Song Blues par Ella Bats : positives vibrations

03 août 2023   •  
Écrit par Milena Ill
Song Blues par Ella Bats : positives vibrations
© Ella Bats
© Ella Bats
© Ella Bats

Dans ­l’obscurité­ de ­la ­nuit,­ un ­être ­danse.­ La­ puissance­ de­ son­ élan,­ son ­infime tremblement­ et­ son souffle­ habillent­ la ­profondeur­ de ­l’espace.­ Tout­ cela,­ Ella Bats ­le ­capture­ en ­une ­formidable chorégraphie­ photographique.­ « Avec Song­ Blues, j’ai voulu parler du corps qui s’exprime lui-même sans langage », confie-t-elle.­ Après­ l’explosion­ de­ couleurs­ de­ ses­ premiers­ travaux,­ sa­ nouvelle­ série explore­ la­ luminescence­ des­ choses.­ L’artiste­ emploie­ ici­ des­ tonalités­ sombres,­ doucement­ satinées.­ « J’ai désiré travailler sur ces zones de chaleur qui circulent à l’intérieur de soi. Explorer la matière vivante et vibrante du corps », ­explique-t-elle.­ Avec la ­peinture­ et ­le­ maquillage­ phosphorescent­ qui­ parcourent ­la­ peau­ du modèle,­ son­ œuvre­ graphique­ – avec ses ­liés­ et­ déliés,­ ses­ pleins­ et­ ses­ vides contradictoires­ redessine ­les­ frontières­ entre ­l’intérieur­ et­ le­ hors­ de­ soi.­

Diplômée­ de ­Gobelins ­Paris­ et­ des­ Arts­ appliqués,­ Ella­ Bats,­ la­ trentaine, se définit­ comme photographe. « Je tiens cependant à dire que j’ai une nouvelle vision du médium, que j’explore de façon détournée grâce à ma formation en peinture », déclare-t-elle.­ Cette­ passionnée­ de ­musique­ et ­de graphisme« en perpétuelle recherche de rythme entre les sens, les formes, les nuances et les lignes sinueuses »,­ s’oriente­ au­ fil­ du­ temps­ vers­ l’abstraction. ­Sa ­matière­ première,­ ce­ sont­ les­ corps,­ leurs vibrations­ et­ leurs­ ondes­ qui­ font­ rayonner lumière­ et­ couleurs.­ Les­ formes­ qu’elle­ sonde­ et­ retouche numériquement­ –­ par superposition,­ multiplication­ et ­fusion­ – ­deviennent ­les ­métaphores­ visuelles­ de la­ libération­ de­ soi.­ Inspirée­ par­ des­ légendes­ de­ la ­danse contemporaine­ telles­ que Pina ­Bausch­ ou Ohad­ Naharin,­ la­ jeune­ autrice­ laisse son modèle « vibrer de lui-même librement », et ­s’abandonne­ elle-même­ à ­une ­sorte ­de ­méditation­ par la création.

Ella ­Bats­ inspecte l’invisible­ et ­le ­symbolique­ – ­la­ lumière­ et ­les ténèbres à ­l’intérieur­ de ­nous, l’émanation de nos émotions et de nos sentiments. Si pour sa série précédente Adam & Adam, la référence­ biblique ­était­ évidente, ­le blues­ ici­ mis­ en ­scène­ n’en­ est­ pas­ moins­ empreint­ de­ mysticisme­ et­ de spiritualité.­ Pouvez-vous sentir­ le ­feu­ et­ la­ marée,­ la ­roche ­et­ la­ forêt,­ le ­vent ­et le sable­ danser­ en nous-mêmes ­?­ Song Blues­ nous­ rappelle­ combien­ nous­ sommes­ proches­ de ­la­ guerre­ et­ de ­la­ paix, que les­ éléments­ se ­livrent ­bataille­ depuis­ des millénaires,­ et­ que ­tout­ cela­ nous­ l’éprouvons­ dans notre corps.­ 

© Ella Bats
© Ella Bats

En 2021, un article sur les premières séries d’Ella Bats paraissait dans Fisheye n°49. « Voir quelqu’un poser des mots sur mon travail rendait mes projets plus réels », ­confie-t elle.­ Depuis, elle­ a multiplié­ sa­ présence­ aux­ festivals ­(MAP ­et­ Hyères),­ aux­ salons­ de mode­ (Tranoï­ Women­ March),­ et­ a­ exposé­ dans­ des­ espaces­comme­ la­ Samaritaine. Parfois­ conçues­ dans ­des­ formats géants, ses ­images ­sont ­pensées­ dans­ l’espace­ et dans ­leur­ porosité ­avec les­ autres­ médiums, comme ­la­ peinture­ ou ­le­ design.­ Son dernier solo show­ est­ présenté­ à­ la­ Ellia­ Art­ Gallery,­ à ­Paris (jusqu’au­ 30 août),­ et­ la ­jeune artiste ­prépare ­également­ une ­nouvelle­ série inspirée­ par­ le­ paysage­ et­ la­ corporalité,­ en­ duo­ avec ­la­photographe­ Alice­ Tremblot.­

© Ella Bats
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