À PhotoSaintGermain, Tshepiso Mazibuko et Sibusiso Bheka racontent Thokoza

12 novembre 2024   •  
Écrit par Costanza Spina
À PhotoSaintGermain, Tshepiso Mazibuko et Sibusiso Bheka racontent Thokoza
© Sibusiso Bheka
© Tshepiso Mazibuko

© Sibusiso Bheka

L’exposition Ubusukunemini (Day and Night), présentée dans le cadre du festival PhotoSaintGermain, fait dialoguer les travaux des photographes sud-africain·es, Tshepiso Mazibuko et Sibusiso Bheka, au regard de l’actualité. Les artistes bénéficient du programme artistique et social mené par Rubis Mécénat à Johannesburg à l’occasion des 30 ans (1994-2024) de la démocratie.

Les photographes Tshepiso Mazibuko et Sibusiso Bheka font partie de la génération dite « born free » (née libre), désignant la génération noire née après les premières élections démocratiques non-raciales en 1994, qui n’a jamais connu l’apartheid. Bénéficiaires du programme Of Soul and Joy depuis 2012, iels mènent une réflexion sur l’actualité de l’Afrique du Sud et sur la tentative de bâtir une société plus égalitaire. Ubusukunemini (Day and Night) est une invitation de Tshepiso Mazibuko adressée à Sibusiso Bheka pour tisser ensemble une vision du township ghetto noir à la périphérie des grandes villes d’Afrique du Sud pendant l’apartheid de Thokoza (Johannesbourg) aujourd’hui. Les deux ont fait l’expérience d’être des « born free » et s’interrogent sur la signification même de cette désignation. Par leurs œuvres, iels tirent un portrait intimiste de la communauté du township en sillonnant son présent, son histoire et sa mémoire.

Entre espoir et désillusion

« Tshepiso Mazibuko et Sibusiso Bheka sont les sismographes sensibles du pouls de la jeune démocratie sud-africaine. À trente ans – entre espoir et désillusion – toustes deux questionnent en profondeur la signification même de born free » écrit Jabulani Dhlamini, photographe sud-africain et chef de projet d’Of Soul and Joy. Ensemble, iel racontent la mémoire de Thokoza, situé dans la région du Gauteng en Afrique du Sud, un lieu qui possède une histoire riche et complexe qui s’étend sur plus de six décennies.

Fondé en 1955, Thokoza a été le premier township noir du sud de Johannesburg, créé pour accueillir la population noire d’Alberton déplacée de force pour faire place à l’exploitation des mines d’or par les colons. En zoulou, « thokoza » veut dire « lieu de paix », une appellation qui apparaît contradictoire lorsqu’on connaît le vécu de cet ancien ghetto noir. « L’histoire de Thokoza est complexe et protéiforme, marquée à la fois par la lutte et la résilience, explique Jabulani Dhlamini. Malgré les défis auxquels il a été confronté, le township demeure une communauté dynamique et prospère, qui témoigne du pouvoir de l’espoir et de la volonté. » Dans leur travail, les deux photographes racontent le sentiment contradictoire qu’iels ressentent et le regard critique qu’iels posent sur les récits d’émancipation. Deux sensibilités racontent le même lieu, à travers des couleurs contrastées, nous convoquant la nuit comme le jour. C’est un espace de poésie comme d’hallucination. Avec une poignante ironie, les « born free » semblent vivre dans un immobilisme urbain d’avant, qui suggère un temps jamais vraiment révolu. Né·es libres, mais toujours coincé·es dans la contrainte d’un urbanisme du passé. La promiscuité, la violence, l’inégalité persistante, les remplit d’une désillusion venue remplacer l’espoir de leur génération.

© Sibusiso Bheka
© Tshepiso Mazibuko

© Sibusiso Bheka
© Tshepiso Mazibuko
À lire aussi
À Arles, Tshepiso Mazibuko dévoile et panse les blessures des born-free
© Tshepiso Mazibuko. Pink Hair, Phola Park, Thokoza 2017-2018, série Ho tshepa ntshepedi ya bontshepe. Avec l’aimable autorisation de l’artiste.
À Arles, Tshepiso Mazibuko dévoile et panse les blessures des born-free
Lauréate du Prix Madame Figaro – Arles et du Prix du Public Découverte 2024 de la Fondation Louis Roederer, Tshepiso Mazibuko capture…
19 août 2024   •  
Écrit par Marie Baranger
« À Daleside, personne n’a jamais vu un blanc et un noir travailler ensemble »
« À Daleside, personne n’a jamais vu un blanc et un noir travailler ensemble »
Entre 2015 et 2020, le photographe Cyprien Clément-Delmas et Lindokuhle Sobekwa, ancien élève du programme socioculturel Of Sould and Joy…
13 janvier 2021   •  
Écrit par Lou Tsatsas

Explorez
5 événements photo à découvrir ce week-end
© Sandra Eleta
5 événements photo à découvrir ce week-end
Ça y est, le week-end est là. Si vous prévoyez une sortie culturelle, mais ne savez pas encore où aller, voici cinq événements...
Il y a 4 heures   •  
Écrit par Fisheye Magazine
La Galerie Carole Lambert réenchante l'œuvre de Manuel Álvarez Bravo
Petit cheval de Quito © Archivo Manuel Álvarez Bravo
La Galerie Carole Lambert réenchante l’œuvre de Manuel Álvarez Bravo
Jusqu'au 18 décembre 2025, la Galerie Carole Lambert devient l’écueil des 40 tirages d’exception du photographe mexicain Manuel Álvarez...
21 novembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Emilio Azevedo : En ligne de mire
Rondônia (Comment je suis tombé amoureux d’une ligne), 2023 © Emilio Azevedo
Emilio Azevedo : En ligne de mire
Présentée dans le cadre du festival PhotoSaintGermain et au musée du Quai Branly, l'exposition Rondônia. Comment je suis tombé amoureux...
20 novembre 2025   •  
Écrit par Milena III
À la MEP, Tyler Mitchell joue avec les codes du portrait formel
The root of all that lives, 2020 © Tyler Mitchell. Courtesy de l'artiste et de la Galerie Gagosian
À la MEP, Tyler Mitchell joue avec les codes du portrait formel
Jusqu’au 25 janvier 2026, la Maison européenne de la photographie présente la première exposition personnelle de Tyler Mitchell en...
19 novembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Nos derniers articles
Voir tous les articles
5 événements photo à découvrir ce week-end
© Sandra Eleta
5 événements photo à découvrir ce week-end
Ça y est, le week-end est là. Si vous prévoyez une sortie culturelle, mais ne savez pas encore où aller, voici cinq événements...
Il y a 4 heures   •  
Écrit par Fisheye Magazine
La Galerie Carole Lambert réenchante l'œuvre de Manuel Álvarez Bravo
Petit cheval de Quito © Archivo Manuel Álvarez Bravo
La Galerie Carole Lambert réenchante l’œuvre de Manuel Álvarez Bravo
Jusqu'au 18 décembre 2025, la Galerie Carole Lambert devient l’écueil des 40 tirages d’exception du photographe mexicain Manuel Álvarez...
21 novembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Les secrets des météorites dévoilés par Emilia Martin
I saw a tree bearing stones in place of apples and pears © Emilia Martin
Les secrets des météorites dévoilés par Emilia Martin
Dans son livre I Saw a Tree Bearing Stones in the Place of Apples and Pears, publié chez Yogurt Editions, Emilia Martin s’intéresse au...
21 novembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Jonathan Bertin : l'impressionnisme au-delà des frontières
Silhouette urbaine, Séoul Impressionism © Jonathan Bertin
Jonathan Bertin : l’impressionnisme au-delà des frontières
Jusqu’au 20 décembre 2025, Jonathan Bertin présente, à la Galerie Porte B, un dialogue délicat entre sa Normandie natale et Séoul, ville...
20 novembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger