Pour sa troisième édition, le Daniele Tamagni Grant récompense le jeune photographe Soudanais Ahmed Khirelsid pour son travail Under Control. Il narre son histoire, celle du conflit à Khartoum qui l’a contraint à fuir vers l’inconnu. Dans ses images, les traumatismes de la guerre sont palpables, et ceux de l’incertitude se propagent sur les visages.
Deux ans après le décès du photographe Milanais Daniele Tamagni en 2017, sa famille, désireuse de porter un honneur à son œuvre et de soutenir la jeune génération de photographes, crée le Daniele Tamagni Grant. Les critères : avoir maximum cinq ans d’expérience professionnelle, venir de n’importe quel pays du monde et aborder des questions relatives à l’identité africaine, au continent Africain ou à sa diaspora. Pour cette troisième édition, un jury international a sélectionné, parmi près de 280 candidatures en provenance de 63 pays, le travail du jeune photographe Saoudien Ahmed Khirelsid, qui constitue pour la présidente du jury Aïda Muluneh « une abstraction des réalités africaines, encadrées dans les coins uniques de sa vision. » Il obtient ainsi une bourse pour effectuer un an de formation en photojournalisme et en photographie documentaire à la Market Photo Workshop School de Johannesburg. Il pourra également présenter un nouveau travail développé durant sa formation à l’African Foto Fair d’Abidjan.
« Quand on se retrouve au milieu du champ de bataille, il n’y a qu’une option, s’échapper »
Né en 2001 à Omdurman, Ahmed Khirelsid a été témoin des violences qui sévissent dans son pays, notamment durant les cinq dernières années où révolution, pandémie et coup d’État en 2021 ont drastiquement impacté la vie des Soudanais. Lorsque la guerre éclate à Khartoum, une seule issue s’offre à lui et sa famille : fuir. Dans Under Control, le jeune artiste documente son expérience alors qu’il quitte sa maison et la nécessité à s’adapter constamment face à l’inconnu. « J’essaie d’explorer et de comprendre les traumatismes psychologiques et émotionnels subis à cause de cette guerre, ainsi que ceux qui m’entourent… Nous avons fui vers un village appelé Al-Hasaya, où mon oncle nous a offert une maison abandonnée. Nous ne savons pas quelle sera la prochaine étape. C’est une période d’attente et d’incertitude… », confie-t-il. Son approche du conflit à la croisée du documentaire et de la poésie et en noir et blanc a conquis le jury. « Chaque image contient une tension différente, mêlant les techniques documentaires les plus dures à une approche plus poétique et artistique. Lorsque vous voyez son travail, vous avez une réelle impression de la complexité de la guerre au Soudan et de l’état d’esprit de l’observateur (Ahmed), qui est très intimement lié à l’espace qu’il couvre », soutient Christopher Udoh, membre du jury et fondateur et directeur de la Fondation Anyen Iyak pour l’art et la culture au Nigeria.