Réalisé par Camille Ménager et produit par Brotherfilms, Le siècle de Sabine Weiss, documentaire inédit sur la photographe franco-suisse sera diffusé le 24 mars prochain à 22h40 sur France 5. Un film sensible et rempli d’humour à l’image d’une photographe profondément humaine.
En octobre dernier, à l’occasion de Paris Photo, était dévoilée au sein du parcours Elles X Paris Photo une sélection de 77 œuvres de Sabine Weiss, ainsi que notre hors-série à son effigie conçu en collaboration avec Women In Motion – programme lancé par Kering. En exclusivité, une avant-première du Siècle de Sabine Weiss, réalisé par Camille Ménager s’était déroulée au Silencio des Prés. Le 24 mars à 22h40, le film sera rendu disponible au public sur France 5. Produit par Brotherfilms avec la participation de France Télévision et du Centre National du Cinéma et de l’Image Animée, ce documentaire revient sur des moments clefs de l’histoire de l’artiste en lui rendant un hommage appuyé.
« Quelles sont les images qui restent d’une existence passée à immortaliser l’autre, quand on atteint l’âge du crépuscule ? ». Une question hautement symbolique à laquelle la réalisatrice Camille Ménager tente de répondre avec beaucoup de tendresse. Sans intrusion, elle rend alors compte des éléments qui révèlent la photographe et de son chemin parcouru. De ses débuts à ses images dans les rues de New York, en passant par la rencontre avec son compagnon de toujours, Hugh Weiss, et la naissance de leur fille Marion, son amitié avec Doisneau, ses premiers pas dans l’agence Rapho et son exposition au MoMa… C’est tout un univers artistique qui s’offre à nous à travers sa voix et celles des personnes qui ont croisé sa route.
© Sabine Weiss
Pour l’amour des autres
Nous sommes dans le studio de Sabine Weiss en 2021, elle a 97 ans. Attentif·ves, nous la regardons faire défiler énergiquement d’anciens tirages datant de plus de cinquante ans. « Moches, moches, moches… C’est mal cadré… Il y a de bonnes intentions, mais c’est techniquement tellement mauvais », lance-t-elle avec une grande lucidité. À peine invité·es à s’immiscer dans l’intimité de la photographe, entre les planches contacts de son passé, le mystère s’efface déjà pour laisser place à toute son authenticité. Dans les bribes d’instants partagés, Camille Ménager construit un récit d’où s’élèvent des témoignages personnels, des écrits récités à haute voix et des interventions de proches. Les visages de personnes qui l’entouraient défilent à mesure que sa vie se raconte. Son assistante Laure Augustins, sa fille Marion Weiss, son amie Francine Deroudille, Virginie Chardin… Tous·tes nous parlent d’elle de façon singulière, chacun·e usant de ses propres surnoms ou expressions pour l’évoquer : « Celle qui regardait les choses minuscules avec la même intention que les choses que l’on met en majesté », une « sociologue sans le savoir », « une passeuse d’âme ». In fine, des liens se tissent naturellement entre les éléments biographiques de l’artiste, ses photographies phares, celles qu’elle jugeait mauvaises et quelques inconnues. Des liens qui, à l’instar de ceux que Sabine Weiss construisait avec les personnes qu’elle figeait, se forment dans une atmosphère bienveillante et teintée d’humour. Car dans tout cela, Camille Ménager réussit à apprivoiser l’artiste et à révéler tout l’amour qu’elle portait aux autres par la photographie.
Si le décès de Sabine Weiss est survenu pendant la réalisation du film, ce qui en a résulté se visionne comme le témoignage sensible d’une vie remplie et emplie de bonté de cœur. Après la projection, ce qui nous reste, c’est surtout l’idée d’une artiste humble, pour qui l’autre, peu importe sa condition, avait le droit d’être vu, pleinement regardé et apprécié à sa juste valeur, sans artifices. Puisque derrière son objectif, tout prenait une importance, le monde, tel qu’il était, se lisait entièrement. « Elle ne racontait pas beaucoup, elle regardait énormément, elle montrait. (…) [Dans sa vie, tous·tes] avaient le droit d’être important, de laisser une trace ».
© Sabine Weiss
Image d’ouverture : Sabine Weiss dans son atelier, 1955