Le contexte exceptionnel implique une réponse exceptionnelle. Ce jeudi soir, Lily Rault, photographe de 31 ans, lancera lors d’un vernissage virtuel son exposition digitale TABOU.E 2.0 (20). Un évènement dédié aux vulves et aux femmes souhaitant se réconcilier avec leur corps.
Mycose, accouchement, épisiotomie. Les points communs ? Le corps féminin, la douleur, une douleur que l’on tait. « Accoucher serait un des évènements les plus traumatisants pour le corps, rappelle Lily Rault. Une étude conduite par Janis Miller, professeure associée à l’U-M School of Nursing, Université du Michigan révèle que 15 % des femmes ont des blessures pelviennes qui ne guérissent pas. Si un athlète subissait de telles blessures sur le terrain, il passerait immédiatement un IRM. Vivre dans un corps de femme, c’est un continuum de l’enfer. Il y a ce que l’on tait par pudeur, éducation ou puritanisme, et la douleur d’être femme(s) qui ne doit pas déborder dans l’espace public », complète-t-elle. Subir des discriminations en plus de subir son propre corps, pour Lily Rault, 31 ans, cela en était trop. Il lui fallait agir. C’est-à-dire informer et éduquer. « J’ai réalisé que nous avions finalement très peu d’informations sur nous, et nos vulves », se souvient l’artiste. “Be who you needed when you were younger” (Sois celui ou celle dont tu avais besoin lorsque tu étais jeune, NDLR) Tout comme l’auteur de ce mentra, l’écrivain Brad Montague, Lily Rault est convaincue que les jeunes générations ont besoin de repères et de bienveillance.
Dans la jouissance comme dans la douleur
En 2018, son expérience de soi devient création, et ses premières vulves artistiques apparaissent. Peu photographiée, cette partie du corps regorge pourtant de symboliques. « Le corps féminin est violent et complexe puisqu’il se vit dans la jouissance comme dans la douleur », précise l’artiste. TABOU.E 2.0 (20) donne à voir des vulves fondues dans des paysages. « Le collage amène souvent un effet de surprise », commente-t-elle. Et rien de mieux que de déstabiliser, choquer, pour faire émerger la réflexion. Qu’est-ce qu’un corps ? Quel rapport entretenons-nous avec lui ? Est-ce un fantasme de penser à sa désexualisation ? Une chose est certaine Lily Rault sublime les sexes féminins – dans toute leur diversité – et ouvre le dialogue. Initialement, TABOU.E 2.0 (20) devait être présentée en avril 2020. Épidémie et confinement obligent, l’exposition a été reportée. Mais comme nous, Lily Rault est persuadée qu’il est nécessaire de créer. Parce que créer, c’est résister, elle lancera son exposition digitale ce soir. « Contexte exceptionnel, réponse exceptionnelle. Je propose plusieurs niveaux de lecture dans cette expérience immersive », confie l’artiste. La galerie photo sera complétée par des interviews. Un travail de titan mené par une photographe engagée et convaincue d’une chose : « le rêve, l’évasion, la stimulation de l’esprit, c’est aussi important que le reste. C’est vital ».
Rendez-vous jeudi 7 mai à 20h30. Le vernissage se tiendra sur le site de Lily Rault.
© Lily Rault