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Baptiste Rabichon, artiste phare de la Galerie Binome, nous confronte à notre rapport ambigu aux images et à la technologie à travers Blue Screen of Death. On découvre avec lui le contexte de cette troublante série de photogrammes à travers laquelle il interroge l’omniprésence des écrans dans nos vies.
Une page d’erreur, un bug, des codes nébuleux, un écran bleu qui vacille entre deux mondes… Blue Screen of Death n’est pas sans rappeler la faille technique des premiers Windows dans les années 1980. Baptiste Rabichon s’en empare comme d’un présage : celui de l’omniprésence des écrans et de la lumière bleutée dans nos vies. Diplômé des Beaux-Arts de Paris en 2014, après des études aux Beaux-Arts de Dijon et de Lyon, l’artiste s’est très tôt interrogé sur les liens entre technologie et image. Une première exposition personnelle lui permet ensuite de présenter la série Orly au Fresnoy – Studio national des arts contemporains. C’est le point de départ d’une collaboration durable avec la galerie Binome. À la même époque, Baptiste Rabichon entame un travail sur les balcons parisiens dans le cadre de la résidence BMW. Il prend ainsi un tournant décisif pour sa reconnaissance artistique. « Ce fut un sacré coup de pouce pour le jeune photographe que j’étais », confirme-t-il. Dans Blue Screen of Death, l’image naît de deux sources : la lumière de l’agrandisseur, où ont été apposés sur le support photosensible divers objets, et l’éclat du téléphone qui, plaqué sur ce même papier, imprime son contenu visuel. En résultent des photogrammes hybrides, suspendus entre l’ombre et l’algorithme. Mais derrière l’expérimentation plastique se cache une tension bien réelle, celle du rythme effréné que le photographe doit maintenir pour garder un équilibre professionnel. « C’est une course sans fin, où la moindre pause est interdite », affirme-t-il avec lucidité.
Sonder l’image et ses limites
Ces empreintes bleutées interrogent notre regard saturé d’images, oscillant entre fascination et inquiétude. Le photographe capte ce moment de bascule où la technologie cesse d’être un simple outil et devient le compagnon de nos solitudes numériques et de nos nuits connectées. Blue Screen of Death incarne l’ambiguïté permanente de notre rapport à l’image : à la fois matière, mémoire et mirage. Baptiste Rabichon en explore les limites avec une poésie inquiète, en nous confrontant à ce qui, dans nos outils les plus familiers, garde encore une part d’ombre. Une vision qui fait écho à certaines pratiques contemporaines qu’il découvre – comme le travail de Marie Bovo –, parfois par hasard, au détour d’un écran.
Cet article est à retrouver dans Fisheye #71.