Dans l’œil de Jonathan Chandi : un clip dans un monde parallèle

11 août 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Dans l'œil de Jonathan Chandi : un clip dans un monde parallèle
© Jonathan Chandi
JonathanChandi
Photographe
« Ce n’est pas une copie du clip, mais plutôt une réponse, une prolongation. Comme si l’on entrait dans l’état mental qu’il provoque, comme si on le regardait les yeux fermés.  »

Aujourd’hui, plongée dans l’œil de Jonathan Chandi, photographe autodidacte belge. L’artiste réinterprète avec une grande délicatesse et une vision novatrice des clips musicaux depuis sa campagne natale. Ici, il revisite, dans un camaïeu de bleu dilué, Hundred Reasons, du rappeur sud-coréen HAON et nous baigne dans les méandres mentaux des sentiments qui se jouent dans la vidéo originelle.

Tout est parti d’un défi initié par @cquoilesbaye en 2024 : le Netflix Art Challenge. L’objectif était de réinterpréter un film de manière visuelle dans un délai imparti. « Cela nous a stimulés, remis dans une ambiance d’exploration libre, sans pression », soutient Jonathan Chandi, photographe autodidacte qui s’est formé durant le confinement, et qui aujourd’hui vit de son art. Inspiré par ce concept créatif, il décide de se l’approprier en y incorporant sa propre touche : réinterpréter les clips, les défilés ou les campagnes de mode. « J’en ai fait un format régulier sur ma page Instagram, une sorte de laboratoire visuel où je teste des idées, des atmosphères, des directions artistiques. À chaque fois, je pars d’un détail, d’un plan ou d’un son qui me parle, puis je déconstruis, je transforme, je réinvente », explique-t-il. S’affranchissant des règles, il expérimente à la retouche, jouant sur les déformations, les textures, les effets, la lumière ou les couleurs, et dévoile des tableaux oniriques, qui semblent tout droit sortis d’un monde parallèle.

Fragments d’émotions

« Ces images sont des réinterprétations libres du clip Hundred Reasons, de HAON, un rappeur sud-coréen que je suis depuis ses débuts. J’ai échangé avec lui et il m’a laissé carte blanche. Il est souvent surpris de ce que je fais de ses vidéos musicales. C’est ce dialogue créatif qui me motive, car on s’approche petit à petit d’une future collaboration. 

Le clip original est posé, introspectif, presque cinématographique. On y ressent une grande pudeur émotionnelle, une tension retenue et des silences qui en disent long. C’est une œuvre visuelle à la fois brute et poétique. Mais mes images prennent un autre chemin. J’ai voulu capter des fragments d’émotions, des instants suspendus, les détachant de toute narration. Les visages sont flous, les silhouettes se diluent dans les textures troubles et granuleuses. Ce n’est pas une copie du clip, mais plutôt une réponse, une prolongation. Comme si l’on entrait dans l’état mental qu’il provoque, comme si on le regardait les yeux fermés. 

Je l’imagine comme une fusion entre l’univers de HAON et le mien. Je ne l’illustre pas, je l’interprète. Je ne cherche pas la clarté, je suis à la poursuite des sensations et des émotions. Ce flou, cette lenteur, cette mélancolie sourde, c’est ma manière de traduire ce que ses images déclenchent en moi. Ce genre de travail n’est pas seulement un exercice de style. Il me permet de proposer autre chose, d’ouvrir une nouvelle dimension à une œuvre déjà existante. »

Une personne allongée avec des pommes en premier plan
© Jonathan Chandi
une jeune femme en blanc qui danse
© Jonathan Chandi
À lire aussi
Dans l'œil d'Ilanit Illouz : au creux du temps figé
© Ilanit Illouz
Dans l’œil d’Ilanit Illouz : au creux du temps figé
Aujourd’hui, plongée dans l’œil d’Ilanit Illouz. Jusqu’au 24 août 2025, la Maison européenne de la photographie consacre une exposition à…
04 août 2025   •  
Écrit par Costanza Spina
Dans l'œil de SMITH : métamorphose des sols
Dami (Fulmen) © SMITH pour la résidence INSTANTS, Château Palmer et Leica, 2024
Dans l’œil de SMITH : métamorphose des sols
Aujourd’hui, plongée dans l’œil de SMITH, qui nous révèle les dessous de deux images issues de sa série Dami (Fulmen), réalisée lors de…
21 avril 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Explorez
La sélection Instagram #535 : surfaces texturées
© Laura Barth / Instagram
La sélection Instagram #535 : surfaces texturées
Les artistes de notre sélection Instagram de la semaine explorent la matérialité de la photographie. Du papier aux émulsions, en passant...
02 décembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Twin Peaks, ambiguïté et nature morte : dans la photothèque de Stan Desjeux
Si tu devais ne choisir qu’une seule de tes images, laquelle serait-ce ? © Stan Desjeux
Twin Peaks, ambiguïté et nature morte : dans la photothèque de Stan Desjeux
Des premiers émois photographiques aux coups de cœur les plus récents, les artistes des pages de Fisheye reviennent sur les œuvres et les...
01 décembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Fury, l'univers « crépusculaire » de Marie Quéau
Sans titre #90, Campus Univers Cascades, 2023, extrait de la série Fury, Courtesy Galerie Les filles du calvaire, Paris © Marie Quéau / ADAGP, Paris, 2025
Fury, l’univers « crépusculaire » de Marie Quéau
Jusqu’au 8 février 2026, Marie Quéau, cinquième lauréate du prix Le Bal/ADAGP de la Jeune Création, présente Fury. Dans cette exposition...
29 novembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Éternel été, mémoire et masculinité : nos coups de cœur photo de novembre 2025
Red Is Over My Lover. Not Anymore Mi Amor © Laura Lafon
Éternel été, mémoire et masculinité : nos coups de cœur photo de novembre 2025
Expositions, immersion dans une série, anecdotes, vidéos… Chaque mois, la rédaction de Fisheye revient sur les actualités photo qui l’ont...
28 novembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Bellissima : la fabrique des apparences par Carla Rossi
© Carla Rossi
Bellissima : la fabrique des apparences par Carla Rossi
Dans son ouvrage Bellissima, publié par Art Paper Editions, Carla Rossi explore les désirs, les façades et les codes qui façonnent la...
03 décembre 2025   •  
Écrit par Cassandre Thomas
La sélection Instagram #535 : surfaces texturées
© Laura Barth / Instagram
La sélection Instagram #535 : surfaces texturées
Les artistes de notre sélection Instagram de la semaine explorent la matérialité de la photographie. Du papier aux émulsions, en passant...
02 décembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Twin Peaks, ambiguïté et nature morte : dans la photothèque de Stan Desjeux
Si tu devais ne choisir qu’une seule de tes images, laquelle serait-ce ? © Stan Desjeux
Twin Peaks, ambiguïté et nature morte : dans la photothèque de Stan Desjeux
Des premiers émois photographiques aux coups de cœur les plus récents, les artistes des pages de Fisheye reviennent sur les œuvres et les...
01 décembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Les coups de cœur #567 : Himanshu Vats et Grant Harder
© Grant Harder
Les coups de cœur #567 : Himanshu Vats et Grant Harder
Himanshu Vats et Grant Harder, nos coups de cœur de la semaine, explorent la nature, et les liens qu’elle entretient avec les humains. Le...
01 décembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger