Port Talbot : la ville galloise qui fascinait les extraterrestres

02 septembre 2023   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Port Talbot : la ville galloise qui fascinait les extraterrestres
© Roo Lewis
© Roo Lewis
© Roo Lewis

Dans Port Talbot UFO Investigation Club, Roo Lewis part à la découverte d’une petite ville galloise, berceau de nombreuses apparitions d’ovnis. Un conte aux frontières du fantastique faisant le portrait touchant de toute une communauté.

Au sud du Pays de Galles se dresse Port Talbot, une petite ville industrielle, dont les aciéries – ancienne industrie florissante – dominent le paysage. Autrefois traversée par de nombreux·ses commerçant·es, l’autoroute construite dans les années 1960 permet désormais aux passant·es de contourner le territoire, figeant ces structures de métal dans un passé plus fructueux. Aujourd’hui considérablement polluée, Port Talbot a néanmoins donné naissance à de nombreux scientifiques, musicien·nes, sportif·ves et acteurices – parmi elleux, Anthony Hopkins et Michael Sheen, qui revendiquent par ailleurs un nombre conséquent d’apparitions d’ovnis dans la région…
« Mon grand-père était gallois, et on passait par cette ville en allant le voir. Nous collions notre nez, mon frère et moi, à la fenêtre lorsqu’on passait devant les aciéries. Elles nous évoquaient des stations spatiales. Nous n’avions pas les moyens de partir en vacances à l’étranger, et nos liens avec le pays étaient puissants. J’ai mis très longtemps avant d’y remettre les pieds : je réalisais un projet photo non loin de Port Talbot et j’ai décidé d’y dormir par pure curiosité. La nuit, ma chambre d’hôtel était illuminée par des nuances orange, un phénomène nocturne dû à l’embrasement des hauts-fourneaux. C’était fou, je me suis dit qu’il fallait que j’y retourne », se souvient Roo Lewis. Installé à Londres, le photographe développe, à travers son travail, des séries explorant les notions d’identité, d’espoir et de foi. Privilégiant une approche narrative, il raconte, à l’aide d’images sensibles, des histoires aussi étranges que passionnantes. Bercé par ses souvenirs d’enfance et intrigué par les rumeurs de visites extraterrestres, il photographie Port Talbot durant deux ans et construit Port Talbot UFO Investigation Club, un projet nimbé de tons chauds – écho aux lumières qui avaient, ce soir-là, éclairé son hôtel – dont le point de départ surnaturel devient un prétexte à la rencontre, à l’exploration de la ville.

Un besoin intense de connexion

« J’ai toujours été attiré par les communautés en marge. Je pense qu’il faut un certain courage pour être capable d’assumer ses croyances, quelles qu’elles soient. On s’ouvre au jugement, et même à la moquerie de l’autre », confie Roo Lewis. Après avoir tourné son objectif vers les druides, ou encore les sosies d’Elvis Presley, l’auteur bifurque alors vers les aliens. Sans jamais chercher à mener l’enquête ni à découvrir une quelconque vérité, il s’immerge dans le quotidien du lieu, parle à ses habitant·es, pour mieux illustrer leur singularité. « Les humain·es sont des créatures incroyables et complexes, ce sont des instruments émotifs qui ont évolué pour devenir des conteur·ses. Le folklore, lui, est à la fois fantastique et nécessaire. Quel meilleur moyen de s’assurer que nos valeurs sont transmises à nos enfants qu’en les imbriquant dans de belles histoires ? », poursuit le photographe. Loin de chercher à capturer l’apparition de petits hommes verts, c’est finalement le besoin intense de connexion, l’héritage se transmettant d’une génération à l’autre qui l’intéresse.
Au cœur de Port Talbot UFO Investigation Club, c’est un monde entier qui fait surface. Un écosystème fait de paysages magnifiques, de panoramas urbains et de personnages atypiques. En son sein, des théories du complot et des déambulations contemplatives se croisent et s’apprivoisent pour nous parler d’une communauté unie par des liens historiques et surnaturels. Un conte dont la morale se fait nébuleuse – évoluant en fonction de celle ou celui qui le lit. « J’aime que les gens découvrent le projet et s’en fassent leur propre idée. J’ai récemment discuté avec un écrivain qui avait l’impression que j’adoptais le point de vue d’un alien regardant la ville… Je n’y avais, jusque-là, jamais songé », confie Roo Lewis. Discrète invasion, portrait touchant d’une région, ou célébration d’un groupe soudé, l’ouvrage de l’artiste nous invite à reconsidérer notre manière d’observer, de nous interroger. Une plongée dans un espace bercé par le fantastique dont on ne peut qu’admirer la richesse et la beauté.

© Roo Lewis

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© Roo Lewis
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