À Chaumont-Photo-sur-Loire 2025, la nature se révèle picturale et sculpturale 

À l'instant   •  
Écrit par Apolline Coëffet
À Chaumont-Photo-sur-Loire 2025, la nature se révèle picturale et sculpturale 
© Guillaume Barth
Surimpression d'arbres dans un jardin
© Kim Boske

Jusqu’au 22 février 2026, Chaumont-Photo-sur-Loire vous donne rendez-vous avec la nature. Pour sa 8e édition, l’événement accueille Guillaume Barth, Kim Boske, Tamás Dezsö, Vincent Fournier et Santeri Tuori. Si l’ensemble des artistes compose avec la photographie, leurs œuvres évoquent pourtant la peinture et la sculpture.

« À l’heure des images instantanées et de leur flux continu, certains artistes choisissent la patience, l’attention, le détour. Ils pointent leur objectif vers ce qui ne se donne pas d’emblée et s’attachent à une lumière qui s’immisce, un souffle qui traverse, une mémoire qui affleure. Pour eux, la nature n’est ni décor, ni sujet, elle est la partenaire d’un dialogue sensible », déclare Chantal Colleu-Dumond. Chaque année, la commissaire d’exposition de Chaumont-Photo-sur-Loire sélectionne avec soin les photographes qui investissent le domaine pour la saison froide. Pour cette 8e édition, toutes et tous ont en commun d’avoir une pratique qui renvoie à d’autres disciplines plastiques.

En superposant différentes strates de temps, Kim Boske recompose des univers végétaux à la manière de peintures. Des fleurs aux contours flous en surgissent comme autant de motifs abstraits et colorés. « Il s’agit de ce que l’on retient de l’expérience du jardin », confie-t-elle avec un sourire. Dans un autre genre, avec Tout se met à flotter, Tamás Dezsö joue également avec les accumulations d’éléments qui peuplent ces espaces naturels afin de bousculer nos repères. Les nuances de vert disparaissent presque de ses tirages, consacrés aux quatre saisons, au profit des violets, des rouges, du noir et du blanc. Les clichés nébuleux de Sky, signé Santeri Tuori, évoquent, quant à eux, les toiles romantiques du XIXe siècle. Ici, le ciel devient matière picturale.

Les plantes d'un jardin dont les couleurs ont été modifiées
© Tamás Dezsö
Des nuages qui ressemblent à une peinture romantique
© Santeri Tuori
Une plante inventée à partir d'une véritable fleur
© Vincent Fournier, courtesy Galerie Rabouan Moussion

Enjeu géopolitique et uchronie

À travers leurs images, d’autres artistes font plutôt allusion à la sculpture. C’est notamment le cas de Guillaume Barth qui a, par ailleurs, réalisé un véritable édifice en sel, semblable à un igloo, au cœur du Salar d’Uyuni, dans les hautes terres boliviennes, pour sa série Elina« Là-bas, quand les premières pluies tombent, le désert devient le plus grand miroir naturel au monde », explique-t-il. Dès lors, grâce à son reflet, la demi-sphère retrouve sa moitié et se transforme en un astre. Convoquant la mémoire d’une culture ancestrale, son œuvre poétique alerte toutefois sur un enjeu géopolitique majeur de la région. De fait, le lac recouvre des réserves de lithium. L’extraction de ce métal blanc, nécessaire aux batteries, voue ce paysage si singulier à une disparition certaine qui interpelle l’auteur : « Qu’est-ce qu’une transition écologique au détriment de traditions millénaires ? »

Avec Flora Incognita, Vincent Fournier préfère se tourner vers l’avenir d’un autre univers. Son projet s’impose comme une uchronie ou, autrement dit, une reconstruction fictive de notre monde. À cet effet, le photographe a collaboré avec des scientifiques pour imaginer des végétaux qui pourraient pousser sur des exoplanètes. À partir de fleurs bien réelles et d’un logiciel de photogrammétrie, il propose un bouquet de 27 espèces aux couleurs vives et aux courbes étonnantes. « Plus un milieu est contraint, plus il va développer un inventaire de formes », souligne-t-il. En fin de compte, si Chaumont-Photo-sur-Loire apparaît comme un écrin de sérénité hors du temps, bien loin de l’agitation quotidienne, il stimule toujours des réflexions sur l’environnement. 

