Nos coups de cœur #410, Cameron James McLaren et Oriane Thomasson, utilisent tous deux le dessin pour repousser les frontières de la photographie. L’un s’en sert pour explorer les conséquences du confinement, et l’autre s’inspire de sa technique pour capturer un univers étrange, entre nature et artifice.
Cameron James McLaren
« J’ai découvert le 8e art par le biais du livre photo lorsque j’étais enfant, en fouillant dans la collection de mon père. J’ai vite été fasciné par la manière dont le médium pouvait combiner plusieurs perspectives en une seule voix cohérente »
, raconte Cameron James McLaren. Depuis, le photographe canadien installé en Nouvelle Zélande développe une écriture documentaire traditionnelle, nourrie par certains éléments contemporains. « Je veux que mon travail soit autobiographique, tout en traitant des communautés sous-représentées. Antoine D’Agata disait qu’il ne voulait jamais prendre la position d’un simple observateur, et cette idéologie m’a toujours plu », poursuit l’auteur. Ainsi, avec Folk Syndrome, il s’appuie sur un événement global – le confinement – pour étudier ses effets psychologiques sur les jeunes, et ses conséquences sur les familles et les foyers. À la croisée des arts, la série emprunte au dessin, au collage et à l’image pour explorer les échos créés par cette période à part dans l’histoire. Une collection d’œuvres touchantes s’approchant de l’intimité d’un ordinaire familier. « Ce qui m’inspire, ce sont les moments de calme au cœur de l’instabilité, les instants les plus infimes qui naissent dans tout le reste. La musique est également très importante, elle permet une compréhension de nos émotions, elle nous représente », ajoute Cameron James McLaren.
Folk Syndrome, Éditions Cabin Fever Books, 40$NZ, 90 p.
© Cameron James McLaren
Oriane Thomasson
Artiste française établie à Bruxelles, Oriane Thomasson s’est tournée vers la photographie après avoir étudié le dessin. Une pratique qui a influencé sa manière d’observer les formes, les couleurs et les matières. Pour elle, le 8e art est synonyme de construction, de visions qui grandissent et se développent au gré de nos explorations du monde et « des voyages et des fantasmes qui en découlent », précise-t-elle. Adepte du numérique et de l’argentique, du scan, de la couleur comme du monochrome, l’autrice aime « susciter des frictions, souligner les intervalles qui sont entre chaque image ». Et au cœur de son travail se trouve un désir d’interroger le rôle de l’imaginaire et sa représentation dans des cadres atypiques – la science, et l’histoire naturelle, notamment. Une thématique qu’elle développe dans Paradis. « J’ai commencé à travailler sur ce projet en photographiant des décors de zoos et de muséums d’histoire naturelle, en m’interrogeant sur notre façon de penser et de représenter cette nature exotique venue de pays lointains », raconte Oriane Thomasson. Entre le naturel et l’artificiel, l’artiste construit un univers étrange, aux frontières de l’impossible. Créatures éteintes et végétations tropicales s’y côtoient, comme pour interroger nos fascinations pour l’inconnu. Un ensemble presque futuriste, résonnant avec les préférences littéraires de la photographe. « La science-fiction d’Ursula K. Le Guin et de J.G. Ballard sont de grandes sources d’inspiration qui me permettent de prolonger mon univers visuel », commente-t-elle.
© Oriane Thomasson
Image d’ouverture : © Oriane Thomasson