Fondée il y a 10 ans, l’agence Myop réunit des photographes auteurs qui portent sur le monde un regard posé. Pauline Bernard a intégré Myop en tant qu’assistante en 2009. Pour elle, la photo n’était pas une évidence. C’est presque le hasard qui l’a amené à exercer le métier de photographe il y a quelques années. Elle est venue nous voir à la rédaction pour évoquer ce que cela implique d’être une jeune photographe au sein d’un collectif.
FISHEYE: Tu as suivi des études de photo ?
Pauline: Pas du tout, j’ai étudié les lettres puis la philo, c’était très abstrait. Je suis partie habiter à Séville et j’ai effectué un stage de photo. Je n’en avais jamais fait et j’ai du produire un sujet sur le thème “aller vers les autres” dans un quartier populaire. J’ai réalisé une série sur les héroïnomanes, c’était très intimidant. Les photos ont été sélectionnées pour un festival de jeunes talents en Pologne et je me suis dit: “devenir photographe, pourquoi pas?”. Je suis restée en un an de plus à Séville pour faire du terrain; mon truc, c’est la photo sociale.
Ensuite tu t’es rendue au Brésil …
En Espagne, je suis devenue amie avec des brésiliens et je les ai suivis dans leur pays. Pendant deux ans, j’ai mené un projet social dans les favelas et des ateliers solidaires autour de la photo. On a fini par obtenir des subventions de l’État. Ça m’a permis de faire mes armes.
Qu’est-ce qui t’a poussé à intégrer un collectif ?
Je ne sortais pas d’une école, je ne connaissais personne dans le monde de la photo en France alors j’ai décidé de frapper aux portes des collectifs. Chez Myop, c’est Guillaume Binet, son co-fondateur, qui m’a ouvert. Je lui ai parlé de mon parcours et lui ai montré mes photos: on s’est bien entendus. Il m’a proposé de devenir son assistante. Pendant trois ans, Myop a été mon école. J’ai appris à construire une narration, à éditer mes photos… J’étais fascinée de découvrir le milieu de la photo sous toutes ses facettes.
Qu’est-ce que Myop t’apporte dans ton travail?
J’ai appris à former mon regard. Aujourd’hui, Myop est ma famille. Je suis capable de reconnaitre la patte de chacun des membres. C’est une vraie ruche: les 15 photographes sont tous différents et proposent tous une approche différente de la photo. C’est très intéressant de voir comment chacun vit son métier.
Chez Myop, tu es “photographe diffusée”: qu’est-ce que cela signifie ?
Contrairement aux photographes membres, je n’ai pas un pouvoir de décision sur la structure. Mon travail est simplement diffusé. Myop n’a pas les yeux plus gros que le ventre et ne cherche pas à avoir toujours plus de photographes membres. Ce qui compte c’est la qualité. Nous sommes donc quatre photographes diffusés et je suis la seule à travailler en France.
Penses-tu qu’il y a une différence entre ta manière de travailler et celle des photographes des générations précédentes ?
L’écriture n’est pas une question de génération. Une école m’aurait formaté, moi je viens du moule Myop. Avec des bouts de ficelle, cette petite structure fait un travail d’orfèvre. Il y a une vraie stimulation et de nombreux échanges au sein de l’agence. J’admire tous ces très bons photographes. Ils ont beaucoup d’humour et sont de très bon conseil.
Quels sont tes projets en cours ?
Au Brésil, j’avais mené un projet d’éducation populaire alors j’ai décidé de continuer en France. J’organise des ateliers photos: c’est important dans ce métier de produire et transmettre. Et je continue à faire de la photo sociale. L’humain est au coeur de mon approche photographique et je me nourris des histoires que me racontent les photographes de Myop pour évoluer constamment.
Propos recueillis par Hélène Rocco
En (sa)voir plus
→ Le site du collectif Myop
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