Le photographe espagnol Octavi Serra s’intéresse à la fonction de l’objet. En détournant ce qu’il voit, il met en lumière l’absurdité de notre existence.
Né à Barcelone en 1990, Octavi Serra se définit avant tout comme un « artiste urbain ». Il perçoit son travail comme une transformation du quotidien. « Je m’intéresse surtout à l’intervention sur l’objet », explique-t-il. « Une fois l’installation terminée, le meilleur moyen de transmettre mon message est d’étirer sa durée de vie, grâce à la photographie ». Influencé par la politique et la philosophie, l’artiste espagnol construit une photographie conceptuelle et surréaliste qui force le public à la réflexion. « Je ne prétends pas proposer de solutions », précise Octavi. « Mon travail se limite aux interrogations ». À la manière d’une pièce de théâtre absurde, ses créations « désordonnent » l’espace urbain et attirent l’œil.
Détourner l’objet pour mieux s’en servir
Si les créations d’Octavi sont placées dans l’espace public, elles sont toutes mises en scène avec précaution. « J’ai en tête un sujet bien avant de prendre une photo. Je recherche ensuite des éléments représentatifs, et je réfléchis aux différentes possibilités qu’ils m’offrent », confie le photographe. En détournant l’objet, Octavi cherche à instaurer un dialogue. Ses thèmes nous renvoient à la matérialité de notre monde, à l’absurdité de notre quotidien. Chaque objet est symbolique : les couleurs, les formes et la raison même de l’existence de ces éléments sont autant de pistes à étudier pour révéler les profondeurs cachées des clichés. « C’est un véritable terrain de jeu, que je me plais à construire », ajoute l’artiste. À travers ses sculptures urbaines étranges, la logique même de notre société est mise à mal. Qu’il questionne notre surconsommation, la corruption politique ou encore les enjeux environnementaux, Octavi se sert de ses illusions d’optique pour distiller un humour noir, corrosif, visant à faire réagir les passants. « Ce que je bouleverse, ce n’est pas la superficialité de l’objet, mais bien l’image qu’il renvoie », conclut-il.
© Octavi Serra