Sujets insolites ou tendances, faites un break avec notre curiosité de la semaine. Dans Amour Maternel, la photographe française Sabrina Mariez aborde avec bravoure le sujet tabou des grossesses mal vécues.
« Lorsqu’une femme est enceinte, elle doit, par convention, montrer l’image d’un bonheur infini. Elle n’a pas le droit de se plaindre ni d’être malheureuse. Elle est murée dans le silence par crainte d’être marginalisée, ou pire, d’être jugée comme déviante »,
déclare Sabrina Mariez. Dans Amour maternel, la photographe autodidacte s’intéresse aux détresses et souffrances liées à la grossesse. Un mal tabou, peu discuté en société.
L’artiste construit, depuis ses débuts des séries personnelles, inspirées par des personnages, des rencontres. « Ce qui compte à mes yeux, c’est ma vie intérieure, celle qui fourmille de personnages décalés, parfois beaux, parfois non, des anti héros tristes ou heureux qui me plongent dans des mondes fantasmés et cinématographiques », précise-t-elle. Pour réaliser ce projet, elle a tourné l’objectif vers sa propre histoire, son propre ressenti. Elle se met à nu, espérant « libérer la parole des mères » grâce à ses mises en scène surréalistes.
Dévoiler sa vulnérabilité
Grain prononcé, couleurs pop, décor onirique… La série nous plonge dans un univers rêvé, où les doutes, les angoisses et les peines des mères en devenir font surface. Dans ce décor psychédélique, Sabrina Mariez elle-même, ainsi qu’une jeune modèle, dévoilent leur vulnérabilité. « Le rouge rappelle l’intérieur du corps, le sang aussi, évidemment. Le vert peut être vu comme l’espoir et la vie », explique la photographe, qui poursuit : « Mais c’est à chacun de s’y plonger et de ressentir par lui-même ».
Loin du post-partum, sujet plus volontiers abordé, les grossesses difficiles demeurent difficiles à appréhender. Elles interrogent – « Le fait de ne pas éprouver de bonheur durant cette période signifie-t-il, pour autant, que l’on ne puisse pas être une bonne mère ? Peut-on réduire l’amour maternel à un code génétique et hormonal ? » se questionne l’artiste. Dans les clichés, pas de nouveau-nés, mais des poupons en plastique. Visions étranges, représentant à la fois le lien distant entre mère et enfant, et l’envie, malgré tout, de forger une relation. Dans ce monde fantasmagorique, les protagonistes révèlent, sans peur, leur faille, et confrontent, de manière frontale, un sentiment trop souvent refoulé.
© Sabrina Mariez