Installée en Australie, l’artiste émergeante de 39 ans, Bec Wood, capture la féminité en s’extrayant de toute injonction sociale et en se positionnant en tant que fervente défenseuse de celleux qui n’ont pas de voix. Elle célèbre ainsi à travers ses photographies, la pluralité des corps et les montre sans artifice, de la manière la plus authentique qui soit.
Depuis toujours, Bec Wood entretient un lien étroit avec le vivant, la nature, ce qui relève de l’intime et voue une fascination pour le médium photographique. Son attirance pour le caractère sacré, l’intemporalité et la nostalgie conféré·es au 8e art lui vient d’abord des membres de sa famille : son père documentait leurs aventures familiales avec une vieille caméra des années 1990. Sa mère quant à elle, conservait un vieil appareil photo appartenant à son grand-père, dans le but de le lui transmettre plus tard. Ce goût pour la photo s’amplifie à mesure que le temps passe : en grandissant, elle se passionne pour la chambre noire dont « apprécie le romantisme ». En 2010, elle reçoit un appareil photo numérique alors qu’elle travaille dans un zoo et s’adonne à photographier la faune – un rapport au vivant qu’elle ne cesse d’explorer depuis. La naissance de sa fille ouvre un nouveau champ des possibles et va s’avérer déterminante pour la suite du parcours de l’artiste qui se dirige à ce moment-là naturellement vers la maternité : « j’ai commencé à donner des cours de préparation à l’accouchement et à plaider en faveur de l’accouchement centré sur la femme ». En parallèle, elle fait poser des mères – une expérience qu’elle considère comme étant une période unique et inestimable. Sa pratique, enfin, évolue jusqu’à s’ouvrir à la féminité dans son ensemble : comment représenter le corps des femmes ? Le sublimer dans toute sa diversité ?
Libérer le corps féminin
Observatrice attentive, Bec Wood se focalise sur chaque moment de grâce qui s’offre et se révèle naturellement à elle afin d’en saisir toute la beauté. Elle privilégie ainsi la pratique photographique sur le vif, pour se placer au plus proche du réel : « Je n’aime pas planifier une prise de vue à l’avance, je me laisse guider par la lumière et ce qu’elle fait, mais aussi, par tout ce qui se trouve dans l’espace et qui m’inspire à ce moment-là, ainsi que par l’énergie de la personne que je photographie », confie-t-elle. Et en tant que mère, Bec Wood s’est investie d’une mission : « celle de changer l’image de la femme et de lui donner une vision complètement différente du monde dans lequel [elle] a grandi ». Le médium lui permet d’assumer un regard singulier, de libérer le corps féminin des injonctions imposées par la société en montrant une variété de formes, de tailles, de couleurs : « je n’ai jamais vu qu’un seul type de corps dans les médias. Si on s’intéresse à l’histoire, on découvre que la morphologie idéale d’une femme change presque à chaque décennie, tout comme les idéologies. L’atteindre est une tâche impossible et un cycle vicieux pour toutes les femmes. Je veux normaliser et célébrer la beauté diverse de celles qui sont simplement elles-mêmes », raconte l’artiste. Toutefois, son travail engagé se heurte à la censure, invisibilisant grandement la cause profonde qu’elle défend : « Je cherche activement à créer un changement avec mon travail. Lorsque qu’il est montré sur les médias sociaux, il est souvent supprimé ou censuré. Il va à l’encontre des directives de la communauté concernant la représentation du corps féminin. Je pourrais facilement changer de direction en tant que photographe, mais je ne le ferai pas », affirme-t-elle. Pour Bec Wood, les femmes sont marginalisées à bien des égards et sont montées les unes contre les autres, les choses doivent radicalement évoluer. Sensible et engagé, son travail permet d’apporter sa pierre à l’édifice et à contribuer au changement.