La Galerie XII à Paris, accueille, jusqu’au 13 janvier, une exposition à la photographe germano-brésilienne Mona Kuhn. Dans sa série KINGS ROAD, l’artiste repousse la frontière de la présentation photographique et architecturale.
Avec KINGS ROAD, Mona Kuhn explore les liens entre photographie et architecture en plongeant le·la spectateurice au cœur de la Kings Road House, mythique maison d’architecte expérimentale imaginée par Rudolf Schindler en 1922 en Californie. La Galerie XII à Paris lui consacre actuellement une exposition – l’une des premières dans un espace de galerie. À travers des photographies, une projection vidéo et une installation sonore, Kuhn réinterprète le discours autour de la représentation du corps humain et de son occupation de l’espace. Son écriture tente de trouver un fil rouge entre nos existences communes, en utilisant l’amour et le destin comme outils d’étude.
Entre les années 1920 et 1950, la Kings Road House est un véritable tourbillon de créativité et de foisonnement artistique. Un espace tourné vers le futur, investi par les avant-gardes. Parmi les visiteur·ses de cet espace, figure une femme mystérieuse à qui l’architecte adressait des lettres d’amour. Kuhn part de ces documents, trouvés en fouillant dans les archives de Schindler, pour construire sa narration photographique. Cette présence mystérieuse habite la maison, se fond avec les murs, nous transporte dans une dimension autre. À la manière des surréalistes, la photographe utilise le processus de la solarisation pour donner à ses images une allure éthérée en les inscrivant dans un contexte presque métaphysique.
Un modèle d’architecture radicale
La Kings Road House a été définie parfois comme une « expérience architecturale et sociale ». Comme l’indique la Galerie XII, « par sa fabrication en matériaux industriels tels que le béton nu, le séquoia non traité, les panneaux de toile coulissante d’inspiration japonaise ou le verre, est un modèle d’architecture radicale. » La maison, pensée aussi comme une expérience sociale, est conçue comme un espace de vie, de travail et de partage pour deux familles. La villa reçut la visite de personnalités ayant fui l’Europe nazie, comme Albert Einstein, Greta Garbo, Marlene Dietrich, Edward Weston… Des artistes d’avant-garde laissèrent ici leur touche, mais aussi des visiteur·ses issu·es de tout milieu social, se rencontrant dans ce lieu que l’architecte avait imaginé comme un endroit d’accueil pour une grande communauté d’ami·es. Dépourvue de tout ornement et construite avec des matériaux bruts, la maison capte immédiatement l’attention de Mona Kuhn, attirée par cette ambiance à la fois solennelle et spartiate, à l’image d’un lieu spirituel, comme une sorte de temple. Exemple d’une architecture radicale, la maison dans les photographies de Kuhn apparaît dans son atmosphère fascinante et magnétique, typique du modernisme américain. Dans KINGS ROAD, le monde métaphysique côtoie la réalité, en nous transportant dans une histoire fantomatique autour de la mystérieuse amoureuse de l’architecte Schindler. L’architecture prend vie face à l’objectif de l’artiste, alors que la figure humaine devient accessoire. L’intangible est désormais tangible, le temps et l’espace se dilatent et se rencontrent autour d’un corps humain presque dématérialisé.