Le 28 septembre, le Prix Picto de la Mode invite dix de ses anciens lauréats à s’exprimer, au cœur d’une exposition inédite. En avant-première, Fisheye vous invite à découvrir les créations d’Henrike Stahl, Pascale Arnaud, Laura Bonnefous et Elsa & Johanna.
Depuis vingt ans, le Prix Picto de la Mode récompense des photographes de moins de 35 ans. Pour célébrer son anniversaire, le concours a cette année invité dix anciens lauréats à s’exprimer, sur le thème de leur choix. Le résultat ? Une exposition inédite composée de dix installations, à découvrir au Palais Galliera, le 28 septembre. « Traditionnellement utilisée par les magazines, la photographie de mode fabrique au cours des années sa propre esthétique », précise Vincent Marcilhacy, directeur de la Fondation Picto. « Dès lors, les images vues dans ces magazines autant que dans des musées ou galeries reflètent tout autant les parfums des dernières collections que les bruits d’une société en mouvement ».
Le souffle des créateurs
Alors qu’elle voyage au Japon, dans les zones volcaniques de l’île de Kyushu, Laura Bonnefous est bouleversée par la beauté du territoire. « Loin de l’inventaire et de la description, j’ai vécu ces paysages et découvert ses habitants », explique-t-elle. « J’y ai prélevé des images de l’ordre de l’instinct et du sensible ». En rentrant, elle construit Failles, une création hybride, où se mélangent ses clichés de voyage et les pièces du créateur Issey Miyake. « L’expression du paysage face à ces personnages dévoile des créations organiques et des territoires personnifiés », ajoute Laura. Dialogue entre photo et mode, mémoire et présent, Failles nous propose une visite abstraite et sensorielle du Japon.
Elsa & Johanna, quant à elles, s’inspirent de la robe en métal de Paco Rabanne, réalisée en 1966. Elles construisent, dans le Palais Galliera un panorama de leurs créations. « La robe était faite des carrés et de rectangles d’aluminium, liés entre eux par des anneaux », expliquent les deux photographes. « Notre maille d’images, à l’image d’une grande boîte lumineuse, se révèle grâce à la lumière ». Un écho à l’éclat de la création de Rabanne. Au cœur de cette installation, le duo trace la cartographie de leur univers, des portraits aux paysages, en passant par les natures mortes. Le public est libre de découvrir et d’interpréter les différents clichés. Ils « tracent un chemin abstrait et intuitif dans cette mosaïque volatile », précisent Elsa & Johanna. Un moment de légèreté.
© Laura Bonnefous
© Elsa & Johanna
La libération des corps
Alors que le féminisme se métamorphose, Pascale Arnaud propose un hommage au corps féminin durant cette exposition. Au sein de son installation, des figures se dressent, encadrées par des châssis de bois. « Cette série est une ode aux femmes, faite par une jeune femme », explique la photographe. « Une ode à leur corps, leurs courbes, leur beauté, leur finesse, leur complexité, leurs complexes et leur fragilité ». Réunies par des charnières, les photographies deviennent les battants d’un paravent, un symbole de pudeur et de féminité. Dans les clichés aux tons chauds, charnels, les corps se livrent sans artifice. Les marques et cicatrices se remarquent et subliment la réalité des corps. Organisés en trois triptyques, et placés dos à dos, les corps se répondent, fiers et libérés.
En 2017, le #metoo a marqué les esprits. « À la suite de ce mouvement, j’ai senti le besoin de revoir ma vision de l’homme. Je suis partie en quête d’une nouvelle masculinité, l’image de l’homme d’aujourd’hui », confie Henrike Stahl. Cette photographe allemande vit aujourd’hui entre Paris et Berlin. Et c’est dans les banlieues qu’elle a choisi de photographier ces hommes. Des lieux portant les stigmates de la masculinité. Poétique et délicate, sa série intitulée Macadam Cowboys joue avec nos perceptions. Un univers onirique, un titre provocateur et une sensibilité à fleur de peau. Les cowboys de ses clichés, pourtant, n’ont rien des illustrations stéréotypées des hommes du Far West. Ils posent avec pudeur, révélant leur fragilité. Une installation tout en nuance.
© Pascale Arnaud
© Henrike Stahl
Image d’ouverture © Laura Bonnefous