Enveloppes corporelles

22 juillet 2020   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Enveloppes corporelles

L’artiste franco-britannique Mahaut Harley réalise des collages délicats composés d’images d’anciens magazines de charme et transforme la « femme-objet » en une femme libre.

« Je suis une collectionneuse. Je collectionne les magazines, les livres, les papiers… Tout ce qui peut m’être utile. Et puis, je creuse. Je ne cherche rien de spécifique, je me fie simplement à mon instinct pour créer un bazar créatif qui se transforme ensuite en un collage délicat »

, raconte Mahaut Harley. L’artiste franco-britannique s’est d’abord intéressée à la peinture, avant de se tourner vers le collage. Passionnée par l’iconographie vintage, elle fouille dans des archives d’une autre époque pour réaliser des œuvres contemporaines et féministes. « J’aime cette idée de recycler une image en lui donnant une nouvelle signification. On m’a un jour dit que mon travail s’apparentait à un DJ qui remixerait des vinyles, j’ai trouvé cela très poétique », précise-t-elle. Surréalistes et raffinés, ses collages jouent avec les corps féminins et les matières – ses œuvres prennent souvent vie sur des enveloppes – et nous invitent à nous interroger : la nudité est-elle vraiment synonyme de désir ?

© Mahaut Harley© Mahaut Harley

Reprendre possession de nos corps

Confrontée à des études de nu durant ses cours de dessin, Mahaut Harley réalise rapidement qu’elle ne perçoit pas le corps et la sexualité comme la plupart des gens. Intriguée, elle mène l’enquête, à travers ses créations, et déconstruit les courbes sexualisées des magazines de charme. « Nous vivons dans un monde où tout est tabou. Les tétons sont censurés, et notre sexualité fait partie de la sphère privée. Or selon moi, on ne peut être nous-mêmes qu’en étant complètement nus. Pourquoi en faire toute une histoire ? » s’amuse-t-elle. En contrepoint, l’artiste fait de ses collages des images engagées, et se révolte contre l’image – toujours plus vulgaire – de la femme. « Je souhaite reprendre possession de nos corps, en les révélant de manière subtile. Je proteste contre l’objectification à outrance, car je crois en la poésie, le romantisme et le mystère », confie Mahaut Harley.

Avec une pointe d’ironie, l’auteure détourne l’iconographie pornographique en découpant les corps des pages libidineuses. Sur ses enveloppes, les silhouettes féminines deviennent gracieuses, délicates, la transparence et l’opacité du papier jouant avec la pudeur, cachant et dévoilant certains détails. Si cette industrie sexiste est sa première source d’inspiration, l’artiste souhaite aujourd’hui rendre son travail plus universel. « Je veux réaliser des œuvres qui parlent à tout le monde. Je ne souhaite pas promouvoir un seul type de corps, mais créer des collages qui représentent toutes les femmes », conclut-elle. Une initiative aussi engagée qu’élégante.

 

© Mahaut Harley© Mahaut Harley

 

© Mahaut Harley© Mahaut Harley

 

 

© Mahaut Harley© Mahaut Harley

 

© Mahaut Harley

 

© Mahaut Harley© Mahaut Harley

 

© Mahaut Harley

© Mahaut Harley

Explorez
Les images de la semaine du 26 mai 2025 : un autre regard sur le monde
Made in Hong Kong, de la série Huá biàn © Agathe Veidt
Les images de la semaine du 26 mai 2025 : un autre regard sur le monde
C’est l’heure du récap ! Cette semaine, les pages de Fisheye rendent hommage à Sebastião Salgado, évoquent le deuil, les déchets des...
01 juin 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Sidewalk Stills, les déchets des marchés de Charles Negre
Sidewalk Stills © Charles Negre
Sidewalk Stills, les déchets des marchés de Charles Negre
Dans Sidewalk Stills, le photographe français Charles Negre offre un regard sensible sur les déchets qui parsèment les sols des marchés...
29 mai 2025   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Thomas Paquet : « imposer une économie de gestes »
© Thomas Paquet. Vignettage
Thomas Paquet : « imposer une économie de gestes »
À l’occasion du Paris Gallery Weekend, la Galerie Thierry Bigaignon présente, jusqu’au 31 mai 2025, une exposition personnelle de...
29 mai 2025   •  
Écrit par Fabrice Laroche
instax Wide Evo™ : l’alchimie instantanée selon Mathias Benguigui et Jonathan Bertin
© Jonathan Bertin
instax Wide Evo™ : l’alchimie instantanée selon Mathias Benguigui et Jonathan Bertin
Avec son nouveau boîtier instantané, instax™ de Fujifilm propose une promesse audacieuse : faire de chaque cliché un chef-d’œuvre. Afin...
28 mai 2025   •  
Écrit par Cassandre Thomas
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Les coups de cœur #545 : Rose Guiheux et Maksim Semionov
Melvin and Milan's room, 2024 © Rose Guiheux
Les coups de cœur #545 : Rose Guiheux et Maksim Semionov
Rose Guiheux et Maksim Semionov, nos coups de cœur de la semaine, explorent l’individu dans son rapport à l’autre et à l’espace. Abordant...
Il y a 2 heures   •  
Écrit par Lucie Donzelot
Les images de la semaine du 26 mai 2025 : un autre regard sur le monde
Made in Hong Kong, de la série Huá biàn © Agathe Veidt
Les images de la semaine du 26 mai 2025 : un autre regard sur le monde
C’est l’heure du récap ! Cette semaine, les pages de Fisheye rendent hommage à Sebastião Salgado, évoquent le deuil, les déchets des...
01 juin 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Les yeux dans les yeux, portraits de la collection Pinault
© Annie Leibovitz
Les yeux dans les yeux, portraits de la collection Pinault
À l’occasion de la cinquième édition d’Exporama, la Collection Pinault fait halte à Rennes avec une exposition magistrale sur le...
31 mai 2025   •  
Écrit par Costanza Spina
Le  7 à 9 de CHANEL, les visages pluriels d’Omar Victor Diop
© Omar Victor Diop
Le 7 à 9 de CHANEL, les visages pluriels d’Omar Victor Diop
Troisième invité du cycle "Le 7 à 9 de CHANEL", le photographe sénégalais Omar Victor Diop a offert au public du Jeu de Paume un moment...
30 mai 2025   •  
Écrit par Cassandre Thomas