RongRong & inri : « L’appareil photo offre un regard objectif sur le sentiment amoureux »

04 septembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
RongRong & inri : « L'appareil photo offre un regard objectif sur le sentiment amoureux »
Personal Letters, Beijing 2000 No.1 © RongRong & inri
RongRong
Photographe
« Je crois profondément qu’on est le reflet de ce qu’on exprime. Et ses photos représentent bien le genre de personne qu’était inri. »

Le couple d’artistes sino‑japonais RongRong & inri, fondateur du centre d’art photographique Three Shadows, ouvert en 2007 à Beijing, et porteur de Jimei × Arles, place sa relation intime et son environnement au cœur de ses images. Tous·tes deux reviennent sur leur histoire d’amour et racontent comment la photographie est le liant et le langage de cette union. Le duo présentera une de ses œuvres à l’exposition En plein cœur : un siècle d’amour sans filtre portée par Guerlain, du 22 octobre au 16 novembre.

Fisheye : Quel est le récit de votre rencontre ?

RongRong : En 1999, je participais à une exposition à Tokyo. C’est ici que nous avons fait connaissance pour la première fois. inri n’était qu’une visiteuse parmi d’autres, mais plus tard, j’ai appris qu’elle était aussi photographe. J’ai voulu voir son travail. Nous avons donc pris rendez‑vous dans un café pour qu’elle me montre ses photos. En les découvrant, j’ai senti au fond de moi qu’elle serait la femme de ma vie. Je crois profondément qu’on est le reflet de ce qu’on exprime. Et ses photos représentent bien le genre de personne qu’était inri.

inri : À cette époque, j’étais très introvertie. Je n’étais pas douée pour parler aux gens ou nouer des liens. Mais lorsque j’ai visité l’exposition de RongRong, j’ai été impressionnée et touchée, car je pouvais m’identifier à son œuvre.

Au début, vous avez vécu votre histoire à distance. Quel rôle a joué la photographie dans cette relation naissante ?

RongRong : La photographie est plus forte que le langage. Nous ne parlions pas la même langue, alors elle s’est imposée comme notre outil de communication. Après être rentré à Beijing, j’ai essayé de rester en contact avec inri. C’est la photographie qui m’a donné le courage de le faire.

inri : Après notre première rencontre, RongRong a tenté par tous les moyens de garder le contact. Il m’envoyait des lettres, des courriels ou m’appelait. Cependant, j’étais le genre de personne qui ne répondait jamais au téléphone ou qui vérifiait très rarement ses e‑mails. Il a persisté, et cela m’a beaucoup touchée. Après neuf mois de correspondance, nous avions très envie de nous revoir, alors je suis partie pour Beijing.

deux personnes nues allongées sur un futon
Liulitun, Beijing 2002 No.13 © RongRong & inri
inri
Photographe
« Ce n’est ni mon travail ni celui de RongRong, mais comme un troisième œil qui nous permet de mettre en lumière les questions liées à notre existence et à ce qui nous tient à cœur.  »
Couverture du magazine Fisheye n°73 amour
136 pages
7,50 €

La série Personal Letters n’évoque‑t‑elle pas cet échange épistolaire initiateur ?

inri : Personal Letters a été créée au début des années 2000. Les neuf premiers mois de notre idylle, nous échangions notamment des courriers accompagnés de photographies que nous n’avons pas publiées à ce jour. Peut‑être le ferons‑nous plus tard ?

Comment vos pratiques photographiques respectives se sont‑elles jointes ?

inri : Nous avons chacun nos caractéristiques propres. Mais
ensemble, nous avons inventé une expression visuelle et photographique commune qui mêle nos styles et nos langages. Ce n’est ni mon travail ni celui de RongRong, mais comme un troisième œil qui nous permet de mettre en lumière les questions liées à notre existence et à ce qui nous tient à cœur. Nous partageons cette vision que seule la photographie peut révéler.

RongRong : Lorsque nous avons commencé à photographier de concert nous voulions avant tout exprimer nos perceptions. En 2000, nous avons fait un voyage – nous avons notamment visité la Grande Muraille de Chine – qui a façonné notre pratique commune. À ce moment‑là, nous avons décidé que si l’un de nous captait un paysage, l’autre ne le ferait pas. La première étape de notre collaboration a été de nous retrouver ensemble devant l’objectif et non derrière. Nous avons libéré nos mains et laissé l’appareil photo être notre troisième œil pour nous découvrir tous les deux. Pour la première fois, RongRong & inri est apparu.

