La double vie d’Instagram

23 janvier 2018   •  
Écrit par Anaïs Viand
La double vie d'Instagram

Pour Reza Bahrami, Instagram ne peut se résumer à la pratique du selfie. Au contraire. À travers ReCognition, le photographe iranien questionne notre comportement sur les réseaux sociaux à travers des clichés dupliqués ordinaires, dramatiques et parfois incongrus.

En octobre 2017, Reza et son épouse se lancent dans un projet abracadabrant intitulé ReCognition. « Sarah et moi avons commencé à fouiller plus de 5 000 comptes publics sur Instagram. Cela nous a pris plus d’un mois ! », raconte le photographe iranien basé à Los Angeles. Leur mission ? « Parcourir des milliers de photos, choisir les plus créatives, dramatiques et authentiques, les recréer et les poster sur Instagram. » Le choix de la plate-forme a été évident, « c’est l’un des réseaux sociaux les plus populaires aujourd’hui », rappelle le photographe qui avoue avoir développé une relation « amour-haine » avec le média. Impressionné par les effets de ces applications sur nos vies, l’artiste a laissé libre cours à sa créativité et s’est prêté au jeu.

© REZA

Recadrer la réalité ?

Dans ReCognition, nul besoin de scruter attentivement les diptyques, car aucune des mises en scène ne correspond à l’identique à son image d’origine, les amateurs du jeu des sept différences sont avertis. Ici, le fond l’emporte sur la forme. Dois-je poster cette photo ? Pourquoi ai-je publié cette image ? Dois-je supprimer ce commentaire ? Chaque photo hébergée sur la plate-forme renferme des questions personnelles et sociétales. Pourquoi donc s’afficher dans des positions inconfortables ? Quelle est la bonne image à renvoyer aux autres ? Qu’est-ce qu’une bonne image finalement ? À travers ce projet, Reza s’intéresse à la représentation de soi et questionne les limites entre la sphère intime et la sphère publique. Car s’il est facile de mettre son âme à nu, il est plus compliqué de déceler les motivations de chacun. Un défi qu’a relevé le photographe en contactant les instagrammeurs. Il nous retranscrit par exemple les mots de l’auteur de sa photo préférée – une cigarette trouant un billet : « J’ai pris cette photo dans un bar avec une de mes anciennes colocataires. Elle avait obtenu son diplôme, et moi, un nouvel emploi. Nous étions là pour fêter ces bonnes nouvelles. Après quelques verres, nous avons réalisé à quel point nous travaillions dur pour gagner de l’argent pour devoir ensuite l’échanger contre des biens et des services. »

© REZA

© REZA © REZA

© REZA

© REZA

© REZA

Explorez
Achtung Kultur : une déclinaison de l'intime par la jeune création allemande
© Anna Streidl
Achtung Kultur : une déclinaison de l’intime par la jeune création allemande
Jusqu’au 17 mai 2025, l’association Achtung Kultur célèbre la création émergente au Consulat général d’Allemagne de Bordeaux....
25 avril 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Eulogy : Sander Coers et les traumatismes intergénérationnels
© Sander Coers
Eulogy : Sander Coers et les traumatismes intergénérationnels
Au fil de ses projets, Sander Coers sonde la mémoire en s’intéressant notamment à l’influence que nos souvenirs exercent sur notre...
19 avril 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Patricia Voulgaris, entre rêves et réminiscences
© Patricia Voulgaris
Patricia Voulgaris, entre rêves et réminiscences
L’artiste Patricia Voulgaris ancre sa pratique dans un dialogue entre réalité et fiction. À travers le noir et blanc, elle crée...
16 avril 2025   •  
Écrit par Costanza Spina
Acedia de Louise Desnos : la douceur de la paresse 
© Louise Desnos
Acedia de Louise Desnos : la douceur de la paresse 
Entre lumière suspendue et tendre mélancolie, Louise Desnos dévoile Acedia, un projet photographique au long cours, sensible et...
16 avril 2025   •  
Écrit par Cassandre Thomas
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Émeline Amétis : la possibilité d’un geste
© Émeline Amétis, Oh murmure, ta traversée est le mât de notre vaisseau
Émeline Amétis : la possibilité d’un geste
Circulation(s) – le festival du collectif Fetart à la direction artistique entièrement féminine – fête ses quinze ans cette année...
26 avril 2025   •  
Écrit par Milena III
Achtung Kultur : une déclinaison de l'intime par la jeune création allemande
© Anna Streidl
Achtung Kultur : une déclinaison de l’intime par la jeune création allemande
Jusqu’au 17 mai 2025, l’association Achtung Kultur célèbre la création émergente au Consulat général d’Allemagne de Bordeaux....
25 avril 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Stefan Dotter, dans le sillage des femmes de la mer
© Stefan Dotter
Stefan Dotter, dans le sillage des femmes de la mer
Photographe allemand installé à Tokyo, Stefan Dotter signe, avec Women of the Sea, une immersion sensible au cœur d’une tradition...
25 avril 2025   •  
Écrit par Cassandre Thomas
Kyotographie : cap sur Kyoto, où l’image devient territoire
© Mao Ishikawa
Kyotographie : cap sur Kyoto, où l’image devient territoire
Direction le Japon, plus précisément Kyoto, où le festival Kyotographie, fondé en 2013 par Lucille Reyboz et Yusuke Nakanishi, explore...
25 avril 2025   •  
Écrit par Fabrice Laroche