Itinérance. Tel est le thème de la 7e édition de la saison photographique de l’Abbaye Royale de l’Épau. Dix-sept photographes ont abordé cette notion ô combien vaste. En vacances vers le Mans ? Une halte s’impose et Fisheye vous trace l’itinéraire.
Au portes du Mans, l’Abbaye Royale de l’Épau propose un parcours photographique en intérieur et en extérieur. Errance, mobilité forcée ou voyages ? 17 expositions traitent de ce thème au large périmètre. Focus sur cinq photographes.
Démarrez votre périple avec le photographe mexicain Alejandro Cartagena et ses picks-ups colorés. Avec Carpoolers – une série ou plutôt un système – il donne à voir le quotidien de milliers d’ouvriers mexicains contraints de faire des allers-retours entre leurs lieux de vie et leurs lieux de travail. Un dispositif permettant de s’interroger quant aux conditions sociales et sociétales de ces nomades forcés.
La migration est abordée d’une façon plus classique dans l’œuvre de Dorothea Lange. Au sortir de la Grande Dépression, entre 1935 et 1941, la photographe américaine a décrit la situation de migrants ayant quitté le Middle West pour la Californie. Sécheresse, problèmes économiques… les photos de Dorothea Lange témoignent de la détresse des laissés pour compte du rêve américain. Si l’on connaît déjà le travail de la photographe, certaines images sont exposées pour la première fois en France, à l’occasion du Récit de la migration. Sébastien Tixier nous fait quant à lui voyager des plaines moscovites aux steppes en bordure mongole, à bord du Transsibérien. « Je me suis intéressé à ces paysages et aux vies qui les traversent », confie le photographe français. Militaires, salariés, retraités, travailleurs ou vacanciers… les 146 heures de train et quelques verres de vodka ont permis au photographe de réaliser de belles rencontres. Plus qu’un carnet de voyage, 9288 s’impose comme un récit de vie.
© Sébastien Tixier
Notre monde de plus en plus déshumanisé
Pause ensuite au sein de la Dystopia développée par Alexia Brunet. Reportages ou mises en scène ? La frontière est floue dans le travail de la photographe française militante. Dystopia est le fruit d’une collaboration entre Alexia Brunet et un journaliste paysan Patrick Herman. Ils livrent ensemble une approche anticipative surprenante et dénoncent les effets du capitalisme sur le secteur agroalimentaire. Parmi les quinze thématiques développées par les deux auteurs, le visiteur pourra réfléchir sur la question de la diminution des terres exploitables, de l’industrialisation des cultures ou encore des expérimentations animales. Une image représentant une « vache hublot » fait notamment froid dans le dos. Si la fiction est ici un prétexte pour aborder les dérives de notre système, elle permet de pointer notre monde de plus en plus déshumanisé.
Le second sujet engagé est signé Matjaž Krivic. Quel est le point commun entre une voiture, un téléphone et un robot ? Ces trois objets sont alimentés par batterie et sont donc composés de lithium. Le photographe slovène a emprunté la route du lithium, des États-Unis, haut lieu d’investissements et de prospections, en passant par la Bolivie (extraction minière), jusqu’à la Norvège qui développe une politique du « tout électrique ». Il documente ainsi les conséquences géostratégiques, humaines et environnementales majeures du métal alcalin. Celui-ci entrainera une révolution industrielle ou sera la cause de la prochaine crise écologique majeure ? Avec La route du lithium – La force motrice du XXI siècle, Matjaž Krivic témoigne d’une chose : le lithium transforme déjà nos sociétés.
Jusqu’au 3 novembre 2019.
ABBAYE ROYALE DE L’ÉPAU
Route de Changé – 72530 YVRÉ L’ÉVÊQUE (G.P.S. 47.99065 – 0.240546)
Plus d’informations :https://epau.sarthe.fr/photographie
© Alejandro Cartagena
© Dorothea Lange / The Dorothea Lange Collection, Courtesy of The Oakland Museum of California
© Alexa Brunet
© Matjaz Krivic
Image d’ouverture © Matjaz Krivic