Les photographes et réalisatrices Séverine Sajous et Anna Surinyach ont réalisé le court-métrage #boza. Une collection de témoignages, construite comme un « selfie collectif », donnant la parole aux migrants qui traversent la Méditerranée.
« Nous sommes deux photographes et réalisatrices qui, depuis plusieurs années, documentent la migration sur les différents continents, chacune à notre manière »,
déclarent les autrices de #boza. L’une, Anna Surinyach, est photographe documentaire, qui a voyagé au Soudan, Nigeria, Yémen ou encore en Syrie pour documenter le quotidien des migrants. Elle se concentre aujourd’hui sur la situation des femmes migrantes, fuyant la violence, la pauvreté, et le manque d’opportunité. L’autre, Séverine Sajous, photographe, réalisatrice et linguiste, travaille en collaboration avec ses modèles pour les aider à s’exprimer. Elle cofonde, en 2015, l’association Jungleye, qui cherche à constituer une mémoire visuelle de l’exil, en donnant la parole aux migrants et réfugiés. Ensemble, elles ont réalisé #boza. Un court-métrage de 17 minutes imaginé à la première personne. Entre vidéos et selfies, les sujets – Alhassane, Aminata, Mamadou, Mariam et Yahya – se confient, se dévoilent, et tissent un récit complet de leur périple, de l’espoir d’une vie meilleure aux premiers pas dans un nouveau territoire.
Une tentative d’écoute
Dans #boza, le rapport à la photographie, au smartphone rythme l’histoire, comme il régit le quotidien des migrants. Un outil essentiel, leur permettant de dialoguer avec leurs proches, laissés derrière eux. « Dans ce court-métrage, nous interrogeons la manière dont la migration est couverte par les médias. La narration la plus commune est celle d’un migrant survivant dans des conditions extrêmes, souffrant d’un stress terrible, au bord de la frontière. Nous avons réalisé que ces images ne provoquent souvent qu’une réaction brève, vite oubliée », expliquent les réalisatrices. Pensé comme une série d’autoportraits en mouvements, #boza explore donc une nouvelle manière de mettre en image l’exil. Une représentation contemporaine, influencée par les réseaux sociaux et la technologie. « Il n’y a pas de voix off dans ce film, nous ne donnons pas une voix aux migrants. Au contraire, il s’agit plutôt d’une tentative d’écoute », ajoutent-elles.
« Pour moi, le mot boza, c’est la liberté. » « Boza, je crois que c’est un risque. » « C’est une victoire courte, positive et négative. » « Un jour, on te dit que c’est le dernier jour. Tu ne vas plus jamais vivre la vie que tu menais avant. » « Chacun donne sa définition. C’est le mot qui traverse les barrières et les frontières. » Terme crié sur les bateaux, au large de la Méditerranée, boza est synonyme de joie, de soulagement, mais aussi de craintes. Comment se reconstruire, lorsqu’on fuit sa terre natale ? Qu’est-ce que l’avenir nous réserve ? Au fil des microtémoignages, aussi bruts que sincères, le court-métrage parvient à saisir la gravité des enjeux liés à la migration. Une compilation de paroles brillant par leur authenticité.
Plus d’informations sur le court-métrage ici.
#boza © Séverine Sajous et Anna Surinyach