L’éloquence des corps

07 janvier 2020   •  
Écrit par Lou Tsatsas
L’éloquence des corps

Avec 42 Wayne, la photographe américaine Jillian Freyer transcende les notions de féminin et de beauté. Un projet inspiré par la naissance des mouvements féministes et sa propre famille. 

« Je me spécialise dans les chocs émotionnels et physiques qu’endurent les corps féminins »

, déclare Jillian Freyer. Cette photographe américaine vivant et travaillant entre New York et New England, réalise des séries intimes, où ses sujets se dévoilent avec une fierté et une simplicité désarmantes. C’est grâce à la peinture que l’artiste a découvert la photographie, utilisant tout d’abord le médium comme une référence pour ses créations. « Puis j’ai découvert l’argentique. La chambre noire me procurait les mêmes sensations tactiles que les tableaux, tout en m’offrant un résultat plus rapide. J’y retrouvais les détails, la texture et la qualité de la lumière que j’affectionnais : j’en suis immédiatement tombée amoureuse », raconte-t-elle.

42 Wayne voit le jour en 2016, alors que Trump crache sa misogynie au monde entier et que de nombreux mouvements sociaux naissent, donnant la parole aux femmes. « Ces changements m’ont poussée à affronter les problèmes au sein de ma famille. Nous ne pouvions jamais débattre sans élever la voix, et j’avais besoin de déconstruire les croyances avec lesquelles j’avais grandi », explique-t-elle. Débute alors une étude des comportements, des langages corporels, des habitudes de sa mère et ses deux sœurs. Des actions inconscientes influençant leur environnement, leur compréhension du monde, et même les générations futures.

© Jillian Freyer

Ceux qui ne se cachent pas

Composée de femmes de tout âge, 42 Wayne est une véritable relecture des notions de beauté et de féminité. Jillian Freyer, fascinée par la capacité du 8e art à révéler l’invisible, et figer ce que l’on ne peut percevoir à l’œil nu, livre avec cette série un récit intemporel. « Il est de plus en plus difficile de photographier les gens à cause des réseaux sociaux, explique-t-elle. Tout le monde souhaite être vu d’une certaine manière, comme s’ils étaient déjà un portrait d’eux-mêmes. Je m’intéresse davantage à ceux qui ne se cachent pas, qui m’autorisent à capturer leurs insécurités. » Une relation privilégiée qui l’aide à tisser des liens avec ses sujets, jouant ainsi avec la proximité, et plaçant les corps au premier plan.

Cicatrices de césarienne, peau ridée, orteils abîmés… Les détails que l’artiste aime révéler soulignent un besoin de transformer l’image de la femme. « J’ai grandi en lisant des magazines de mode, qui me poussaient à être mince et belle, à me maquiller… Si je suis toujours attirée, comme beaucoup, par cette beauté “parfaite” j’aime essayer de trouver d’autres manières de la définir », précise-t-elle. Texturés, presque palpables, les corps qu’elle shoote deviennent des toiles que l’on ne peut s’empêcher d’observer. Une matière vivante, marquée par la vie, le temps, forte et résiliente, assumant sa vulnérabilité. Inspirée par les regroupements féministes de notre époque, l’artiste dessine ici, avec une honnêteté touchante, une femme plurielle et puissante.

© Jillian Freyer© Jillian Freyer
© Jillian Freyer© Jillian Freyer

© Jillian Freyer

© Jillian Freyer© Jillian Freyer
© Jillian Freyer© Jillian Freyer

© Jillian Freyer

Explorez
Les images de la semaine du 17 novembre 2025 : portraits du passé et du présent
I Saw a Tree Bearing Stones in Place of Apples and Pears © Emilia Martin
Les images de la semaine du 17 novembre 2025 : portraits du passé et du présent
C’est l’heure du récap ! Cette semaine, les photographes de Fisheye dépeignent différentes réalités. Certains puisent leur inspiration...
Il y a 5 heures   •  
Écrit par Apolline Coëffet
5 événements photo à découvrir ce week-end
© Sandra Eleta
5 événements photo à découvrir ce week-end
Ça y est, le week-end est là. Si vous prévoyez une sortie culturelle, mais ne savez pas encore où aller, voici cinq événements...
22 novembre 2025   •  
Écrit par Fisheye Magazine
La Galerie Carole Lambert réenchante l'œuvre de Manuel Álvarez Bravo
Petit cheval de Quito © Archivo Manuel Álvarez Bravo
La Galerie Carole Lambert réenchante l’œuvre de Manuel Álvarez Bravo
Jusqu'au 18 décembre 2025, la Galerie Carole Lambert devient l’écueil des 40 tirages d’exception du photographe mexicain Manuel Álvarez...
21 novembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Emilio Azevedo : En ligne de mire
Rondônia (Comment je suis tombé amoureux d’une ligne), 2023 © Emilio Azevedo
Emilio Azevedo : En ligne de mire
Présentée dans le cadre du festival PhotoSaintGermain et au musée du Quai Branly, l'exposition Rondônia. Comment je suis tombé amoureux...
20 novembre 2025   •  
Écrit par Milena III
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Les images de la semaine du 17 novembre 2025 : portraits du passé et du présent
I Saw a Tree Bearing Stones in Place of Apples and Pears © Emilia Martin
Les images de la semaine du 17 novembre 2025 : portraits du passé et du présent
C’est l’heure du récap ! Cette semaine, les photographes de Fisheye dépeignent différentes réalités. Certains puisent leur inspiration...
Il y a 5 heures   •  
Écrit par Apolline Coëffet
5 événements photo à découvrir ce week-end
© Sandra Eleta
5 événements photo à découvrir ce week-end
Ça y est, le week-end est là. Si vous prévoyez une sortie culturelle, mais ne savez pas encore où aller, voici cinq événements...
22 novembre 2025   •  
Écrit par Fisheye Magazine
La Galerie Carole Lambert réenchante l'œuvre de Manuel Álvarez Bravo
Petit cheval de Quito © Archivo Manuel Álvarez Bravo
La Galerie Carole Lambert réenchante l’œuvre de Manuel Álvarez Bravo
Jusqu'au 18 décembre 2025, la Galerie Carole Lambert devient l’écueil des 40 tirages d’exception du photographe mexicain Manuel Álvarez...
21 novembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Les secrets des météorites dévoilés par Emilia Martin
I saw a tree bearing stones in place of apples and pears © Emilia Martin
Les secrets des météorites dévoilés par Emilia Martin
Dans son livre I Saw a Tree Bearing Stones in the Place of Apples and Pears, publié chez Yogurt Editions, Emilia Martin s’intéresse au...
21 novembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger