« Meeting Sheila » : l’histoire d’une rencontre entre une photographe et sa mère

22 juin 2017   •  
Écrit par Fisheye Magazine
"Meeting Sheila" : l'histoire d'une rencontre entre une photographe et sa mère

En 2015, la photographe Ashley Comer, 24 ans, rencontre pour la première fois sa mère biologique. Elles passent plusieurs jours ensemble, au cours desquels Ashley va documenter cette nouvelle relation. Ses images dévoilent une complicité naissante, dont la photographie se fait l’écho et le médium. Meeting Sheila est une série simple et touchante. C’est aussi pour Ashley une manière d’appréhender en images une réalité sur laquelle elle s’exprime avec pudeur. Entretien.

Fisheye Magazine : Qui est Sheila ? Comment l’as-tu rencontrée ?

Ashley Comer

: Sheila est ma mère biologique. Je l’ai rencontrée au printemps 2015. J’avais 22 ans. C’est grâce à mes parents adoptifs que j’ai découvert son identité. J’avais envie de connaître mon histoire biologique, et ils ont retrouvé un document sur lequel figuraient les prénoms de mes géniteurs, ainsi que quelques informations formelles sur eux deux. Ca a attisé ma curiosité, alors j’ai contacté l’agence d’adoption. Ils ont découvert que Sheila vivait en Floride, c’est-à-dire l’état à côté du miens, la Géorgie. Je lui ai écris une lettre, puis je lui ai téléphone et nous avons convenu d’une rencontre, chez elle.

© Ashley Comer© Ashley Comer
© Ashley Comer

Quelle impression t’a laissé votre première rencontre ?

Sheila est une personne énergique, fun et très attachante. Elle se définit comme une red-neck, elle adore être dehors et elle est passionné par les voitures. Elle travaille sur des chantiers de construction et c’est l’une des rares femmes travaillant sur le terrain.

Quelle est son histoire ?

Sheila a grandi en Allemagne, car son père travaillait dans l’armée. Puis elle est revenue vivre aux États-Unis et s’est installée dans le Massachusetts, où je suis née. Elle a eu un fils avant moi, puis un autre après ma naissance. Sa vie a été dure mais elle conserve un optimisme à toute épreuve. Elle est aussi très spirituelle. Elle a déménagé en Floride sur un coup de tête; malgré les longs trajets pour le travail, elle y vit simplement, elle est heureuse.

© Ashley Comer
© Ashley Comer
© Ashley Comer
© Ashley Comer

Quand as-tu commencé à la photographier ? Et pendant combien de temps ?

J’ai commencé le premier week-end que nous avons passé ensemble. Au départ, c’était très candide. En tout, j’ai passé quatre week-end consécutifs avec Sheila. Nous avons organisé les prises de vue ensemble, au fur et à mesure que nous nous sentions à l’aise toutes les deux.

Pourquoi était-il nécessaire pour toi de la photographier ? D’ailleurs, comment a-t-elle accueilli ta démarche ?

Nous nous sommes rencontrés pendant mon dernier semestre à l’université. Pour achever le cursus, il fallait se consacrer à gros projet de fin d’étude. J’ai décidé que ce serait ma rencontre avec Sheila. Ça a été une très belle manière de créer du lien entre nous. Et aussi de faire face à ce qui arrivait dans ma vie. Elle nous a accueilli, mon appareil et moi, les bras ouverts. Sheila aime la photographie, d’ailleurs elle s’intéresse beaucoup à l’art en général.

Tu apparais aussi à ses côtés sur certaines images…

Oui, et ses images s’articulent dans la série de manière différente que les photos où Sheila pose seule. Ces clichés capturent mon état d’esprit pendant cette période. Ils préservent la mémoire de ces moments.

© Ashley Comer
© Ashley Comer
© Ashley Comer
© Ashley Comer

En tant que photographe, quelle importance revêt cette série dans l’ensemble de ton travail ?

