Arnaud Chochon et Sandra Conan, nos coups de cœur #263, représentent avec poésie des notions complexes. Le premier tente de mettre en image le deuil, tandis que la seconde s’intéresse à l’insouciance.
Arnaud Chochon
À l’âge de 41 ans, Arnaud Chochon a suspendu son activité salariale pour s’inscrire dans une école de photographie, d’où il est sorti diplômé en 2016. Passionné par le médium depuis son enfance, l’artiste le perçoit comme un outil permettant de découvrir de nouveaux lieux, de faire des rencontres marquantes. Travaillant régulièrement pour la presse, le photographe réalise en parallèle des projets plus personnels. C’est le cas de Way to Blue. « Mes frères et moi sommes très proches. Avec l’un d’eux, Thomas, nous avions amené notre frère Benoît à l’hôpital, suite à des migraines et des propos qui commençaient à être incohérents. Deux mois plus tard, il n’était plus là. Ce départ fut un choc, encore très douloureux, confie Arnaud Chochon. Il travaillait beaucoup. Son espace de liberté, sa bouffée d’oxygène était la voile », poursuit-il. Comme un hommage à cette passion, l’artiste fait de Way to Blue un récit aquatique et sensoriel, porté par l’étendue marine, le bruit des vagues et l’éclat du soleil sur l’écume. Çà et là, des silhouettes apparaissent, capturées dans des instants vulnérables, affectueux. « Ce chemin vers le bleu illustre pour moi le nouveau voyage de Benoît en mer – c’est là que nous avons dispersé ses cendres. Ce titre est aussi pour moi la recherche d’une nouvelle philosophie : la vie passe, il faut en profiter », précise le photographe. Une série délicate, illustrant, en contrepoint, la notion complexe de deuil.
© Arnaud Chochon
Sandra Conan
« Mon sujet IN-SOUCIANCE est au cœur même de mon travail photographique, j’aime photographier des instants, des attitudes hors du temps, qui révèlent à chacun de nous un état d’insouciance vécu, explique la photographe française Sandra Conan avant de poursuivre : J’aime photographier le mystère et la beauté d’un instant brut, l’arrêt du temps parfois contemplatif, brumeux, vaporeux … ». C’est au cours de ses voyages humanitaires avec des ONG qu’est née l’urgence de photographier « les deux facettes de cet état d’insouciance : l’insouciance pure de chaque enfant, essentielle dans sa construction, et la perte de cette légèreté des jeunes, et des adultes, du fait de l’insouciance des hommes ». Un face à face photographique nostalgique, intime et ô combien onirique qui sonne comme un acte de résistance. « On pourrait se donner le droit d’être insouciant, et de jouir de l’instant, face au monde qui perd pied », conclut la photographe. Une douce invitation au lâcher-prise.
© Sandra Conan
Image d’ouverture : © Sandra Conan