« SHEGAZES », vers une nouvelle représentation des femmes

04 juin 2019   •  
Écrit par Lou Tsatsas
"SHEGAZES", vers une nouvelle  représentation des femmes

Sorcières, femme & nature, le troisième numéro de l’artzine SHEGAZES, fondé par Caroline Ruffault, est sorti en mars 2019. Un hommage à ces femmes atypiques et inspirantes, vivant en osmose avec la nature. 

« Toutes les images ont un sens. Toutes les images sont politiques. »

Cette phrase conclut l’introduction du deuxième numéro de SHEGAZES, un zine (une publication indépendante, entre le magazine et le livre, et distribuée en faible quantité, ndlr) créé par la photographe Caroline Ruffault, combinant photographies, dessins et textes. Depuis plusieurs années, l’auteure s’interroge sur le regard porté sur les femmes. « Je suis inspirée par un essai de la critique et réalisatrice Laura Mulvey, intitulé Plaisir visuel et cinéma narratif. Elle y présente la façon dont les femmes sont traitées uniquement comme des objets de plaisir visuel pour le spectateur masculin. Les femmes ont grandi en regardant ces films faits par des hommes, et ont pris l’habitude de regarder les femmes à travers l’œil d’un homme », explique-t-elle.

Pour Caroline Ruffault, chaque image comporte une dimension politique. Une réflexion qui l’a poussée à fonder ce zine, afin de croiser des regards d’artistes, et de développer cette pensée. Un appel à participation est toujours ouvert, sur le site de la revue, invitant les artistes à envoyer photographies, textes et dessins. Une manière de faire cohabiter en un numéro des regards qui ne s’étaient jamais croisés.

Une osmose entre corps et nature

Après avoir abordé le sujet des règles, un thème tabou même dans les sociétés occidentales, Caroline Ruffault a dédié le troisième opus de SHEGAZES aux sorcières. Femmes de science, ou vieillardes effrayantes, objet de désir ou de peur pour des hommes qui n’ont cessé de les représenter dans l’art, les sorcières sont avant tout « des figures contestataires et puissantes, premières victimes du capitalisme naissant. Le symbole de ce mouvement qui voit un lien et une lutte commune entre l’exploitation et la dégradation du monde naturel et l’oppression des femmes » déclare la photographe.

Dans ce nouveau chapitre, les ensorceleuses deviennent des femmes rebelles, vivant en harmonie avec la nature. Des écoféministes qui nouent un lien intime et intuitif avec leur environnement. Une osmose bienfaitrice entre corps et nature. « Face à l’urgence du changement climatique, ce lien devient une nécessité », précise l’artiste. Les figures de proue de ce numéro ? Émilie Hache, philosophe et auteure de l’ouvrage Reclaim, recueil de textes écoféministes, et la sorcière Starhawk. La première déclarait : « Se réapproprier ce qui relève de la féminité, c’est d’abord apprendre à aimer son corps contre la haine de la culture patriarcale », tandis que la seconde participait aux luttes féminines antinucléaires et antimilitaristes dans les années 1970-1980. Des modèles aussi atypiques que réjouissants. À côté de leurs mots, des images d’arbres noueux, de nature sauvage, et de corps nus et libres se succèdent. Une ode à ces femmes captivantes et inspirantes.

 

SHEGAZES, photo et artzine, 8 €

© Caroline Ruffault

© Anna Hell

© Anna Hell

© Agustina Puricelli© Leilam Carry

© à g. Agustina Puricelli, à d. Leilam Carry

© Megan Doherty

© Megan Doherty

© Chloé Gregoire© Caroline Ruffault

© à g. Chloe Gregoire, à d. Caroline Ruffault

© Caroline Ruffault

© Caroline Ruffault

© Tania Franco Klein

© Tania Franco Klein

Image d’ouverture : © Anna Hell

Explorez
Marc Riboud : dix ans de conflit vietnamien dans une exposition
À la sortie de l'école dans un village de la côte, Nord Vietnam, 1969 © Marc Riboud / Fonds Marc Riboud au musée Guimet
Marc Riboud : dix ans de conflit vietnamien dans une exposition
Le musée Guimet des Arts asiatiques et l’association Les Amis de Marc Riboud s’unissent pour présenter l’exposition Marc Riboud –...
18 avril 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Basile Pelletier et Sølve Sundsbø conversent : « La curiosité est ma principale source d'inspiration »
Le linge, 2021 © Basile Pelletier
Basile Pelletier et Sølve Sundsbø conversent : « La curiosité est ma principale source d’inspiration »
Le jeune talent Basile Pelletier, 21 ans, ancien élève de la section art et image de l’école Kourtrajmé, échange avec le photographe...
17 avril 2025   •  
Écrit par Cassandre Thomas
La sélection Instagram #502 : rebelle un jour, rebelle toujours
© Piotr Pietrus / Instagram
La sélection Instagram #502 : rebelle un jour, rebelle toujours
Les artistes de notre sélection Instagram de la semaine font résistance. Résistance contre l’oppression, contre les diktats, contre les...
15 avril 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Fotohaus Bordeaux 2025 : des existences engagées
© Olivia Gay
Fotohaus Bordeaux 2025 : des existences engagées
La quatrième édition de Fotohaus Bordeaux a commencé. Jusqu’au 27 avril 2025, l’Hôtel de Ragueneau accueille l’événement qui, cette...
12 avril 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Dans l'œil de SMITH : métamorphose des sols
Dami (Fulmen), 2024 © SMITH, Courtesy Galerie Christophe Gaillard.
Dans l’œil de SMITH : métamorphose des sols
Aujourd’hui, plongée dans l’œil de SMITH, qui nous révèle les dessous de deux images issues de sa série Dami (Fulmen), réalisée lors de...
Il y a 10 heures   •  
Écrit par Marie Baranger
Les coups de cœur #540 : Rosalie Kassanda et François Dareau
© Rosalie Kassanda
Les coups de cœur #540 : Rosalie Kassanda et François Dareau
Nos coups de cœur de la semaine, Rosalie Kassanda et François Dareau, arpentent les rues du monde en quête de quelques étonnements et...
21 avril 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Les images de la semaine du 14 avril 2025 : mémoire et conversations
© Louise Desnos
Les images de la semaine du 14 avril 2025 : mémoire et conversations
C’est l’heure du récap ! Récits intimes, histoires personnelles ou collectives, approches de la photographie… Cette semaine, la mémoire...
20 avril 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Eulogy : Sander Coers et les traumatismes intergénérationnels
© Sander Coers
Eulogy : Sander Coers et les traumatismes intergénérationnels
Au fil de ses projets, Sander Coers sonde la mémoire en s’intéressant notamment à l’influence que nos souvenirs exercent sur notre...
19 avril 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet