Andréa Martins et Hugo Blachier, nos coups de cœur #421, placent l’humain au cœur de leur travail. L’une a capturé la révolte des soirées clandestines en plein confinement, et l’autre étudie les codes de la masculinité sur les plages marseillaises.
Andréa Sena
C’est à 21 ans, lors d’un voyage au Maroc, qu’Andréa Martins découvre le 8e art. Charmée par le potentiel de l’image comme par l’opportunité de pouvoir, à travers elle, embrasser une culture étrangère, elle se perfectionne, à son retour, dans le photojournalisme. « Je recherche avant tout une sensation de dépaysement, ce qui m’amène à rencontrer des communautés avides d’émancipation », précise-t-elle. Et c’est de ce goût pour l’atypique qu’est née Night Seasons. Une série dans l’intimité des fêtes illégales en plein Covid, là où les désirs dominent, et l’envie de liberté reprend le dessus, impérieuse, indomptable. « J’ai toujours aimé la nuit. Pendant le confinement, j’étais sujette à l’insomnie. Marcher des heures le soir me manquait terriblement… Ma première soirée clandestine est partie d’une envie personnelle de sortir et de déjouer les règles imposées de la deuxième quarantaine, annoncée en octobre 2020 », se souvient l’artiste. En parallèle, alors que le gouvernement sévit, les événements grandissent. De simples réunions en appartements parisiens, ils se transforment en rendez-vous notoires au fin fond des campagnes. Une « forme de révolte » qu’Andréa Martins capture dans un noir et blanc sulfureux. Corps dénudés, prises de drogues, plaisirs sensuels… À coups de flash, elle encapsule l’atmosphère de ces rendez-vous d’insurgé·es. « On voulait se sentir libres de nos corps et repousser nos limites d’une manière politiquement correcte, lorsque légalement plus aucune musique ne tournait. Ce reportage a duré deux ans – le temps des restrictions. Je voulais rendre cette série aussi éphémère que la période qu’on traversait », conclut-elle.
© Andréa Martins
Hugo Blachier
« La photographie a toujours été un moyen pour moi de travailler mon rapport à l’identité. Lorsque je shoote, je traite de sujets ou de lieux qui me sont propres et prennent une part importante dans ma construction personnelle »
, déclare Hugo Blachier, 25 ans. Installé à Marseille, l’auteur a découvert le 8e art à l’adolescence grâce à son père. Aujourd’hui diplômé de l’université Goldsmiths de Londres en photographie et anthropologie, il continue à développer des projets qui lui tiennent à cœur. « Waves of Masculinities a été réalisée l’été dernier. À travers cette série, je souhaite mettre en lumière les moyens par lesquels les jeunes hommes marseillais s’approprient le bord de mer dans la performance de leur virilité », explique-t-il. À la croisée du portrait et de la photographie de voyage, Hugo Blachier fige les corps, les habitudes, les mouvements de ses modèles. Une véritable étude des « caractéristiques de ce qui aujourd’hui régit l’idéal masculin dans les cultures méditerranéennes », précise-t-il. Sport, torses dénudés, amourettes paradées sous les regards de tous et toutes… Sous la lumière chaleureuse du soleil du sud, les côtes comme les hommes attirent le regard, forcent la narration. Un récit impactant, guidant le·a regardeur·se vers une réinterprétation d’un événement a priori ordinaire, pour apprendre à en décoder les nuances.
© Hugo Blachier
Image d’ouverture : © Andréa Martins