Nos coups de cœur #432, Manón Yanes et Andrii Kasianchuk, s’imprègnent de la nostalgie d’un temps passé pour composer leurs images. L’une s’inspire de souvenirs d’enfance pour créer un univers ensoleillé et l’autre capture des éléments naturels et mystiques d’un village ukrainien.
Andrii Kasianchuk
Après le début de l’invasion russe sur le territoire ukrainien, la vie d’Andrii Kasianchuk, comme celle de toute la population d’Ukraine, a considérablement changé. « Pour échapper aux bombes et aux troupes ennemies, ma femme et mes parents ont dû déménager dans un village situé à environ 130 km de la ligne de front. Presque tous les jours, nous entendions le bruit des roquettes et des hélicoptères qui survolaient la maison », raconte avec émotion le photographe installé à Kiev. Habituellement inspiré par la beauté de la nature et ces moments de solitude qui l’aident « à se connecter au monde », l’artiste se retrouve anéanti, en panne d’inspiration, durant de long mois suite à cette invasion massive. Pour se distraire et se calmer, Andrii Kasianchuk capture les environs du village au cours de promenades. Il poursuit : « je prenais simplement des photos pour enregistrer ma vie pendant la guerre. Plus tard, j’ai trouvé un livre sur les différentes langues du monde, dont un chapitre sur les hiéroglyphes égyptiens. Au fur et à mesure de mes lectures, j’ai commencé à remarquer de plus en plus de similitudes entre The Egyptian Book of the Dead et mes photographies ». Nait alors la série intitulée Inpu en référence à la divinité Anubis, l’un des personnages les plus importants de la mythologie égyptienne. « Son rôle était de préparer les corps des morts et d’escorter leurs âmes », précise l’artiste. Entre carcasses d’animaux et scènes de vie poétiques, les images en noir et blanc d’Andrii Kasianchuk laissent une impression indélébile.
© Andrii Kasianchuk
Manón Yanes
Photographe et vidéaste installée entre Madrid et Tenerife, dans les Îles Canaries, Manón Yanes capture son entourage depuis son adolescence. « J’ai toujours voulu être photographe, mais au début, dans ma tête et dans mon éducation, la photographie ne pouvait être qu’un passe-temps et non un travail. J’ai donc étudié pour devenir professeure de musique. Mais, à la fin de mon cursus, j’ai décidé de me donner une chance en suivant des cours sur la photo, la vidéo et l’éclairage », se remémore l’artiste. Après une période difficile accompagnée d’une perte de confiance en elle, Manón Yanes devient monteuse vidéo pour réaliser des bandes-annonces de films puis travaille avec des marques de mode. « C’est là que j’ai repris contact avec ma créativité. Plus un plaisir qu’un travail, la photo me permet de canaliser mes émotions. Cela me rend heureuse de prendre des images de ma réalité et de mon environnement comme si ma vie était un film », confie-t-elle. Emplie de nostalgie, la photographe s’imprègne de ses souvenirs d’enfance pour constituer son univers visuel. Des ombres, ses ami·es aux visages imperceptibles, des couleurs d’un temps passé… Les clichés sont capturés au fil des voyages ensoleillés de l’artiste. À la croisée des arts, Manón Yanes s’inspire du cinéma et de la musique pour créer ses images. Alors que le cinéma lui permet de créer un film de souvenirs fixes, la musique la rend particulièrement créative. Ses photographies donnent envie de réaliser un grand plongeon dans une vie plus douce, loin du tumulte d’un quotidien maussade.
© Manón Yanes
Image d’ouverture : © Manón Yanes