Les coups de cœur #419

12 décembre 2022   •  
Écrit par Ana Corderot
Les coups de cœur #419

Mettre en image des impulsions de vie ou simplement l’aura d’un corps et d’un portrait : voici ce qu’Ilkin Efendiyev et Arthur Sailor, nos coups de cœur #419, entendent concrétiser. L’un joue de la disposition et du mouvement des couleurs. Quand l’autre pousse à bout sa réalité.

Ilkin Efendiyev

« Je suis un nihiliste qui accepte que l’homme soit une créature misérable coincée dans une prison intérieure, espérant toucher l’infini uniquement par l’art »,

déclare Ilkin Efendiyev. Originaire d’Azerbaïdjan, il se tourne vers le médium alors qu’il étudie aux Beaux-Arts. En parallèle, les lectures multiples de l’ouvrage Ways of Seeing de John Berger — un traité sur la manière dont nous percevons les images et notamment les peintures et les œuvres d’art du passé – ne font qu’accroître son appétence pour la photographie. Progressivement, le 8e art devient un moyen d’exprimer concrètement ses impulsions, mises quelque part à l’abri dans son inconscient. Profondément inspiré par Kandinsky, tant d’un point de vue symbolique que visuel, il anticipe, à la manière d’une esquisse, les moindres dynamiques et textures de ses futurs portraits. Parfois, il inverse ce processus et réutilise ses images comme de nouvelles toiles à peindre. « J’adore colorier avec les sensations que me donne la présence des personnes dans mes photographies. C’est pourtant simple, mais cela me semble miraculeux », ajoute-t-il. Si la grisaille assombrit parfois les paysages des peintures impressionnistes, dans les images d’Ilkin Efendiyev, c’est la chaleur des nuances ocre ou bleutées qui prédomine et éclaircit les visages. Déterminé à « surmonter la réalité physique de l’image », Ilkin Efendiyev distille avec finesse du mouvement dans l’abstraction.

© Ilkin Efenviyev

© Ilkin Efenviyev© Ilkin Efenviyev
© Ilkin Efenviyev© Ilkin Efenviyev

© Ilkin Efenviyev

© Ilkin Efendiyev

Arthur Sailor

C’est aux côtés de son père, lors d’une après-midi muséale, qu’Arthur Sailor s’est pris d’amour pour le 8e art « sans trop savoir comment ni pourquoi ». La première fois, ce ne fut pas tant ce qu’il avait photographié qui l’épata, mais la manière dont il avait regardé depuis l’objectif les détails qui l’environnaient. « J’essaye de décrire avec la photographie les choses que j’imagine, que je ressens. Qu’il s’agisse de parler de mon expérience ou de celle des autres, je tente d’être le plus sincère possible et sans concessions. Je pense que c’est dans l’intimité, dans ce que l’on dissimule profondément que se cache une partie de notre vérité, que l’on croit à tort insaisissable », explique-t-il. Grâce au médium, Arthur Sailor aspire à conserver un lien tangible au réel, mais aussi, et surtout à l’indicible – ou à ce que l’on s’évertue à ne pas comprendre. Une jeunesse pleine de rages incontrôlées, des contre-cultures, des angoisses ravalées, l’ombre et l’horreur… Ce sont autant de sujets qu’il revisite, décrypte, et ce souvent à travers du nu cru ou trituré. Car, c’est en passant par la matière qu’il conçoit le reste avec plus de limpidité. « Adolescent, on est complètement perdu, désorienté. On se cherche, on se perd, on se retrouve. On découvre le monde et les gens qui le composent. On visite l’étendue des choses que l’on ignore. On se heurte à la volonté et à la violence des autres, tout en dissimulant la sienne. Et bien souvent, on découvre dans ce contexte, la nuit, le sexe et la drogue », affirme-t-il. Faisant cohabiter des interrogations existentielles dans un environnement délétère, l’univers d’Arthur Sailor concède néanmoins à la jeunesse une once de lumière.

© Arthur Sailor

© Arthur Sailor© Arthur Sailor
© Arthur Sailor© Arthur Sailor

© Arthur Sailor

© Arthur Sailor

Image d’ouverture © Ilkin Efenviyev

Explorez
« Chère et tendre IA »… conversation entre l’artiste et la machine
© Rineke Djikstra
« Chère et tendre IA »… conversation entre l’artiste et la machine
Imaginé dans le cadre d’une résidence à la Maison européenne de la photographie (MEP), Photo Against the Machine est un ouvrage...
19 décembre 2024   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Focus : rituels vampiriques, fouilles archéologiques et mélancolie poétique
© Devin Yalkin, Until Dawn.
Focus : rituels vampiriques, fouilles archéologiques et mélancolie poétique
Créé par les équipes de Fisheye, Focus est un format vidéo innovant qui permet de découvrir une série photo en étant guidé·e par la...
18 décembre 2024   •  
16 expositions photos à voir pendant les vacances de Noël
© Ali Kazma / Courtesy Francesca Minini, Milan
16 expositions photos à voir pendant les vacances de Noël
Les fêtes de fin d’année sont souvent l’occasion de passer du temps avec nos proches, de nous reposer et de trouver les nouvelles...
16 décembre 2024   •  
Écrit par Apolline Coëffet
20 beaux-livres de photographie à (s’)offrir à Noël
Service à bord d’une voiture-restaurant du train Capitole, 1966. © Fonds de dotation Orient Express
20 beaux-livres de photographie à (s’)offrir à Noël
Offrir un ouvrage à Noël est toujours une belle manière d’ouvrir des portes sur de nouveaux mondes. À cet effet, la rédaction...
13 décembre 2024   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Les images de la semaine du 16.12.24 au 22.12.24 : une multitude de dialogues
© Rebecca Najdowski
Les images de la semaine du 16.12.24 au 22.12.24 : une multitude de dialogues
C’est l’heure du récap ! Cette semaine, les pages de Fisheye dévoilent une multitude de dialogues initiés par la photographie.
Il y a 11 heures   •  
Écrit par Apolline Coëffet
The Color of Money and Trees: portraits de l'Amérique désaxée
©Tony Dočekal. Chad on Skid Row
The Color of Money and Trees: portraits de l’Amérique désaxée
Livre magistral de Tony Dočekal, The Color of Money and Trees aborde les marginalités américaines. Entre le Minnesota et la Californie...
21 décembre 2024   •  
Écrit par Hugo Mangin
Paysages mouvants : la jeune création investit le Jeu de Paume
© Prune Phi
Paysages mouvants : la jeune création investit le Jeu de Paume
Du 7 février au 23 mars 2025, le Jeu de Paume accueille le festival Paysages mouvants, un temps de réflexion et de découverte dédié à la...
20 décembre 2024   •  
Écrit par Costanza Spina
Mirko Ostuni : une adolescence dans les Pouilles
© Mirko Ostuni, Onde Sommerse.
Mirko Ostuni : une adolescence dans les Pouilles
Dans Onde Sommerse, Mirko Ostuni dresse le portrait de sa propre génération se mouvant au cœur des Pouilles. Cette jeunesse tendre et...
20 décembre 2024   •  
Écrit par Marie Baranger