Les coups de cœur #532 : Sébastien François et Matthieu Baranger

Les coups de cœur #532 : Sébastien François et Matthieu Baranger
© Sébastien François
Impression bleue d'un bâtiment se dédoublant
© Sébastien François

Sébastien François et Matthieu Baranger, nos coups de cœur de la semaine, ont fait de l’architecture urbaine la muse de leurs projets respectifs. Le premier s’intéresse aux constructions figées de la ville de Lodz, en Pologne, quand le second cherche les traces du temps dans différents bâtiments chargés d’histoire. 

Sébastien François

Des immeubles aux contours rectilignes se dessinent dans la pénombre. L’atmosphère n’est guère rassurante. Un brouillard flou semble se répandre sur la ville. Les routes se révèlent distordues, les bâtiments se dédoublent dans des nuances de bleus et de verts froids. Parfois, de grands arbres surgissent telles des ombres dans des ciels sanguins. Ces tirages expérimentaux, signés Sébastien François, dépeignent Lodz, qui prête d’ailleurs son nom à la série. « C’est la ville d’origine de ma mère, indique l’auteur. La moitié de ma famille y est toujours. J’ai eu l’habitude d’y passer mes étés. Ayant grandi en Belgique, ça m’a permis de voir autre chose que mon petit village. Surtout que la Pologne d’il y a quinze ans était bien différente d’aujourd’hui. » À l’issue de la Seconde Guerre mondiale, le pays a délaissé la région au profit des territoires détruits, qu’il fallait reconstruire. Celle-ci s’est alors figée dans le temps et a conservé une architecture qui se présente, pour le photographe, comme un terrain de jeu tout trouvé. « Le rapport à la matière est très présent dans mon travail. J’essaye d’incorporer des objets qui croisent mon regard. Il n’y a rien de plus amusant que de se perdre dans la composition, de ne pas être limité à un procédé très protocolaire, d’où le fait que j’aime tordre les images, les décaler, les colorer. Esthétiquement, ça me plaît et je prends du plaisir à me réapproprier le cadre, en quelque sorte. J’essaye d’y mettre ma personnalité au maximum », explique-t-il.

Arbres sur fond sanguin
© Sébastien François
Paysage urbain dans la pénombre
© Sébastien François
Arbre sans feuilles sur fonds orange
© Sébastien François
Double exposition d'un lampadaire
© Sébastien François
Extérieur d'un stade
© Matthieu Baranger

Matthieu Baranger

« Mon travail, majoritairement argentique, s’articule autour de la mémoire et de l’intime, dans des environnements souvent simples, mais chargés d’histoire. J’aime explorer les rapports entre le passé et le présent, entre ce qui persiste et ce qui s’efface », commence Matthieu Baranger. Tout naturellement, sa série Écho du passé s’inscrit donc dans ce sillage. Sur les clichés, des bâtiments se devinent dans des monochromes grenus, marqués par le contraste. Ensemble, ils racontent un monde évanescent, voué à sombrer dans l’oubli. « L’idée m’est venue presque par accident, d’une envie de revisiter des espaces empreints d’une mémoire forte, confie l’artiste. En Bulgarie, j’ai trouvé un vieil appareil photo et, comme à mon habitude, j’ai mis une pellicule dedans. Ce geste spontané a déclenché le projet. Je cherchais à retrouver une imagerie historique et une lumière propre à ces lieux. En développant les images, ce qui m’a frappé, c’est cette esthétique singulière : une fusion entre les sujets et le ciel, une impression d’effacement. À partir de là, une vision cohérente a émergé. » Malgré la sensation d’immobilité qui caractérise ces structures, ces dernières subissent les affres du temps. Avec leurs aléas techniques, les boîtiers utilisés ici cristallisent la fragilité du présent et permettent ainsi de constituer, selon les mots de l’auteur, « des archives vivantes » qui rendent compte de cette réalité de manière expérimentale.

