Les ruines du communisme

24 août 2020   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Les ruines du communisme

Karol Pałka, artiste polonais, revient sur le passé communiste de son pays. Dans Edifice, il capture des bâtiments déserts, vestiges d’une ère aussi monumentale qu’oppressante.

Salles désertes, bâtiments en ruine, vestiges d’un passé grandiose… Les images de la série Edifice, de Karol Pałka nous emportent dans un passé proche – celui de l’ère communiste. Le photographe et réalisateur polonais a débuté son projet en 2016, en découvrant, par hasard, l’un de ces lieux emblématiques. « C’est ainsi qu’ont commencé mes recherches. Il était souvent difficile d’obtenir la permission de photographier certains endroits, car leurs propriétaires étaient inconnus. D’autres, abandonnés, étaient plus faciles d’accès », raconte l’auteur.

Né deux ans après la chute du communisme, Karol Pałka a grandi avec les souvenirs de ses parents. Ceux d’une ère glaçante, marquée par un parti dominant, oppressant. « Ces images, oscillant entre fiction et réalité, illustrent mon désir d’explorer l’histoire de mon pays. Car on ne peut la comprendre qu’en étudiant soigneusement son passé », explique-t-il.

© Karol Pałka

Une utopie créée de toute pièce

Vidés de toute trace d’humanité, les clichés évoquent un temps révolu. Au cœur de ces architectures fragiles, cependant, apparaissent les traces d’une utopie créée de toute pièce par le parti soviétique. Du Polana Hotel – un complexe vacancier détenu par les membres du parti communiste de Tchécoslovaquie – au bureau de Nowa Huta Steelworks, visité autrefois par Nikita Khrouchtchev et Fidel Castro – les édifices capturés par le photographe symbolisent la puissance du régime. « L’architecture était alors devenue un outil de surveillance utilisé par l’État, explique-t-il. Si certains Polonais estiment que ces bâtiments devraient être détruits, je pense qu’ils font partie de notre passé. Notre mémoire ne les oubliera pas pour autant. »

Métaphorique, la série examine la notion de persistance. Le pouvoir est-il immortel ? Quelle est son emprise sur nous ? Si les constructions survivent dans le temps, leur beauté disparaît, laissant place à une certaine décadence – à l’image des débordements politiques du 20e siècle. « Certains se souviennent très bien de cette époque, d’autres n’y songent jamais. Il s’agit d’une sorte d’amnésie nationale. D’une manière de se ranger du côté des plus faibles, et des oubliés. C’est une manifestation d’un traumatisme et d’un désir de rébellion », conclut Karol Pałka. Une collection d’images aux profondes ramifications.

© Karol Pałka© Karol Pałka

© Karol Pałka

© Karol Pałka© Karol Pałka

© Karol Pałka

© Karol Pałka© Karol Pałka

© Karol Pałka

© Karol Pałka

Explorez
Karim Kal : paysages nocturnes de la Haute Kabylie
© Karim Kal
Karim Kal : paysages nocturnes de la Haute Kabylie
Le photographe franco-algérien Karim Kal a remporté le prix HCB 2023 pour son projet Haute Kabylie. Son exposition Mons Ferratus sera...
20 février 2025   •  
Écrit par Costanza Spina
On Mass Hysteria : étude d'une résistance physique contre l'oppression
CASE PIECE #1 CHALCO, (Case 1, Mexico, On Mass Hysteria), 2023, Courtesy Galerie Les filles du calvaire, Paris © Laia Abril
On Mass Hysteria : étude d’une résistance physique contre l’oppression
À travers l’exposition On Mass Hysteria - Une histoire de la misogynie, présentée au Bal jusqu’au 18 mai 2025, l’artiste catalane...
19 février 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Tisser des liens, capter des mondes : le regard de Noémie de Bellaigue
© Noémie de Bellaigue
Tisser des liens, capter des mondes : le regard de Noémie de Bellaigue
Photographe et journaliste, Noémie de Bellaigue capture des récits intimes à travers ses images, tissant des liens avec celles et ceux...
15 février 2025   •  
Écrit par Costanza Spina
Faits divers : savoir mener l’enquête
© Claude Closky, Soucoupe volante, rue Pierre Dupont (6), 1996.
Faits divers : savoir mener l’enquête
Au Mac Val, à Vitry-sur-Seine (94), l’exposition collective Faits divers – Une hypothèse en 26 lettres, 5 équations et aucune réponse...
13 février 2025   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Wes Anderson à la Cinémathèque : quand le cinéma devient photographie
Kara Hayward dans Moonrise Kingdom (2012), image tirée du film © DR
Wes Anderson à la Cinémathèque : quand le cinéma devient photographie
L'univers de Wes Anderson s'apparente à une galerie d'images où chaque plan pourrait figurer dans une exposition. Cela tombe à pic : du...
22 février 2025   •  
Écrit par Cassandre Thomas
A Lost Place : Aletheia Casey évoque le traumatisme des feux australiens
© Aletheia Casey
A Lost Place : Aletheia Casey évoque le traumatisme des feux australiens
À travers A Lost Place, Aletheia Casey matérialise des souvenirs traumatiques avec émotion. Résultant de cinq années de travail...
21 février 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Javier Ruiz au rythme de Chungking
© Javier Ruiz
Javier Ruiz au rythme de Chungking
Avec sa série Hong Kong, Javier Ruiz dresse le portrait d’une ville faite d’oxymores. Naviguant à travers le Chungking Mansions et les...
21 février 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Karim Kal : paysages nocturnes de la Haute Kabylie
© Karim Kal
Karim Kal : paysages nocturnes de la Haute Kabylie
Le photographe franco-algérien Karim Kal a remporté le prix HCB 2023 pour son projet Haute Kabylie. Son exposition Mons Ferratus sera...
20 février 2025   •  
Écrit par Costanza Spina