Le Festival Photo La Gacilly et Fisheye viennent de révéler les noms des trois lauréats du Prix Nouvelles Écritures de la Photographie Environnementale : Chloé Azzopardi, Alisa Martynova et Maxime Taillez. Lumière sur les projets de ces trois artistes qui, chacun à leur manière, rendent compte des changements sociétaux actuels.
Il y a une semaine, le Festival Photo La Gacilly et Fisheye se réunissaient pour désigner les présélectionné·e·s de l’édition 2022 du Prix Nouvelles Écritures de la Photographie Environnementale. Comme son nom l’indique, cette récompense vise à soutenir les talents émergents qui font de l’écologie leur cheval de bataille. Approches documentaires, projets expérimentaux ou styles journalistiques… Ainsi les quinze finalistes ont-ils su se démarquer dans leur façon d’appréhender les enjeux climatiques qui nous sont contemporains. Mais les membres du jury – composé de Stéphanie Retière-Secret, directrice du Festival Photo La Gacilly, Cyril Drouhet, commissaire d’exposition du Festival et rédacteur en chef photo du Figaro Magazine, Bastien Duval, coordinateur du Prix, Téo Bécher, lauréat de l’édition 2017, Salomé d’Ornanon, directrice de la Fisheye Gallery, et Anaïs Viand et Éric Karsenty, respectivement rédactrice et rédacteur en chef des versions web et papier de Fisheye – se sont accordés sur trois auteurs…
Qui ne sont autres que Chloé Azzopardi, Alisa Martynova et Maxime Taillez ! Tous trois seront exposés au cours des prochaines manifestations du festival La Gacilly tandis que la Fisheye Gallery les accompagnera dans l’intégration au marché de l’art. Mais sans plus tarder, découvrez Écosystèmes, Nowhere Near et Frontières. Ou autrement dit, trois séries qui, sur un ton optimiste ou plus alarmiste, soulèvent avec justesse des problématiques actuelles.
Chloé Azzopardi
Une infinité de poissons qui nagent dans une étendue d’eau claire, des arbres, des insectes qui évoluent sereinement au contact d’individus, des fleurs. C’est cet Écosystème harmonieux qui inspire Chloé Azzopardi. La photographe célèbre ainsi un univers où il fait bon vivre, comme pour nous confirmer que nature et civilisation ne sont pas incompatibles. « Pendant longtemps la philosophie occidentale a tout fait pour distinguer l’humain de l’animal, la nature de la culture au point de penser l’humain en dehors de la sphère du vivant », rappelle la photographe. Aussi les êtres de toutes espèces semblent-ils fusionner dans sa série. Les escargots se meuvent le long de jambes suspendues, pareilles à des branches, quand ce n’est pas un champignon qui pousse sous une aisselle. Le regard se voit substitué à un large morceau d’écorce circulaire, et nous démontre alors avec optimisme que l’humain appartient bel et bien à cette faune et cette flore qu’il détruit pourtant avec ardeur.
© Chloé Azzopardi
Alisa Martynova
Oscillant entre un rouge sanguin et un bleu froid, la palette de couleurs d’Alisa Martynova suscite l’urgence et l’effroi. Dans sa série Nowhere Near, ses sujets semblent esseulés dans des paysages nébuleux, très loin du confort d’un espace apaisé. Car au travers de ses images, l’artiste russe dépeint le long voyage de celles et ceux qui cherchent à fuir leur lieux de vie. En quête d’un Eldorado incertain, libyen ou européen, elle compare ainsi ces migrants à des « étoiles éparpillées ». « Le voyage du migrant est long, nuit après nuit, se rapprochant de l’horizon comme des constellations. Ce ne sont pas des étoiles ordinaires, ce sont des étoiles à haute vitesse, éjectées à l’hyper vitesse par des trous noirs, saupoudrées dans le cosmos par la force de leur propulsion », explique-t-elle. Une manière poétique de déjouer les stéréotypes pour mieux interroger notre rapport à l’autre et à la terre. Celle que l’on habite ou que l’on quitte. Celle qui nous rejette brutalement ou que l’on investit de force, toujours dans le même fracas.
© Alisa Martynova
Maxime Taillez
Limite physique ou naturelle qui sépare des États. Bon nombre d’entre nous définiraient le terme « frontière » de cette façon. Or, l’avènement de la mondialisation et de l’espace Schengen tendent à les annihiler. Dans son bien nommé projet, Maxime Taillez propose ainsi d’en esquisser de nouveaux contours, bien plus proches de la réalité. Car le photographe a grandi aux confins de la France, à quelques pas de la Belgique. Si bien que pour lui, cette séparation lui semble inexistante : « Pour moi, les espaces frontaliers correspondent moins à une délimitation concrète qu’à une géographie personnelle. » Elle témoigne alors de la haute portée symbolique de cet espace d’échange. Un endroit que chacun définira à sa façon, selon son histoire personnelle ou familiale, selon sa perception du monde ou de sa terre natale. Cette série nous invite finalement à porter un regard différent sur le territoire alentour, à en sonder les extrémités dans ses moindres aspects.
© Maxime Taillez
Image d’ouverture © Chloé Azzopardi