Personne sur un marché en extérieur
© Matthieu Baranger
Façade d'un édifice
© Matthieu Baranger
Statue dans la ville
© Matthieu Baranger
Immeuble s'effaçant dans le ciel
© Matthieu Baranger
Vue d'un ensemble d'immeubles
© Matthieu Baranger
À lire aussi
Les coups de cœur #531 : Carmen Cabello et Yorgos Kapsalakis
© Carmen Cabello
Les coups de cœur #531 : Carmen Cabello et Yorgos Kapsalakis
Carmen Cabello et Yorgos Kapsalakis, nos coups de cœur de la semaine, nous entraînent dans deux balades visuelles et poétiques où il est…
10 février 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Les coups de cœur #530 : Léna Mezlef et Diane Desclaux
© Diane Desclaux
Les coups de cœur #530 : Léna Mezlef et Diane Desclaux
Léna Mezlef et Diane Desclaux, nos coups de cœur de la semaine, nous emmènent en voyage. La première nous fait découvrir l’Amérique…
03 février 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Explorez
Sous le soleil d'Italie avec Valentina Luraghi
Mediterraneo © Valentina Luraghi
Sous le soleil d’Italie avec Valentina Luraghi
À travers sa série Mediterraneo, Valentina Luraghi nous transporte dans ses souvenirs d’été. Le·la spectateur·ice y découvre le...
29 août 2025   •  
Écrit par Lucie Donzelot
La sélection Instagram #519 : évasion infinie
© Giorgia Pastorelli / Instagram
La sélection Instagram #519 : évasion infinie
Liberté. Ce mot résonne avec le clairon de l’été. Les artistes de notre sélection Instagram de la semaine célèbrent la douceur et le...
12 août 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
15 expositions photographiques à découvrir en août 2025
Jill, President Street, Brooklyn, New York, 1968 © Donna Gottschalk, Courtesy de l’artiste et de Marcelle Alix, Paris.
15 expositions photographiques à découvrir en août 2025
L’été est installé, et les vacances enfin arrivées. En parallèle des Rencontres d'Arles et pour occuper les journées chaleureuses ou les...
01 août 2025   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Les images de la semaine du 21 juillet 2025 : l’été des voyages et de la culture
© Clara Chichin et Sabatina Leccia / Lucie Pastureau
Les images de la semaine du 21 juillet 2025 : l’été des voyages et de la culture
Cette semaine, dans les pages de Fisheye, expositions et conseils de lectures estivales s’épanouissent. Car, qui dit vacances dit temps...
27 juillet 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Nicole Tung, ultime lauréate du Prix Carmignac !
Diverses espèces de requins, dont certaines sont menacées d'extinction, tandis que d'autres sont classées comme vulnérables, ont été ramenées à terre à l'aube par des pêcheurs commerciaux au port de Tanjung Luar, le lundi 9 juin 2025, à Lombok Est, en Indonésie. Tanjung Luar est l'un des plus grands marchés de requins en Indonésie et en Asie du Sud-Est, d'où les ailerons de requins sont exportés vers d'autres marchés asiatiques, principalement Hong Kong et la Chine, où les os sont utilisés dans des produits cosmétiques également vendus en Chine. La viande et la peau de requin sont consommées localement comme une importante source de protéines. Ces dernières années, face aux vives critiques suscitées par l'industrie non réglementée de la pêche au requin, le gouvernement indonésien a cherché à mettre en place des contrôles plus stricts sur la chasse commerciale des requins afin de trouver un équilibre entre les besoins des pêcheurs et la nécessité de protéger les populations de requins en déclin © Nicole Tung pour la Fondation Carmignac.
Nicole Tung, ultime lauréate du Prix Carmignac !
La lauréate de la 15e édition du Prix Carmignac vient d’être révélée : il s’agit de la photojournaliste Nicole Tung. Pendant neuf mois...
Il y a 10 heures   •  
Écrit par Lucie Donzelot
RongRong & inri : « L'appareil photo offre un regard objectif sur le sentiment amoureux »
Personal Letters, Beijing 2000 No.1 © RongRong & inri
RongRong & inri : « L’appareil photo offre un regard objectif sur le sentiment amoureux »
Le couple d’artiste sino‑japonais RongRong & inri, fondateur du centre d’art photographique Three Shadows, ouvert en 2007 à Beijing...
04 septembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Les expositions photo à ne pas manquer en 2025
Sein und werden Être et devenir. FREELENS HAMBURG PORTFOLIO REVIEWS © Simon Gerliner
Les expositions photo à ne pas manquer en 2025
Les expositions photographiques se comptent par dizaines, en France comme à l’étranger. Les artistes présentent autant d’écritures que de...
03 septembre 2025   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Les Femmes et la mer : mondes liquides
© Louise A. Depaume, Trouble / courtesy of the artist and festival Les Femmes et la mer
Les Femmes et la mer : mondes liquides
Cette année, le festival photographique du Guilvinec, dans le Finistère, prend un nouveau nom le temps de l'été : Les femmes et la mer....
03 septembre 2025   •  
Écrit par Milena III