La saturation des corps

04 décembre 2019   •  
Écrit par Lou Tsatsas
La saturation des corps

Sujets insolites ou tendances, faites un break avec notre curiosité de la semaine. En créant des images absurdes et chaotiques, le photographe américain Pelle Cass s’amuse à déconstruire la réalité.

« Un ami de mes parents m’a offert un boîtier lorsque j’avais treize ans. Je devais avoir l’air de m’ennuyer, tout seul. Si la photographie a soigné l’ennui, elle n’a rien pu faire contre la solitude »,

déclare Pelle Cass. Peut-être est-ce la raison pour laquelle les créations du photographe américain venu du Massachusetts sont saturées par des foules étranges… Ce n’est que récemment que l’auteur est devenu « artiste à plein temps », prenant du plaisir à développer des séries surréalistes, transformant le réel en un théâtre absurde.

« En 2015, un magazine m’a engagé pour shooter l’équipe de basket Atlanta Hawks. Je n’avais jamais photographié le sport avant, mais j’aimais capturer les gens en mouvement, leurs expressions. Dès les premières images, j’ai su qu’il me fallait creuser ce sujet », raconte le photographe, qui n’aime pas voir ses créations comme de simples collages. « J’aime fabriquer des choses. Passer des heures sur Photoshop me donne l’impression de réaliser des travaux manuels. Pourtant, mon approche – malgré son esthétique chaotique – reste ancrée dans le réel », précise-t-il. En partant d’un décor presque vide, l’artiste choisit ensuite quoi ajouter, quoi effacer, sans modifier les positions de ses sujets, « pas même un pixel ! » s’amuse-t-il. De ses œuvres émerge un désordre fascinant, nous invitant à reconsidérer notre vision du monde.

© Pelle Cass

Un chaos rythmique

Car dans ce « chaos rythmique », comme il le définit, Pelle Cass s’amuse à dévoiler l’inquiétante étrangeté de notre quotidien. S’il ne reproduit que le réel, la masse des corps, figés dans des positions incongrues, évoque pour lui une « dimension dionysiaque ». Le sport, d’ordinaire si ordonné devient imprévisible, forçant le regardeur à observer les joueurs, extraits de leur narration. Un univers insensé où les pires débordements peuvent se dérouler, en tout anonymat. Doit-on être pris de panique, face à cette foule agitée ? Ou voir, dans ces tableaux, une illustration de la consommation de masse, ou de la surpopulation ?

Pour le photographe, ces images n’entendent pas dénoncer, mais simplement contraster avec la normalité. Une folie qui l’attire irrésistiblement. « J’aime cependant l’idée que le spectateur songe à ces enjeux, je pense qu’il s’agit d’une interprétation raisonnable face à ce genre de situation. Ce chaos pourrait bien se trouver aux frontières de la guerre et de l’orgie », confie-t-il. Une ambiguïté sournoise, alimentant nos émotions : du rire à l’effroi, de l’absurde à la saturation. Dans cette marée humaine, les règles semblent exister pour être transgressées, et tout débordement est encouragé.

© Pelle Cass

© Pelle Cass

© Pelle Cass

© Pelle Cass

© Pelle Cass

© Pelle Cass

Explorez
Les images de la semaine du 3 novembre 2025 : les actualités de Fisheye
© Ian Cheibub
Les images de la semaine du 3 novembre 2025 : les actualités de Fisheye
C’est l’heure du récap ! Entre la parution d’un nouvel ouvrage, la sortie du numéro #74 et celle d’un épisode de Focus, la semaine a été...
09 novembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Paris Photo 2025 célèbre la photographie au Grand Palais
© Chloé Azzopardi / Fisheye Gallery
Paris Photo 2025 célèbre la photographie au Grand Palais
Du 13 au 16 novembre 2025, les yeux des amateurs de photographie seront tournés vers Paris Photo. La foire internationale se tiendra de...
05 novembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Les coups de cœur #564 : Lycien-David Cséry et Ana da Silva
© Ana da Silva
Les coups de cœur #564 : Lycien-David Cséry et Ana da Silva
Lycien-David Cséry et Ana da Silva, nos coups de cœur de la semaine, prêtent attention aux détails. Le premier observe les objets et les...
03 novembre 2025   •  
Écrit par Marie Baranger
Les images de la semaine du 27 octobre 2025 : communautés et rétrospectives
Jennifer et Saba, de la série We're Just Trying to Learn How to Love © Hamza Ashraf
Les images de la semaine du 27 octobre 2025 : communautés et rétrospectives
C’est l’heure du récap ! Cette semaine, nous vous parlons de différentes communautés, de sentiments amoureux et de rétrospectives...
02 novembre 2025   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Une fable collective au cœur du béton, par Alexandre Silberman
© Alexandre Silberman, Nature
Une fable collective au cœur du béton, par Alexandre Silberman
Exposée à la galerie Madé, dans le cadre de PhotoSaintGermain, jusqu’au 30 novembre 2025, la série NATURE d'Alexandre Silberman...
Il y a 3 heures   •  
Écrit par Milena III
OPPO x Fisheye : les visions parisiennes d’Emma Birski et Marvin Bonheur 
© Emma Birski
OPPO x Fisheye : les visions parisiennes d’Emma Birski et Marvin Bonheur 
Les 17 et 18 novembre, la Fisheye Gallery accueille l’exposition Paris Non Stop, curaté par Ernicreative et Fisheye, née de la rencontre...
Il y a 7 heures   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Sandra Eleta, les visages du monde invisible
© Sandra Eleta
Sandra Eleta, les visages du monde invisible
À la Galerie Rouge, jusqu'au 6 décembre 2025, l’exposition de Sandra Eleta révèle un univers où la photographie dépasse le simple...
Il y a 11 heures   •  
Écrit par Costanza Spina
28 artistes à (re)découvrir à Paris Photo 2025
Liulitun, Beijing 2002 No.13 © RongRong & inri
28 artistes à (re)découvrir à Paris Photo 2025
La foire internationale Paris Photo investit le Grand Palais du 13 au 16 novembre 2025. Pour cette occasion, la rédaction de Fisheye vous...
11 novembre 2025   •  
Écrit par Fisheye Magazine