Elsa et Johanna, comme à la maison

28 février 2019   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Elsa et Johanna, comme à la maison

Elsa & Johanna présentent Rosarium, c’est le soleil qui finira par nous perdre à Mains d’Œuvres, un lieu culturel situé à Saint-Ouen. Une exposition immersive, mystérieuse, rétro et douillette.

Bienvenue dans la grande salle de Main d’Œuvres, le foyer d’Elsa & Johanna. Un lieu au sol couvert d’une moquette rose pâle, et encombré de nombreux accessoires : canapés fleuris, chaussures à talons, robes à fleurs, ou encore morceaux de verre. Une fois les chaussures enlevées, l’exposition invite le visiteur à entamer une promenade dans un lieu hors du temps. Une rosace confinée, retraçant le parcours des deux photographes. Le récit peut alors commencer, tandis que le public avance, en chaussettes, dans un univers singulier. « Nous ressentions l’envie et le besoin d’investir un espace dans sa totalité, et de proposer un monde enveloppant, qui servirait la narration de nos images, confient les artistes. Nous avons ainsi proposé à l’artiste scénographe Marion Flament, et à l’architecte d’intérieur Alexandre Jarre de produire ensemble l’espace Rosarium ».

Elsa Parra a étudié au Musée des arts décoratifs de Paris, et Johanna Benaïnous a suivi des cours aux Beaux-Arts. Pourtant, c’est à la New York School of Visual Arts que les deux artistes se rencontrent. En découle une collaboration folle, inventive et poétique. Rosarium, c’est le soleil qui finira par nous perdre donne à voir un échantillon de la création des deux femmes. Best of de leur jeune carrière, l’exposition revient sur A couple of them, Beyond the Shadows, Tres Estrellas, Recuerdos, Los Ojos vendados et The Butcher. Autant de séries photographiques invitant la fiction dans une étrange réalité. Si la scénographie séduit par son esthétique singulière, cette immersion dans un univers familier, intimiste et rétro se lit comme une œuvre à part entière. Un morceau d’univers qu’Elsa & Johanna partagent avec les visiteurs. « La scénographie s’inspire d’une maison dans laquelle nous avions joué un duo de personnages, à Calgary, précisent-elles. Elle nous a marquées par sa lumière, son atmosphère étriquée et chaleureuse, ses bibelots et ses meubles. » Des vieilles télévisions diffusent plusieurs courts-métrages du duo. Des vases subliment les clichés, et au fond de la grande salle, dissimulée derrière un rideau, une curieuse installation passe des morceaux de guitare aux influences hispaniques.

© Elsa & Johanna

Des bribes de narrations

Cette installation abrite Tres Estrellas, un moyen-métrage qui plonge le public au cœur d’une épopée dans un village espagnol. Située à Vega de Rio de Palmas, un petit village perdu au bout de l’île Fuerteventura (dans les Canaries, en Espagne), l’histoire met en scène deux adolescents, Luis et Chico, et trois femmes : Lola, Rosanna et leur mère – jouée par la maman de Johanna. Dans ce décor désert et aride, shooté sous un soleil accablant, les gamins rêvent d’amour et les filles de liberté. Elsa & Johanna se griment et deviennent tantôt adolescents vagabonds, tantôt dames coquettes. « Raconter une histoire en film demande beaucoup plus d’énergie qu’en photographie. Il faut imaginer un avant et un après. Entrer dans une véritable émotion et la tenir dans la longueur. C’est un véritable puzzle », se souviennent les auteures. Une superbe découverte, qui résume l’œuvre du duo de photographes.