Ce projet n’aurait clairement pas été le même si je ne l’avais pas abordé de cette manière. Étant photographe, je n’ai pas juste penser à moi, mais aussi aux spectateurs qui découvriraient ce travail pour la première fois. J’ai voulu faire ressortir de cette expérience un message visuel et émotionnel universel.

Quelle est ton image favorite de Meeting Sheila ?

Celle où Sheila et moi sommes allongées dehors, dans un rayon de soleil. Je trouve que cette image contient toute l’expérience de notre première rencontre. Je garde aussi un beau souvenir de ce moment particulier, car des amis se sont démenés pour parvenir à préserver cette lumière.

Qu’est-ce que ça fait, de pouvoir se lier ainsi à quelqu’un, grâce à la photographie ?

C’est un privilège !

© Ashley Comer
© Ashley Comer

© Ashley Comer

Images par © Ashley Comer

 

 

 

 

 

Explorez
Lee Miller, mélancolie débordante et chambres d'hôtel : dans la photothèque d'Éloïse Labarbe-Lafon
Diane et Luna, 2023 © Eloïse Labarbe-Lafon
Lee Miller, mélancolie débordante et chambres d’hôtel : dans la photothèque d’Éloïse Labarbe-Lafon
Des premiers émois photographiques aux coups de cœur les plus récents, les auteurices publié·es sur les pages de Fisheye reviennent sur...
Il y a 5 heures   •  
Écrit par Marie Baranger
Kianuë Tran Kiêu : éclats de tendresse et narratives queers
© Kianuë Tran Kiêu
Kianuë Tran Kiêu : éclats de tendresse et narratives queers
Kianuë Tran Kiêu fait de l’art un espace de connexion et de transmission où la vulnérabilité devient une force. Chaque projet est une...
24 février 2025   •  
Écrit par Costanza Spina
Saint-Valentin : les photographes de Fisheye montrent d’autres visions de l’amour
© Nick Prideaux
Saint-Valentin : les photographes de Fisheye montrent d’autres visions de l’amour
Les photographes de Fisheye ne cessent de raconter, par le biais des images, les préoccupations de notre époque. Parmi les thématiques...
14 février 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Dans les songes dionysiaques de Hui Choi
© Hui Choi. The Swan's Journey.
Dans les songes dionysiaques de Hui Choi
Le photographe chinois Hui Choi traduit les contradictions des émotions humaines en images empreintes de lyrisme. S’inspirant de la...
14 février 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Lee Miller, mélancolie débordante et chambres d'hôtel : dans la photothèque d'Éloïse Labarbe-Lafon
Diane et Luna, 2023 © Eloïse Labarbe-Lafon
Lee Miller, mélancolie débordante et chambres d’hôtel : dans la photothèque d’Éloïse Labarbe-Lafon
Des premiers émois photographiques aux coups de cœur les plus récents, les auteurices publié·es sur les pages de Fisheye reviennent sur...
Il y a 5 heures   •  
Écrit par Marie Baranger
Fisheye #70 : la photographie de mode montre ses griffes
© Léo Baranger
Fisheye #70 : la photographie de mode montre ses griffes
Alors que la Fashion Week parisienne vient de s’achever, Fisheye consacre son numéro #70 à la mode. Au fil des pages, photographes et...
Il y a 10 heures   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Man Ray célébré par Reporters sans frontières
© Man Ray
Man Ray célébré par Reporters sans frontières
Pour son 78e album photographique, Reporters sans frontières, l'association engagée pour la liberté de la presse, met à l'honneur l'œuvre...
11 mars 2025   •  
Écrit par Costanza Spina
La sélection Instagram #497 : ni blanc ni noir
© collage.art.syb / Instagram
La sélection Instagram #497 : ni blanc ni noir
Les artistes de notre sélection Instagram de la semaine plongent dans un océan monochrome. Iels sondent les nuances de gris, les noirs...
11 mars 2025   •  
Écrit par Marie Baranger