Cette semaine, plongée dans l’œil de Boby. Dans la foule, parmi les fumigènes, les cris, les bras levés et les armures dystopiques des forces de l’ordre, il ne cesse de capturer le soulèvement populaire face à un gouvernement qui refuse d’écouter. Pour Fisheye, il revient sur un cliché pris à l’entrée d’Opéra, à Paris, le 23 mars 2023. Une image, déjà emblématique, d’un des plus grands rassemblements auquel le photoreporter a assisté.
« C’était juste après l’annonce du 49.3. Je ne crois pas avoir déjà vu autant de monde dans une manifestation. J’étais en commande pour Libé. On se trouve à l’entrée d’Opéra, et les tensions entre protestant·es et forces de l’ordre augmentaient depuis environ un kilomètre…
Ce bouclier, il m’a immédiatement interpellé. Il représente ce que j’aime faire : il y a de la poésie, du contraste, de la satire, de l’irrévérence. J’aime ce symbole de violence marqué par ce cœur. Les couleurs me rappellent aussi le bleu-blanc-rouge français. Cette image, elle est tellement française qu’elle pourrait avoir sa carte de mutuelle ! Et puis toute la symbolique me plaît beaucoup : on voit la casse sans les casseur·ses, avec les vitres brisées, le feu rouge qui convoquent l’image d’une France bloquée… En se plongeant dans les détails, on remarque plein de choses nouvelles. Et ça se répond : la botte et le feu, le sac à main et le bouclier… C’est un peu comme si la police était le dernier rempart d’un monde capitaliste.
J’aime réaliser des photos fortes visuellement. Pas seulement informatives, mais aussi esthétiques. Je crois que cette image, c’est mon record de likes sur Instagram – même si je ne sais pas si c’est un bon indicateur ! En la publiant, j’ai reçu des messages de personnes qui ne s’intéressent habituellement pas à la politique, et qui y viennent grâce à mes photos. Alors je me dis que c’est un bon vecteur d’informations à l’heure des IA et des fake news ! »
© Boby