Humberto Rivas, œuvre au noir

23 novembre 2018   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Humberto Rivas, œuvre au noir

Jusqu’au 5 janvier, la Fondation Mapfre consacre une grande rétrospective à Humberto Rivas. Une occasion de découvrir un portraitiste méconnu en France. Un article signé Sylvie Hugues.

À Madrid, la Fundación Mapfre est le seul lieu à montrer de la photographie toute l’année. Elle a ainsi vu dernièrement se succéder les expositions consacrées aux maîtres Garry Winogrand, Paul Strand, Sugimoto ou Brassaï. La rétrospective Humberto Rivas peut donc intriguer… Qui est donc Humberto Rivas ? Serait-on passé en France à côté d’un grand artiste?

Photographe publicitaire en Argentine, où il est né en 1937, Humberto Rivas fuit le coup d’État militaire imminent pour se réfugier à Barcelone en 1976. Franco est mort quelques mois auparavant et l’Espagne vit une véritable période de bouillonnement culturel. Humberto Rivas s’y mêle, participant au lancement de la Primavera Fotogràfica en 1982, exposant à plusieurs reprises chez Spectrum, une galerie historique de Barcelone, et surtout, expérimentant dans un domaine en particulier : le portrait.

Magnifier le banal

Il porte son regard sur des marginaux, tels que Violeta la Burra, un travesti posant tantôt torse nu devant son objectif, tantôt en compagnie de sa mère et d’une tête de mort. Il y a aussi Luci, qu’il va « crucifier » par le truchement d’un montage de tirages photographiques en forme de croix. Étranges, ses photographies marquent ses contemporains et ses élèves – il enseignera la photographie jusqu’à la fin des années 1990. Humberto Rivas ne cherche pas l’instant décisif, la majeure partie de son travail se déroule dans son studio. Et lorsqu’il sort sa chambre grand format, c’est pour photographier des façades, des bâtiments sans importance endormis dans la lueur de l’aube. Il cherche à magnifier le banal par ses somptueux tirages noir et blanc. Dans les années 1980, le Cibachrome – ce procédé de tirage photographique couleur réalisé depuis un film inversible – atteint l’Espagne. Rivas, qui effectue ses propres tirages, se met à la couleur pendant quelques années et il photographie des coins de rue, seulement des coins de rue… là où d’autres seraient partis cueillir les couleurs éclatantes des fleurs ou des bords de mer Méditerranée.

Souvent surnommé « el Cazador de ausencias » (« le Chasseur d’absences»), Rivas est inclassable, surprenant, inattendu et c’est bien ce que révèle cette rétrospective, qui reprend par ordre chronologique quarante années de photographie, depuis Norte, sa première série réalisée dans les années 1960 en Argentine, jusqu’aux dernières vues urbaines du début des années 2000. Plus de quinze ans après sa mort, c’est un présent que nous fait la Fondation Mapfre en nous permettant de le découvrir enfin.

© Humberto Rivas / Collection Fundacion MAPFRE © Humberto Rivas / Collection Fundacion MAPFRE

© Humberto Rivas / Collection Fundacion MAPFRE© Humberto Rivas / Collection Fundacion MAPFRE
COLECTIANA R461
© Humberto Rivas / Collection Fundacion MAPFRE© Humberto Rivas / Collection Fundacion MAPFRE

© Humberto Rivas / Collection Fundacion MAPFRE

Explorez
Flore Prébay : De deuil et de papier
Iceberg, de la série Deuil blanc © Flore Prébay
Flore Prébay : De deuil et de papier
Du 16 octobre au 30 novembre 2025, la Fisheye Gallery présente Deuil blanc, de Flore Prébay, dans le cadre des Rencontres photographiques...
09 octobre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Polaraki : une collection de polaroids d'Araki sort d'un appartement parisien
Sans titre, Araki Nobuyoshi 1990 -2024 © Nobuyoshi Araki © Musée Guimet, Paris, Nicolas Fussler
Polaraki : une collection de polaroids d’Araki sort d’un appartement parisien
Jusqu'au 12 janvier 2026, le musée des arts asiatiques - Guimet accueille une collection foisonnant de polaroids, issue de l’œuvre du...
06 octobre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Les coups de cœur #561 : Julie Brochard et Anna Prudhomme
© Anna Prudhomme
Les coups de cœur #561 : Julie Brochard et Anna Prudhomme
Julie Brochard et Anna Prudhomme, nos coups de cœur de la semaine, ont puisé l’inspiration dans la maison de leurs grands-parents. La...
06 octobre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Grace Land : Nick Prideaux transcrit son expérience de la perte
© Nick Prideaux
Grace Land : Nick Prideaux transcrit son expérience de la perte
Dans le cadre d’une résidence artistique à la Maison de la Chapelle, au cœur de la Provence, Nick Prideaux a imaginé Grace Land. À...
04 octobre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Jeu de Paume : Luc Delahaye, le monde en suspens
© Luc Delahaye
Jeu de Paume : Luc Delahaye, le monde en suspens
Luc Delahaye, ancien grand reporter devenu artiste, transforme le regard documentaire en une méditation silencieuse sur le monde. De ses...
Il y a 11 heures   •  
Écrit par Costanza Spina
Voyage au centre de la terre brésilienne
Périphérie de São Paulo, 2020 @Vincent Catala
Voyage au centre de la terre brésilienne
Comment représenter un pays de façon juste et nuancée, loin des clichés véhiculés autour de ce dernier ? L’impressionnant Île-Brésil de...
10 octobre 2025   •  
Écrit par Lucie Donzelot
Prix Photographie & Sciences : Julien Lombardi et Richard Pak exposent à la Villa Pérochon
Inframundo, de la série Planeta, 2024 © Julien Lombardi
Prix Photographie & Sciences : Julien Lombardi et Richard Pak exposent à la Villa Pérochon
Du 11 octobre 2025 au 21 février 2026, la Villa Pérochon devient théâtre de sciences, présentant les travaux de Julien Lombardi, lauréat...
10 octobre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
15 séries qui célèbrent l'automne
15 séries qui célèbrent l’automne
Le soleil se fait de plus en plus discret, les feuilles commencent doucement à changer de couleur, quitter sa couette le matin se fait de...
09 octobre 2025   •  
Écrit par Fisheye Magazine