Le génie du flacon

23 mars 2023   •  
Écrit par Eric Karsenty
Le génie du flacon

Pour le 170e anniversaire de son célèbre flacon d’eau de Cologne dédié à l’impératrice Eugénie, la maison Guerlain a demandé à onze femmes photographes de revisiter ce précieux objet. Ce flacon iconique paré des abeilles de l’Empire a gardé tout son parfum de mystère. Les images créées à cette occasion sont à retrouver dans une exposition à butiner sans modération ! Cet article est à retrouver dans notre dernier numéro.

La maison Guerlain entretient avec la photographie des relations privilégiées qui ont donné lieu à de très belles créations menées depuis longtemps par des artistes comme Lee Miller ou Robert Doisneau, et plus près de nous Liu Bolin ou Vik Muniz, ainsi que par de jeunes créatrices comme Charlotte Abramow, qui présentait l’an dernier Piquées, une exposition originale autour des abeilles, emblème de la marque (voir Fisheye 53). Aujourd’hui le parfumeur a décidé de revisiter son histoire en demandant à onze autrices internationales et appartenant à plusieurs générations de photographier un flacon iconique créé en 1853 à l’initiative de Pierre-François-Pascal Guerlain. Le fondateur de la marque avait alors dédié à l’impératrice Eugénie une « Eau de Cologne impériale » à l’occasion de son mariage avec l’empereur Napoléon III. Et pour habiller ce précieux parfum, le flacon a été confié aux verreries Pochet du Courval qui en firent un véritable bijou. 

© Delfina Carmona© Christine Spengler

© à g. Delfina Carmona, à d. © Christine Spengler

Promesse de luxe et de rêve

« Le Flacon aux Abeilles se présente comme une promesse de luxe et de rêve, mais représente surtout la permanence de ce rêve, au travers de la tradition. Les abeilles sont symbole de vie éternelle », analyse Valérie Belin, l’une des onze artistes ayant reçu une carte blanche pour ce projet original pensé par Ann Caroline Prazan, directrice du département art, culture et patrimoine de Guerlain, et dont le commissariat est assuré par Jean-Luc Monterosso, fondateur de la MEP, et Benoît Baume, directeur de Fisheye. Ces onze cartes blanches constituent autant de dialogues qui nous relient à l’histoire. « Chacune de ces œuvres poétiques est unique, analyse Ann Caroline Prazan. Elles font sens avec les fondements de notre maison, elles évoquent la transmission, la nature, l’héritage. C’est émouvant de voir comment chaque nouvelle génération d’artistes s’empare de nos créations ! » À noter que cette initiative s’inscrit dans le programme Women for Art qui vise à renforcer le soutien de la maison Guerlain aux artistes femmes.

Chaque autrice sollicitée a imaginé une approche singulière pour délivrer une image forte qui nous interroge. S’impliquant toujours corps et âme, ORLAN – qui s’est déjà intéressée au parfum en créant ses propres fragrances – s’est concentrée sur l’impératrice et a décidé de s’hybrider avec elle. « Ce geste me permet de faire coexister deux temps, deux univers visuels, deux femmes », détaille l’artiste. Eugénie a aussi orienté l’image de Myriam Roehri qui nous confie : « Je l’ai laissé imprégner mes pensées, mes rêveries… Ce compagnonnage intérieur m’a emmené vers l’Espagne et ce merveilleux jardin qui surplombe la Méditerranée. » Et Christine Spengler a elle aussi été sensible à l’impératrice et à ce flacon qui « symbolise l’amour que porta l’empereur Napoléon III à son épouse Eugénie de Montijo, et aussi celui de tous les hommes qui l’offrent aujourd’hui à leurs amantes ». Sa photographie « ensorcelante et onirique », qu’elle intitule L’Amour fou, un clin d’œil à André Breton, nous oriente immanquablement vers le surréalisme. Ce mouvement artistique qui s’inspire du monde des rêves traverse également les créations d’autres photographes embarquées dans l’aventure imaginée par la maison Guerlain.

Chère Eugénie, jusqu’au 16 juillet 2023 à la Maison Guerlain – 68 avenue des Champs-Élysées, 75008 Paris

Retrouvez cet article en intégralité dans Fisheye #58 !

 

© Jane Evelyn Atwood

© Jane Evelyn Atwood

© Charlotte Rampling

© Charlotte Rampling

Image d’ouverture : © Delfina Carmona

Explorez
À Arles, Jules Ferrini capture le noir solaire
© Jules Ferrini
À Arles, Jules Ferrini capture le noir solaire
À travers deux séries, Noires sœurs et Modern Sins, Jules Ferrini plie la lumière et le temps pour faire vibrer l’obscurité d’un...
26 juillet 2024   •  
Écrit par Hugo Mangin
Gangs de chats, pigeons dérobés ou espions : ces séries de photos sur les animaux
© Chloé Lamidey
Gangs de chats, pigeons dérobés ou espions : ces séries de photos sur les animaux
Chiens, chats, ours, éléphants ou encore pigeons, apprivoisés, sauvages ou même espions, parmi les séries présentées sur les pages de...
23 juillet 2024   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Onironautica : les rêves lucides, l’IA des êtres humains
© Ludivoca De Santis
Onironautica : les rêves lucides, l’IA des êtres humains
Collections d’images venues de rêves lucides, Onironautica de Ludovica De Santis interroge, au travers de mises en scène intrigantes...
19 juillet 2024   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Le Jardin du Lunch : les boulettes de Proust
© Pascal Sgro
Le Jardin du Lunch : les boulettes de Proust
Entre nostalgie et humour, le photographe belge Pascal Sgro saisit, dans sa série en cours Le Jardin du Lunch, la bienveillante laideur...
19 juillet 2024   •  
Écrit par Hugo Mangin
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Jeux olympiques : ces séries de photographies autour du sport
© Cait Oppermann
Jeux olympiques : ces séries de photographies autour du sport
Ce vendredi 26 juillet est marqué par la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Paris 2024. À cette occasion, nous vous...
Il y a 6 heures   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Transcendance par Kyotographie : promenade contemporaine au Japon
© Iwane Ai. A New River series, 2020. Avec l’aimable autorisation de l’artiste.
Transcendance par Kyotographie : promenade contemporaine au Japon
À l’occasion des dix ans du Festival, Kyotographie investit les Rencontres d’Arles pour la première fois. L’exposition...
Il y a 8 heures   •  
Écrit par Marie Baranger
À Arles, Jules Ferrini capture le noir solaire
© Jules Ferrini
À Arles, Jules Ferrini capture le noir solaire
À travers deux séries, Noires sœurs et Modern Sins, Jules Ferrini plie la lumière et le temps pour faire vibrer l’obscurité d’un...
26 juillet 2024   •  
Écrit par Hugo Mangin
Robin de Puy : partout, l’eau au centre du paysage
© Robin de Puy
Robin de Puy : partout, l’eau au centre du paysage
L'exposition Waters & Meer - Robin de Puy revient sur deux séries de la photographe néerlandaise. Un hommage aux populations rurales...
25 juillet 2024   •  
Écrit par Costanza Spina