur du Fisheye #59.
Paul Cupido fait partie de ces artistes qui étudient la nature et les êtres qui l’environnent avec minutie, cherchant à chaque fois à déceler l’élément marquant, le détail évocateur, celui qui dirait tout avec un rien. Un goût des petites choses qu’il explique de la manière suivante : « Je voyage souvent et c’est là que je sors vraiment de ma zone de confort. Je puise mon inspiration dans l’aventure, en capturant un moment tel qu’il se présente, sans trop planifier. Le vivant m’inspire sans cesse. Par exemple, ce que je trouve incroyablement beau dans le Sakura [les cerisiers en fleurs au Japon], c’est l’acceptation de l’éphémère. À un moment, j’avais beaucoup de mal avec cela, les questions existentielles, la mort, qui est inextricablement liée à la vie. La photographie est, selon moi, l’instrument capable de vous amener à l’acceptation et à l’abandon. »
Se considérant comme un photographe en constant apprentissage, l’artiste néerlandais cherche à rendre l’invisible tangible aux yeux des plus sensibles. Au même titre qu’un morceau de musique qui nous fait chavirer le cœur, les œuvres de Paul Cupido nous subjuguent en nous entraînant à « la fréquence la plus élevée : celle de l’amour ». De ses premiers essais photo au ton punk et provocateur, le photographe a évolué vers une poésie visuelle et symbolique. Une manière de se fondre dans l’instant – qu’il soit présent, passé ou à venir –, et de partager des émotions pures. « Je dois admettre que je suis assez mélancolique, sensible à la nostalgie et au romantisme. J’aime cela dans la photographie comme dans ma vie, réelle ou imaginaire. La beauté de l’imaginaire, c’est qu’il peut devenir réel plus tard, tant qu’il est vraiment sincère. »
Le vol d’un oiseau blanc, le bonheur insouciant d’un bain de minuit, l’eau d’un lac perlé de gouttes de pluie, une assiette brisée… Avec un soin particulier porté à la retouche et à de subtils effets de surfaces, Paul Cupido délivre avec raffinement de petites épiphanies délicatement mâtinées de mystère. L’ordonnancement de ses œuvres s’apparente à un rituel sacré, à un moment de dialogue avec ce qui prend forme devant lui. Que ce soit dans son processus créatif ou dans ses images, Paul Cupido nous invite à l’abandon, à l’émerveillement, à regarder avec attention les cerisiers en fleurs, ou à rester éveillés les soirs de pleine lune. « La lune m’a réveillé, un des haïkus du poète japonais Bashõ, est pour moi une source d’inspiration. J’aimerais que mon travail s’en approche. »
La lune m’a réveillé neuf fois
Toujours à 4 heures du matin
Les photos de Paul Cupido publiées dans ces pages ont été réalisées durant la résidence organisée par Château Palmer et Leica en 2022. Ce travail est exposé dans la nouvelle Leica Gallery Paris, jusqu’au 24 juin (26, rue Boissy d’Anglas, Paris 8e), et fait aussi l’objet d’une publication, Séléné, aux éditions Filigranes, (35 €, 112 pages).
© Paul Cupido