Jusqu’au 12 janvier 2026, le musée des arts asiatiques – Guimet accueille une collection foisonnant de polaroids, issue de l’œuvre du photographe japonais Nobuyoshi Araki. Fruit d’une donation de Stéphane André à l’institut parisien, cette exposition du nom de Polaraki, dévoile autant l’univers expérimental de l’artiste que la réappropriation de son travail par le collectionneur.
Stéphane André n’est pas un collectionneur comme les autres. Pendant près de vingt-cinq ans, il a accumulé, sur les murs de son appartement parisien, une collection prolifique de polaroids signés Araki, photographe japonais connu pour son obsession pour les fleurs, le sexe et la mort. En mai 2025, il fait le don de pas loin de mille photographies au musée Guimet, qui les révèle aujourd’hui au public dans l’exposition Polaraki, visible jusqu’au 12 janvier 2026. « “Polaraki” est un mot-valise, précise le collectionneur. C’est l’essence même du désir de joindre le commencement et la fin, fil rouge de cette exposition. » Présentés dans la rotonde de l’institut, à l’image de l’appartement de Stéphane André, les polaroids d’Araki entraînent les spectateur·ices (de plus de 18 ans) dans des pérégrinations pointilleuses. On s’accroupit, on s’approche, on s’éloigne, on plisse les yeux à la vue de quelques clichés à caractère sexuel, on s’émerveille devant des œufs et des poissons, on s’interroge sur les interprétations des fleurs. « Le polaroid est une image qui tient dans la main, elle reflète la réalité du monde tel qui s’offre à nous. C’est quelque chose de magique. Il y a une véritable consistance émotive au travail d’Araki », confie Stéphane André.
Recomposer une œuvre
Les images disposées dans des cadres blancs se déploient seules, en diptyques ou en triptyques. Si la moitié des compositions est l’œuvre directe d’Araki, l’autre moitié a été réalisée par les soins de Stéphane André. « L’objet du polaroid permet de créer des associations, remarque le donateur. Araki, quand il rentrait de sa journée, les dispersait sur le lit et les mettait en rapport. Il y a une teneur poétique liée au rapprochement, un rythme, une rime, un leitmotiv, un flux métaphorique dans le regroupement de ces photos. » Un flux que s’approprie le collectionneur qui, dans l’exposition, fait particulièrement attention à la volonté de certains modèles féminins du photographe japonais ne souhaitant plus être exhibés. « Il y a des cadres vides sur les cimaises. Ils sont la traduction d’un retrait volontaire des images pourtant présentes dans l’appartement de Stéphane André, par respect pour les modèles d’Araki », explique Édouard de Saint-Ours, conservateur des collections photographiques du musée Guimet et co-commissaire de Polaraki. Le parcours se termine sur un positif emprisonné dans une résine qui interroge la reproductibilité de la photographie, en écho à l’unicité du polaroid.