L’exposition Belleville de Thomas Boivin, présentée du 10 mars au 4 juin à Maison de la Photographie Robert Doisneau, nous offre une promenade dans le Paris du 19e arrondissement qui réactualise la photographie de quartier.
C’est dans une grande simplicité, loin de toute volonté de description sociologique, que les photographies de Thomas Boivin explorent le paysage urbain de Belleville, le visage de ses passants, ainsi que des objets vagabonds, cristallisés en natures mortes. S’attachant à des détails singuliers – drapés flottants au vent, plis soyeux des vêtements, figures ensoleillées, parfois dans d’étranges postures – pris entre mouvement et inertie, il renouvelle l’image un peu figée du Paris classique.
Pour réaliser ces portraits de sujets animés et inanimés, pris entre 2010 et 2020, l’artiste a demandé aux passants la permission de les photographier : ici, pas de cliché à la sauvette ou prises sur le vif. Il s’agissait alors de retrouver, lors de la pause des modèles, ce que l’œil de l’auteur avait pu saisir, dans l’immédiateté de l’instant. Atteindre, dans cette offrande généreuse du modèle qui pose, la spontanéité, le naturel du sujet qui ne se sait pas observé. Les corps ondoient ainsi avec franchise et bienveillance sous l’objectif de Thomas Boivin, tantôt s’unissant avec le décor, tantôt s’en détachant, sans faux-semblant. Cette nouvelle façon d’approcher ses modèles est une preuve, s’il en fallait, qu’il est encore possible de photographier ses semblables dans l’espace public.
De cette promenade dans un autre Belleville, à travers l’œil sensible de Thomas Boivin, on sort comme apaisé. Les photographies, d’une grande douceur et d’une clarté estivale réjouissante, nous invitent à de chaleureuses rencontres. S’installe ainsi un double dialogue : des corps photographiés entre eux, qui se font écho, ou qui s’opposent, et un dialogue muet entre les passants et les spectateurs, ces derniers questionnant les postures, les regards qui leur sont offerts.
© Thomas Boivin