La rédaction de Fisheye a déambulé dans les rues idylliques du village de Cadaqués, en Espagne, à l’occasion du Festival Photo InCadaqués. Au gré de ses pérégrinations, elle vous a déniché quelques pépites visuelles à découvrir jusqu’au 26 octobre 2025.
Valentina Sinis – Església de Santa Maria
Dans l’église de Cadaqués, surplombant la baie bleue dans un bain de soleil, se déploie, en toute intimité, le travail sensible de Valentina Sinis. Lauréate de l’Open Call 2025 du festival InCadaqués, la photographe italienne a documenté avec délicatesse le quotidien des Afghanes, suspendu entre la répression des talibans et la recherche de liberté. Dans sa série Were Afghan Women to Unveil Their Tales, Valentina Sinis capte en douceur la résistance dans les gestes, dans l’apprentissage et dans les paysages. Si ses images sont exposées dans la pénombre de la salle de médiation de l’église, elles mettent en lumière la force inébranlable de ces femmes et de ces filles.
Marie Baranger
Antoine de Winter – Galeria Patrick J. Domken
À la Galeria Patrick J. Domken, Antoine de Winter présente des œuvres tout en textures, réalisées à partir de procédés anciens. Pour découvrir Tous les lieux et ceux entre eux, il nous faut d’abord franchir une barrière d’images sur des voilages suspendus dans des nuances d’orange et d’indigo. Nous distinguons ensuite d’autres paysages, révélés cette fois-ci sur des plaques de verre tantôt translucides, tantôt en miroir. Là encore, il s’agit de bords de mer ou de forêts, d’espaces naturels qui inspirent la sérénité et semblent sortis d’un songe ou d’une réminiscence. Parfois, une silhouette surgit du décor. L’or, quant à lui, est omniprésent. Il rappelle une époque fabuleuse ou un temps révolu. Tous ces éléments s’imposent finalement comme les couches successives d’une mémoire d’un territoire dont l’artiste dresse une « topographie sensible : celle d’un lieu qui perdure, non pas sur la carte, mais dans la mémoire vivante qui l’habite », souligne-t-il dans son texte de présentation.
Apolline Coëffet
Emilia Martin – Galeria Anne G
Dans une petite rue, derrière une porte de verre en arc vouté, un récit visuel se tisse. Les images, le fil et l’étoffe s’entremêlent dans la série Hail Mary, bobbin lace, serpent’s thread de la photographe polonaise Emilia Martin. S’inspirant des mots d’écrivaines comme Virginia Woolf ou Colette et puisant dans l’histoire de sa grand-mère ouvrière, l’artiste renoue avec une mémoire et des gestes perdus dans le temps. Il est question de femmes, de transmission et surtout de force dans l’installation qu’elle propose, où les époques et les matières se superposent.
Marie Baranger
Sander Vos – Galeria Iturria
Parmi les finalistes de l’Open Call InCadaqués 2025 se compte notamment Sander Vos, qui signe des portraits abstraits dans des teintes de noir et de crème rappelant les éditoriaux d’anciens magazines de mode. Dans les compositions de l’artiste, le visage et les mains du modèle, quoique contrastés, restent fidèles à la réalité tandis que les contours de son corps se transforment en des lignes courbes. Ses bras, son cou, son torse se scindent alors en des formes géométriques qui se confondent avec le fond de l’image. Le regard s’attarde sur les motifs de ces collages réinventés et la beauté apparaît autrement, par fragments graphiques.
Apolline Coëffet
Cloé Harent – Galeria Santa Rita
L’année dernière, Cloé Harent a remporté le grand prix Tremplin jeunes talents de Planches Contact. Sa dotation comprenait une résidence à Cadaqués permettant d’exposer lors du festival accueilli chaque année par le village catalan. Au sein de la galerie Santa Rita, sous laquelle passe une rivière invisible, se dévoile ainsi le fruit de son séjour sur place. Sur les murs, estrans, coquillages, roches immergées, écailles et succulentes s’assemblent selon leurs nuances – allant des bleus aux verts, en passant par les jaunes –, toujours nimbées de soleil. De cette façon, comme à son habitude, la jeune artiste invite celui ou celle qui regarde à prendre le temps d’apprécier un monde alentour qui regorge de trésors.
Apolline Coëffet
J. A. Young – Galeria Iturria
Dans un coin de l’exposition dédiée aux finalistes de l’Open Call InCadaqués 2025, une image interpelle. Des teintes de gris et de blanc dessinent les contours d’un homme aux yeux bandés. Cette image est entourée de deux autres, dans lesquels une fumée et du bois brisé brouillent les pistes. Elles sont signées J.A. Young, artiste trans et autiste, installée au sud des États-Unis. Dans cette série, intitulée ANGELS, elle expérimente le médium photographique – croisant archives et clichés personnels, altérant les cadres, jouant avec la distorsion – et compose « une critique des entreprises, des États et des institutions religieuses », précise-t-elle, où une sorte de magie opère.
Marie Baranger