Cet article est à retrouver dans son intégralité dans Fisheye #73 en kiosque ce vendredi.

À lire aussi
SWPA 2016 : RongRong & inri à l'honneur
SWPA 2016 : RongRong & inri à l’honneur
La plus grande compétition photographique au monde récompensera le couple de photographes RongRong et Inri le 21 avril prochain. Ils…
10 février 2016   •  
Écrit par Fisheye Magazine
« Love Songs » à la MEP : offrez-vous une ballade dans l’intimité des photographes
© Nan Goldin
« Love Songs » à la MEP : offrez-vous une ballade dans l’intimité des photographes
À la MEP, jusqu’au 21 août, les plus grands photographes des 20e et 21e siècles nous chantent l’amour…
31 mars 2022   •  
Écrit par Anaïs Viand
Fisheye #73 : vivre d'Amour et d'images
© Jenny Bewer
Fisheye #73 : vivre d’Amour et d’images
Dans son numéro #73, Fisheye sonde les représentations photographiques de l’amour à l’heure de la marchandisation de l’intime. À…
05 septembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Explorez
Faire de la lenteur une attention : Ils en avaient 16 de Léo d'Oriano
© Léo d'Oriano
Faire de la lenteur une attention : Ils en avaient 16 de Léo d’Oriano
Dans le cadre de la Grande commande pour le photojournalisme de la BNF, Léo d’Oriano a suivi, entre 2021 et 2022. Intitulée Ils en...
Il y a 8 heures   •  
Écrit par Fabrice Laroche
Charlotte Abramow sort une édition augmentée de Maurice, Tristesse et rigolade
© Charlotte Abramow
Charlotte Abramow sort une édition augmentée de Maurice, Tristesse et rigolade
Sept ans après la sortie de Maurice, Tristesse et rigolade, Charlotte Abramow s’apprête à en publier un volume augmenté, toujours aux...
23 septembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Les images de la semaine du 15 septembre 2025 : intimité réinventée
© João Mendes / Instagram
Les images de la semaine du 15 septembre 2025 : intimité réinventée
C’est l’heure du récap ! Questionnements existentiels, identité, archives étrangères ou personnelles… Cette semaine, l’intimité se trouve...
21 septembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
La sélection Instagram #524 : espaces intimes
© Sara Lepore / Instagram
La sélection Instagram #524 : espaces intimes
La maison se fait à la fois abri du monde et porte vers le dehors, espace de l’intime et miroir de nos modes de vie. Les artistes de...
16 septembre 2025   •  
Écrit par Lucie Donzelot
Nos derniers articles
Voir tous les articles
L'engagement écologique et la photographie : la séance de rattrapage Focus
© Sophie Alyz
L’engagement écologique et la photographie : la séance de rattrapage Focus
Les photographes des épisodes de Focus sélectionnés ici s’emparent de leur médium pour raconter des récits d’engagement environnemental....
Il y a 4 heures   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Faire de la lenteur une attention : Ils en avaient 16 de Léo d'Oriano
© Léo d'Oriano
Faire de la lenteur une attention : Ils en avaient 16 de Léo d’Oriano
Dans le cadre de la Grande commande pour le photojournalisme de la BNF, Léo d’Oriano a suivi, entre 2021 et 2022. Intitulée Ils en...
Il y a 8 heures   •  
Écrit par Fabrice Laroche
Zone i 2025 : faire vivre les images au temps présent
© Martin Bogren
Zone i 2025 : faire vivre les images au temps présent
La 7e édition des Rencontres Image & Environnement de Zone i a eu lieu du 12 au 14 septembre 2025 à Thoré-la-Rochette, dans le...
24 septembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Contenu sensible
Marvin Bonheur et Sofiya Loriashvili rejoignent la collection SUB de Fisheye Éditions !
Only you and me © Sofiya Loriashvili
Marvin Bonheur et Sofiya Loriashvili rejoignent la collection SUB de Fisheye Éditions !
Forte de son nom faisant à la fois référence à la subculture, la subversion et au mot « suburb » ("banlieue" en anglais), la collection...
24 septembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger