« The star geezers » : à la belle étoile

12 mars 2020   •  
Écrit par Lou Tsatsas
« The star geezers » : à la belle étoile

Pour réaliser The star geezers, le photographe Jesse Rieser est parti à la rencontre d’une communauté de retraités passionnée par l’astronomie. Une série futuriste, prenant racine dans la culture américaine et la science-fiction.

« La première expérience dans une chambre noire a quelque chose de magique – comme si la science, l’art et un certain mysticisme se réunissaient. C’est cette sensation qui m’a fait tomber amoureux de la photographie »,

raconte Jesse Rieser. Cet artiste originaire du sud-ouest des États-Unis s’est d’abord intéressé au dessin et à la peinture avant de se tourner vers l’image. « En conséquence, mes clichés possèdent une dimension picturale, une atmosphère graphique », explique-t-il. Sensible aux émotions, l’auteur construit des récits d’apparence ordinaire, et y instaure des éléments mystérieux, fantaisistes lui permettant de déconstruire le réel.

C’est grâce à une commande pour une compagnie aérienne allemande que le photographe à découvert les Star Geezers. « Il s’agit d’une communauté fondée par Jack et Alice, deux Canadiens passionnés par les cieux. Il y a quelques années de cela, ils ont cherché sur une carte l’endroit le plus obscur d’Amérique du Nord, accessible par la route, et ont trouvé cet espace en Arizona », explique-t-il. Peu après, le couple achète le terrain, et y installe 22 parcelles… Rapidement occupées par des fans d’astronomie. « Beaucoup de résidents sont d’anciens scientifiques, militaires ou du ministère des affaires étrangères », précise Jesse Rieser. Parmi eux, des aventuriers prêts à se déraciner de leurs régions natales pour partager leur passion avec autrui. « J’ai l’impression que malgré une isolation de plus en plus présente, nous sommes davantage connectés », souligne, avec humour, le photographe.

© Jesse Rieser

Tatooine à la rencontre de l’Amérique classique

Situé à 1h30 du magasin le plus proche, Sky Village est complètement isolé. Pourtant, la communauté a des airs futuristes : chaque maison possède un dôme d’observation à la pointe de la technologie, utilisé pour observer et découvrir les étoiles. Un univers perdu entre les époques, interrogeant notre perception du temps. « Je cultive cette image d’une banlieue pavillonnaire dystopique, aussi sombre que belle, synonyme à la fois d’espoir et d’abattement », confie Jesse Rieser. À la manière d’un peintre qui, d’un coup de pinceau, affirme son esthétique, le photographe impose au regardeur sa propre vision du lieu. Un espace extraordinaire, pourtant ancré dans l’histoire du pays. « C’est comme si la planète Tatooine de Star Wars venait à la rencontre de l’Amérique classique, avec une touche de 2001 : l’Odyssée de l’espace : un territoire américain par excellence, à la portée interstellaire », poursuit-il.

Inspiré par ces œuvres de science-fiction, l’auteur construit un récit aussi curieux que passionnant. Portraits et paysages creusent la dichotomie du sujet : si les membres de la communauté représentent la familiarité de la culture occidentale, l’environnement évoque une tout autre planète. Dans ce désert aux couleurs rosées, les dômes des habitations deviennent des traces, des preuves de l’existence d’une civilisation. En frôlant l’absurde, Jesse Rieser capture toute l’extravagance d’un tel lieu. Une terre énigmatique semblable aux représentations imaginaires des planètes lointaines que les résidents aiment tant contempler.

© Jesse Rieser

© Jesse Rieser© Jesse Rieser

© Jesse Rieser© Jesse Rieser© Jesse Rieser

© Jesse Rieser© Jesse Rieser

© Jesse Rieser© Jesse Rieser© Jesse Rieser

© Jesse Rieser

Explorez
Raï de Boris Bincoletto : oublier quelqu'un pour retrouver les autres
© Boris Binceletto
Raï de Boris Bincoletto : oublier quelqu’un pour retrouver les autres
Après Solemar, son premier livre photographique qui explorait la côte Adriatique, Boris Binceletto sort Raï, qui se situe entre la...
17 décembre 2024   •  
Écrit par Hugo Mangin
Motel 42 : Eloïse Labarbe-Lafon peint le décor d’un road trip
© Eloïse Labarbe-Lafon
Motel 42 : Eloïse Labarbe-Lafon peint le décor d’un road trip
Composé d’une quarantaine de portraits pris dans des chambres durant un road trip, Motel 42 d’Eloïse Labarbe-Lafon s’impose comme un...
06 décembre 2024   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Marie Le Gall : photographier un Maroc intime
© Marie Le Gall
Marie Le Gall : photographier un Maroc intime
Absente depuis vingt ans, lorsque Marie Le Gall retourne enfin au Maroc, elle découvre un territoire aussi étranger que familier....
22 novembre 2024   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Visions d'Amérique latine : la séance de rattrapage Focus !
© Alex Turner
Visions d’Amérique latine : la séance de rattrapage Focus !
Des luttes engagées des catcheuses mexicaines aux cicatrices de l’impérialisme au Guatemala en passant par une folle chronique de...
20 novembre 2024   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Nos derniers articles
Voir tous les articles
The Color of Money and Trees: portraits de l'Amérique désaxée
©Tony Dočekal. Chad on Skid Row
The Color of Money and Trees: portraits de l’Amérique désaxée
Livre magistral de Tony Dočekal, The Color of Money and Trees aborde les marginalités américaines. Entre le Minnesota et la Californie...
21 décembre 2024   •  
Écrit par Hugo Mangin
Paysages mouvants : la jeune création investit le Jeu de Paume
© Prune Phi
Paysages mouvants : la jeune création investit le Jeu de Paume
Du 7 février au 23 mars 2025, le Jeu de Paume accueille le festival Paysages mouvants, un temps de réflexion et de découverte dédié à la...
20 décembre 2024   •  
Écrit par Costanza Spina
Mirko Ostuni : une adolescence dans les Pouilles
© Mirko Ostuni, Onde Sommerse.
Mirko Ostuni : une adolescence dans les Pouilles
Dans Onde Sommerse, Mirko Ostuni dresse le portrait de sa propre génération se mouvant au cœur des Pouilles. Cette jeunesse tendre et...
20 décembre 2024   •  
Écrit par Marie Baranger
Ces séries photographiques qui cherchent à guérir les blessures
© Maurine Tric
Ces séries photographiques qui cherchent à guérir les blessures
Pour certain·es artistes, la photographie a un pouvoir cathartique ou une fonction guérisseuse. Iels s'en emparent pour panser les plaies...
19 décembre 2024   •  
Écrit par Fisheye Magazine