« Quelques jours avant, elle apprend par d’autres que son agresseur est sorti de prison. Choc. Le gymnase et les lieux alentour réveillent en elle des souvenirs douloureux. »
92 pages
35 €
Nathalie Champagne signe sa première publication aux éditions Photopaper. Figures imposées, figures libres retrace le parcours de Ludivine, championne de France de patinage qui a été agressée sexuellement par son ancien entraîneur. Pour la sortie de son livre, la photographe revient sur une image au message puissant, celui de la résilience.
Ludivine Malle, athlète de roller artistique, plusieurs fois championne de France et habituée des rencontres internationales, a pendant plusieurs années été agressée sexuellement par son ex-entraîneur. Condamné à rester derrière les barreaux pour treize ans à la suite d’un procès en 2018, il sort pourtant de prison quelques jours avant la dernière compétition de la jeune femme, en 2022. « Nathalie [Champagne] a réussi à convaincre Ludivine de la suivre pendant sa fin de carrière mais en réalité les images racontent bien plus que cela. Elles témoignent d’un corps en transition, qui a tout sacrifié au sport à la recherche du geste parfait et qui se relève, se reconstruit », écrit Sylvie Hugues en préface du livre Figures imposées, figures libres. Cet ouvrage est un poignant hommage à Ludivine, qui a su déployer sa force après le traumatisme des violences sexuelles. Par ailleurs, il cherche à répondre aux questions que se pose la photographe : « Comment le monde du sport, théâtre de ces tragédies, peut-il servir de catalyseur vers la résilience ? Quel sens revêt une dernière saison sportive dans le contexte de ce passé ? Comment aller au-delà de l’histoire personnelle de Ludivine pour découvrir qui elle est réellement ? Et comment son parcours peut-il inspirer d’autres femmes ? »
Un dernier titre
« Nous sommes en juillet 2022, à Reims. Ludivine participe aux derniers championnats de France de sa carrière. Depuis son enfance, elle a enchaîné les titres nationaux, année après année. Mais cette fois, la préparation a été difficile : blessures à répétition, fatigue, perte de sensations sur les triples sauts… Quelques jours avant, elle apprend par d’autres que son agresseur est sorti de prison. Choc. Le gymnase et les lieux alentour réveillent en elle des souvenirs douloureux. Toute sa famille est présente pour ces derniers moments sur les pistes françaises. Et même si elle sait qu’elle n’a plus rien à prouver, elle refuse de se décevoir.
À ce moment-là, je la suis depuis environ quatre mois. Cette compétition marque un tournant dans notre relation. Je lui confie que je ressens presque physiquement une bulle protectrice autour d’elle, comme une barrière invisible qui me maintient à distance. C’est intense, presque palpable. Nous en parlons. Elle me dit que d’autres l’ont déjà remarqué. Peu à peu, nous nous apprivoisons. Le programme court s’est tenu deux jours plus tôt. Reste le programme long : 4 minutes 30 de musique espagnole, rythmées de sauts, pirouettes et arabesques. Des difficultés techniques à exécuter avec fluidité, beauté et émotion, afin de toucher le public… et les juges bien sûr. Dans le couloir sombre qui mène à la piste, Ludivine fait de nombreux allers-retours. Attente. Concentration. Gestion du stress et de l’adrénaline. La tension monte. C’est l’instant d’avant. Les notes de la patineuse qui la précède résonnent. Un dernier regard vers Guillaume, son coach. Puis, elle s’élance dans l’arène.
Le 3 juillet 2022, Ludivine décroche son 11e et ultime titre de championne de France. »