Le photographe américain Thomas Jordan est fasciné par le Midwest. Un territoire qu’il sublime dans Instant Honey, un ouvrage mêlant mélancolie, nature et banlieues pavillonnaires.
« Lorsque j’étais petit, mes parents nous photographiaient, mon frère et moi, avec des appareils jetables. Le processus me semblait magique : le temps et la mémoire se figeaient grâce à un bout de plastique. C’était fou »,
se souvient Thomas Jordan. Plus connu sous le pseudonyme de Tamejawdin sur Instagram, ce photographe installé dans l’Illinois est fasciné par le 8e art depuis longtemps. C’est en devenant père à son tour qu’il a renoué avec son amour d’enfance. « J’ai acheté un boîtier pour prendre en photo ma fille, et cela a ravivé mon amour du média. Je me suis alors essayé à la photographie argentique, et je n’ai plus fait marche arrière », confie-t-il.
Pour lui, la photographie est une histoire de connexions. Une expérience longue et sensorielle, qui sublime l’ordinaire et révèle la beauté cachée de l’environnement. Inspiré par l’œuvre d’Edward Hopper, Thomas Jordan transforme ses images en tableaux, éclairés par une lumière chaleureuse et poétique. Une atmosphère particulière que l’on retrouve dans Instant Honey, un ouvrage regroupant les errances du photographe dans le Midwest américain.
La mélancolie du paysage américain
Banlieues tranquilles, maisons abandonnées, vieilles voitures et fleurs sauvages composent le livre de Thomas Jordan. Un savant mélange de nature et d’urbain, réunis par une nostalgie commune. « Je suis né dans les banlieues du nord-ouest de Chicago. Les maisons que je capture me rappellent celles de mes souvenirs », précise l’auteur. D’apparence banales, les images de ces espaces urbains sont sublimées par les tons chauds d’un ciel rougeoyant. Un détail nécessaire pour le photographe, qui ne shoote qu’au lever ou au coucher du soleil. « J’ai commencé à capturer la végétation sous cette même lumière. Le résultat ? Une beauté pure, naturelle, ajoute-t-il. En combinant les deux, j’ai réalisé le portrait parfait du Midwest, et de son atmosphère estivale nostalgique. »
À la manière d’Edward Hopper, Thomas Jordan invite la mélancolie dans le paysage américain. Comme le peintre, le photographe utilise la lumière à la manière d’un outil ambigu, qui sublime le quotidien, et brouille la frontière entre rêve et réalité. Tout en contraste, les rayons lumineux révèlent des détails, et évoquent tantôt une calme journée de vacances, tantôt la tristesse annonçant la fin de l’été. Un récit poétique, qui fait écho au titre de l’ouvrage, référence aux paroles de la chanson Suzanne de Leonard Cohen : and the sun pours down like honey (et le soleil coule comme du miel).
Instant Honey, Éditions Aint-Bad, 40$, 96 p.
© Thomas Jordan