« Au cours de l’un de nos échanges, Ana m’a confié que, lorsqu’elle devait faire le ménage, il lui fallait ramasser tous les cheveux tombés par terre, un à un, avant de frotter les surfaces de la salle de bain avec une brosse à dents et passer la serpillère. Si le sol n’était pas parfaitement nettoyé, un thérapeute attrapait sa main nue, la plongeait dans la cuvette des toilettes et la maintenait dans cette position jusqu’à ce que celle-ci soit impeccable. Pour représenter ce témoignage qui renvoie à une image très forte, j’ai rejoué la scène avec José, qui est un acteur. L’aspect cinématographique qui se dégage de ce cliché me plaît beaucoup. Je l’apprécie d’un point de vue esthétique, mais également parce qu’elle achève une session de trois longues journées passées à prendre des photographies de ce genre. Après celle-ci, mon équipe et moi nous sommes effondrées. C’était trop, nous étions à bout. Nous avons toutes et tous pleuré et avons ressenti le besoin de nous prendre dans nos bras. Je m’en souviens très bien, comme si c’était hier, tellement c’était intense. C’était un moment d’autant plus fort que c’est ma meilleure amie d’alors qui a filmé et immortalisé toutes ces séquences où j’étais, en quelque sorte, torturée, comme les pensionnaires de ces cliniques. Cette vision lui était insoutenable tant c’était réaliste. »
© Paola Paredes