Au cœur des travaux de Paul D’Arcangela et Alis, nos coups de cœur #380 ? Le corps, ses mouvements, sa place dans leur environnement, et les émotions qu’il dégage.
Paul D’Arcangela
« La danse a beaucoup influencé ma manière de photographier. J’essaie de retranscrire de manière visuelle les sensations que j’ai traversées et je trouve que le corps est un moyen fabuleux et mystérieux de s’exprimer. J’aime chercher les failles dans les gestes, les chemins pris par les silhouettes, les résistances qui surviennent, les nœuds que l’on rencontre. J’aime aussi la rage de vivre – fragile et subtile – que possèdent certains danseurs, dans leur manière de repousser le sol, de se relever après leurs chutes. Métaphoriquement, j’y vois une belle leçon de vie »
, raconte Paul D’Arcangela. Formée en danse contemporaine, l’artiste s’est d’abord tourné vers la photographie pour capturer ses ami·e·s. Depuis, il perfectionne son regard à l’ETPA, à Toulouse et poursuit un travail d’auteur centré autour du mouvement, du corps. Très sensible aux ressentis, aux sensations, il aime s’éloigner des représentations plus classiques, et explorer les limites du genre, de la masculinité et de l’intimité. « On pense qu’être une personne forte signifie reléguer au second plan nos faiblesses. Mais en suivant ce mode de pensée, on s’aliène de nos singularités, on s’éloigne de nous-mêmes », ajoute-t-il. Alors, avec la grâce d’un chorégraphe, Paul D’Arcangela dirige ses modèles, les contorsionne, les fige en plein saut, en pleine honnêteté pour construire un récit plein de délicatesse.
© Paul D’Arcangela
Alis
Installée à Nantes, Alis, 31 ans, retrace son premier contact avec un boîtier argentique à l’âge de cinq ou six ans. « Peux-tu dire que je suis devenue photographe à ce moment ? C’est discutable », s’amuse-t-elle. À ses vingt ans, sa grand-mère et son mari lui offrent un petit compact, qu’elle emporte avec elle à chaque errance – une manière pour elle d’aiguiser son œil. Un goût pour la capture du monde extérieur qui perdure encore aujourd’hui. « J’aime photographier un peu au hasard, avec les éléments du décor qui m’entourent : les textures, les lignes, la météo… Il y a une sorte de semi-spontané dans mes images. Mais si je me lance dans le portrait, je prévois la séance, et nous fabriquons ensemble, avec mon ou ma modèle, pendant quelques heures », explique-t-elle. Au cœur d’une manifestation, dans le calme d’une petite ruelle, depuis la fenêtre d’un appartement… Alis aime capturer les nuances qui composent l’être humain. Une cicatrice, un regard contemplatif, un poing levé en signe de révolte… Les émotions jaillissent de ses images. « Ce qui m’inspire, ce sont les artistes et leurs univers, mais aussi les gens en colère, tourmentés ou rêveurs. Lorsque nous sommes dans le vrai d’une personne, d’un moment », précise-t-elle. Une thématique qu’elle souhaite développer en shootant des « gueules » « afin de mettre en avant des visages atypiques, et d’autres formes de beauté ! », conclut-elle.
© Alis
Image d’ouverture : © Paul D’Arcangela