À lire aussi
Chaumont-Photo-sur-Loire, une 7ᵉ édition où la  poésie tutoie l'engagement écologique
Décolorisation, 2024 © Letizia Le Fur, courtesy Galerie Julie Caredda – Paris
Chaumont-Photo-sur-Loire, une 7ᵉ édition où la poésie tutoie l’engagement écologique
Sur les bords de Loire, dans l’idyllique domaine du château de Chaumont-sur-Loire, se sont installées cinq expositions qui célèbrent la…
23 novembre 2024   •  
Écrit par Marie Baranger
Légendes et extractivisme : Maximiliano Tineo et le mythe du roi blanc
© Maximiliano Tineo
Légendes et extractivisme : Maximiliano Tineo et le mythe du roi blanc
Dans El Rey Blanco, Maximiliano Tineo entremêle mythes, légendes et faits historiques pour évoquer la situation au sein du triangle du…
18 septembre 2024   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Explorez
La précieuse fragilité selon le festival FLOW#1
Les Fossiles du futur, Synesthésies océaniques © Laure Winants, Fondation Tara Océan
La précieuse fragilité selon le festival FLOW#1
Du 20 septembre au 30 octobre 2025 s’est tenue la première édition de FLOW, un parcours culturel ambitieux imaginé par The Eyes...
13 novembre 2025   •  
Écrit par Fabrice Laroche
Une fable collective au cœur du béton, par Alexandre Silberman
© Alexandre Silberman, Nature
Une fable collective au cœur du béton, par Alexandre Silberman
Exposée à la galerie Madé, dans le cadre de PhotoSaintGermain, jusqu’au 30 novembre 2025, la série NATURE d'Alexandre Silberman...
12 novembre 2025   •  
Écrit par Milena III
Laura Lafon Cadilhac : s'indigner sur les cendres de l'été
Red Is Over My Lover. Not Anymore Mi Amor © Laura Lafon Cadilhac
Laura Lafon Cadilhac : s’indigner sur les cendres de l’été
Publié chez Saetta Books, Red Is Over My Lover. Not Anymore Mi Amor de Laura Lafon Cadilhac révèle un été interminable. L’ouvrage se veut...
07 novembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Écofemmes Fest : un rendez-vous pour créer, lutter, transmettre
Trenza, le lien qui nous unit, 2025 ©Gabriela Larrea Almeida
Écofemmes Fest : un rendez-vous pour créer, lutter, transmettre
Jusqu'au 9 novembre prochain, La Caserne, dans le 10e arrondissement de Paris, accueille la première édition d’Écofemmes Fest, un...
07 novembre 2025   •  
Écrit par Cassandre Thomas
Nos derniers articles
Voir tous les articles
À Chaumont-Photo-sur-Loire 2025, la nature se révèle picturale et sculpturale 
© Guillaume Barth
À Chaumont-Photo-sur-Loire 2025, la nature se révèle picturale et sculpturale 
Jusqu’au 22 février 2026, Chaumont-Photo-sur-Loire vous donne rendez-vous avec la nature. Pour sa 8e édition, l’événement accueille...
À l'instant   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Éternel été, mémoire et masculinité : nos coups de cœur photo de novembre 2025
Red Is Over My Lover. Not Anymore Mi Amor © Laura Lafon
Éternel été, mémoire et masculinité : nos coups de cœur photo de novembre 2025
Expositions, immersion dans une série, anecdotes, vidéos… Chaque mois, la rédaction de Fisheye revient sur les actualités photo qui l’ont...
Il y a 5 heures   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Mouche Books édite son premier livre photo-poésie Selfportraits
© Lena Kunz
Mouche Books édite son premier livre photo-poésie Selfportraits
La revue Mouche, qui fait dialoguer le 8e art avec la poésie depuis quatre ans, lance sa maison d’édition Mouche Books avec comme premier...
27 novembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Victor Gassmann : « Je crois en la matière »
Affiche Pictorial Service rue de la Comete 1950 © Archives Picto
Victor Gassmann : « Je crois en la matière »
Arrière-petit-fils de Pierre Gassmann, Victor Gassmann veille sur l’héritage de Picto, laboratoire emblématique qui a façonné le tirage...
27 novembre 2025   •  
Écrit par Fabrice Laroche