Portrait sensible d’Alexandre, drag queen

21 novembre 2020   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Portrait sensible d’Alexandre, drag queen

Spécialiste du reportage, le photographe français Cebos Nalcakan suit, depuis deux ans, Alexandre, alias Miss Manly B. Une plongée monochrome dans un milieu drag flamboyant.

Depuis plus de dix ans, Cebos Nalcakan affine son regard, croise les styles et les sujets pour parfaire son approche photographique. D’abord passionné par le milieu du rap et de l’urbain, l’auteur se plonge ensuite dans la photographie de guerre et de reportage. Après de nombreux voyages, il apprend à développer son propre monde, et à « raconter [s]es images ». « Je prends mon temps pour faire les meilleurs choix, explique-t-il. Quand on s’intéresse à l’humain, ou à des sujets sensibles, il faut avoir la bonne approche. »

C’est lors d’une soirée étrange à La Madame Klaude, une boîte de nuit située dans le 10e arrondissement parisien, que le photographe débute un projet au long cours. « Je voulais sortir de ma zone de confort en shootant un milieu que je n’avais pas l’habitude de côtoyer. L’organisateur de l’événement m’a présenté comme un photographe qui souhaitait faire des photos de drag. Si je n’étais pas venu pour cela, j’ai ainsi pu rencontrer Alexandre », raconte-t-il. Alexandre, ou Miss Manly B. Une drag-queen qui accepte aussitôt de passer devant l’objectif de Cebos Nalcakan, et de se révéler – dans ses spectacles comme au quotidien.

© Cebos Nalcakan

Imaginer les couleurs

« J’ai voulu raconter la vie d’une personne plutôt que réaliser une série sur le milieu drag »,

déclare l’auteur. Dans ses images – réalisées au cours de deux ans d’échanges entre les deux hommes – Alexandre et son alter ego féminin se révèlent, sans pudeur et avec une confiance touchante. Les heures de répétitions et de maquillages, les corps mis à mal par les corsets, l’épuisement après les shows, et les difficultés à vivre de son art dans un monde touché par une crise sanitaire… Au fil du projet, les différentes strates d’histoires dialoguent, et composent un portrait complexe, fait d’expériences, d’émotions, et de moments ordinaires. « Lui est brésilien, et moi français d’origine turque. Nous sommes différents par nos choix religieux, sexuels et culturels, mais ce sont ces différences qui sont à la fois fortes et belles », confie Cebos Nalcakan.

Dans un noir et blanc contrasté apparaissent à tour de rôle Alexandre et Miss Manly B, chacun de part et d’autre du rideau rouge. Une mosaïque de regards, d’expressions frappantes qui restent ancrées dans les esprits. Si les couleurs vives du milieu drag n’apparaissent pas dans les images du photographe, il nous faut les imaginer. Se perdre dans cette atmosphère de fête, de rire et de légèreté, qui nous fait oublier les douleurs, les blessures et l’intolérance. Partout, le protagoniste nous accompagne, et nous ouvre les portes d’un univers jouissif et – malgré tout – encore jugé tabou. « Alexandre est le sujet idéal : il m’offre des moments, et c’est à moi de les capturer », ajoute l’auteur. Venus de deux horizons différents, les deux artistes signent ici le récit visuel d’une belle amitié. Une rencontre inattendue, permettant à chacun d’imaginer un autre monde, aussi proche qu’inaccessible. « Unir nos arts nous rend plus forts, surtout lorsque c’est fait avec respect et légitimité », conclut le photographe.

© Cebos Nalcakan

© Cebos Nalcakan© Cebos Nalcakan

© Cebos Nalcakan© Cebos Nalcakan

© Cebos Nalcakan© Cebos Nalcakan

© Cebos Nalcakan© Cebos Nalcakan

© Cebos Nalcakan© Cebos Nalcakan

© Cebos Nalcakan

© Cebos Nalcakan

Explorez
Simon Vansteenwinckel remporte le prix Nadar Gens d’images 2025
© Simon Vansteenwinckel
Simon Vansteenwinckel remporte le prix Nadar Gens d’images 2025
Le nom du lauréat de la 71e édition du prix Nadar Gens d’images vient d’être annoncé : il s’agit de Simon Vansteenwinckel. Le jury l’a...
Il y a 8 heures   •  
Écrit par Apolline Coëffet
a ppr oc he : Rencontre au cœur de l’image
© Emile Gostelie
a ppr oc he : Rencontre au cœur de l’image
Dans cet espace pensé comme une exposition, un·e photographe et un·e commissaire croisent leurs regards. Pour cette première édition...
Il y a 11 heures   •  
Écrit par Fabrice Laroche
Fisheye #74 sonde la notion d’éthique en photographie
© Stan Desjeux
Fisheye #74 sonde la notion d’éthique en photographie
Fisheye #74 sera disponible en kiosque ce samedi 8 novembre ! En ce mois consacré à la photographie, notre nouveau numéro s’intéresse à...
06 novembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Laura Menassa : Beyrouth comme corps et paysage
© Laura Menassa
Laura Menassa : Beyrouth comme corps et paysage
Entre journal intime visuel et témoignage collectif, le travail de Laura Menassa explore la fragilité et la résilience au cœur de...
04 novembre 2025   •  
Écrit par Costanza Spina
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Simon Vansteenwinckel remporte le prix Nadar Gens d’images 2025
© Simon Vansteenwinckel
Simon Vansteenwinckel remporte le prix Nadar Gens d’images 2025
Le nom du lauréat de la 71e édition du prix Nadar Gens d’images vient d’être annoncé : il s’agit de Simon Vansteenwinckel. Le jury l’a...
Il y a 8 heures   •  
Écrit par Apolline Coëffet
a ppr oc he : Rencontre au cœur de l’image
© Emile Gostelie
a ppr oc he : Rencontre au cœur de l’image
Dans cet espace pensé comme une exposition, un·e photographe et un·e commissaire croisent leurs regards. Pour cette première édition...
Il y a 11 heures   •  
Écrit par Fabrice Laroche
Fisheye #74 sonde la notion d’éthique en photographie
© Stan Desjeux
Fisheye #74 sonde la notion d’éthique en photographie
Fisheye #74 sera disponible en kiosque ce samedi 8 novembre ! En ce mois consacré à la photographie, notre nouveau numéro s’intéresse à...
06 novembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Focus #81 : l’autodéfense écologique selon Chloé Azzopardi 
06:05
Focus #81 : l’autodéfense écologique selon Chloé Azzopardi 
C’est l’heure du rendez-vous Focus ! Au cœur du secteur Émergence de Paris Photo, Chloé Azzopardi dévoile, du 13 au 16 novembre 2025, Non...
05 novembre 2025   •  
Écrit par Lou Tsatsas