Car c’est ce rapport à la mise en scène, ces dizaines de récits enchevêtrés qui composent Rosarium. Les deux artistes ont parcouru le monde, de la France aux États-Unis, en passant par l’Espagne, le Canada et l’Autriche. De ces périples, elles rapportent des fictions fascinantes. Perruques, costumes et postures changent, se métamorphosent à chaque cliché, à chaque personnage. « Ce sont de véritables références, qui deviennent des motifs récurrents, intimement liés à notre imaginaire », précisent-elles. Mais qui sont tous ces protagonistes ? À quoi songent-ils ? Souhaitent-ils, comme Lola et Rosanna aller vers des horizons plus stimulants ? Avec brio, Elsa & Johanna font le portrait d’une génération en quête d’elle-même. Sans jamais juger, elles révèlent des bribes de narrations. Une série de chapitres introductifs, que l’on peut choisir de continuer. Dans cette grande maison aménagée, accueillante et mystérieuse, le visiteur est invité à s’asseoir, dévorer ces amorces de récits, et commencer lui-même à écrire.

 

Rosarium, c’est le soleil qui finira par nous perdre, Elsa & Johanna

Mains d’Œuvres, 1 rue Charles Garnier, 93400 Saint-Ouen

Jusqu’au 24 mars 2019

© Elsa & Johanna© Elsa & Johanna© Elsa & Johanna

© Elsa & Johanna© Elsa & Johanna

© Elsa & Johanna© Elsa & Johanna

© Elsa & Johanna© Elsa & Johanna

© Elsa & Johanna© Elsa & Johanna

© Elsa & Johanna

Explorez
Les images de la semaine du 10 novembre 2025 : ébullition photographique 
Berceau de Moïse (Reine de la nuit), Guyane, 2025 © Sylvie Bonnot, courtesy Hangar Gallery, Brussels
Les images de la semaine du 10 novembre 2025 : ébullition photographique 
C’est l’heure du récap ! Cette semaine, les événements photographiques abondent à Paris. Voici un tour d’horizon des festivals, foires et...
16 novembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
5 événements photo à découvrir ce week-end
© Boby
5 événements photo à découvrir ce week-end
Ça y est, le week-end est là. Si vous prévoyez une sortie culturelle, mais ne savez pas encore où aller, voici cinq événements...
15 novembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Les images de la semaine du 3 novembre 2025 : les actualités de Fisheye
© Ian Cheibub
Les images de la semaine du 3 novembre 2025 : les actualités de Fisheye
C’est l’heure du récap ! Entre la parution d’un nouvel ouvrage, la sortie du numéro #74 et celle d’un épisode de Focus, la semaine a été...
09 novembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Paris Photo 2025 célèbre la photographie au Grand Palais
© Chloé Azzopardi / Fisheye Gallery
Paris Photo 2025 célèbre la photographie au Grand Palais
Du 13 au 16 novembre 2025, les yeux des amateurs de photographie seront tournés vers Paris Photo. La foire internationale se tiendra de...
05 novembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Nos derniers articles
Voir tous les articles
La sélection Instagram #533 : au pays des mots
© Simon Phumin / Instagram
La sélection Instagram #533 : au pays des mots
Les artistes de notre sélection Instagram de la semaine se plongent dans les livres et les univers composés de mots. Ouvrages, magazines...
Il y a 3 heures   •  
Écrit par Marie Baranger
16 expositions photographiques à découvrir en novembre 2025
Topside III, de la série L’île naufragée, 2022 © Richard Pak
16 expositions photographiques à découvrir en novembre 2025
Pour occuper les journées d'automne, la rédaction de Fisheye a sélectionné une série d'événements photographiques à découvrir à Paris et...
17 novembre 2025   •  
Écrit par Fisheye Magazine
5 coups de cœur qui sondent la mémoire
© Madalena Georgatou
5 coups de cœur qui sondent la mémoire
Tous les lundis, nous partageons les projets de deux photographes qui ont retenu notre attention dans nos coups de cœur. Cette semaine...
17 novembre 2025   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Les images de la semaine du 10 novembre 2025 : ébullition photographique 
Berceau de Moïse (Reine de la nuit), Guyane, 2025 © Sylvie Bonnot, courtesy Hangar Gallery, Brussels
Les images de la semaine du 10 novembre 2025 : ébullition photographique 
C’est l’heure du récap ! Cette semaine, les événements photographiques abondent à Paris. Voici un tour d’horizon des festivals, foires et...
16 novembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet